Radio-Canada Info

Festin boréal, de Robert Morin : décomposit­ion à ciel ouvert

- Charles Rioux

Sept ans après Le problème d’infiltrati­on, le réalisateu­r québécois Robert Morin est de retour avec un ovni ci‐ nématograp­hique qui prend l’affiche vendredi au Québec. Véritable tour de main technique, Festin bo‐ réal suit le destin d’un ori‐ gnal atteint d’une flèche qui rend son dernier souffle au fond des bois, of‐ frant ainsi sa carcasse en putréfacti­on aux insectes et aux bêtes qui l’en‐ tourent.

Il a fallu sept carcasses d’orignal à Robert Morin pour aller au bout de son idée, mais il insiste, aucun animal n’a été maltraité dans le pro‐ cessus. Le réalisateu­r avait une entente avec le ministère des Transports pour récupé‐ rer les dépouilles d’orignaux tués dans des accidents de la route.

Il s’en tue chaque année des dizaines sur les routes. Ils nous envoyaient les ani‐ maux congelés, et souvent ils étaient très déboîtés, alors il fallait les remboîter, explique le cinéaste au bout du fil.

Pour ce qui est du pre‐ mier orignal, celui qui reçoit une flèche en plein flanc avant de s’affaisser dans la forêt, l’animal n’a pas été réellement abattu. Il a plutôt été filmé alors qu’on l’avait endormi pour lui tailler les sabots. Ces premières scènes font usage de quelques sub‐ terfuges visuels, comme du faux sang et une tête d’ori‐ gnal mécanisée, mais on n’y voit que du feu à l’écran.

En fait, le film est divisé en deux parties, dont une pre‐ mière qui est complèteme­nt fictive [...] Ça commence à être un documentai­re quand l’orignal est mort, donc avec la première carcasse qu’on a utilisée, résume Robert Mo‐ rin.

Trois ans à jouer dans la charogne

Le tournage de Festin bo‐ réal, qui s’est étalé sur trois ans entre la réserve faunique La Vérendrye, Saguenay et le parc national de la Gaspésie, a été une véritable épreuve de patience pour le cinéaste et son équipe, qui comprend le directeur photo Thomas Leblanc Murray et le trap‐ peur Stéphane Grondin. J’ai trouvé ça nauséabond, on a joué pendant trois ans dans de la charogne. Je t’avoue que c’était un peu difficile, ex‐ plique le réalisateu­r.

Le froid, l’attente, les nom‐ breux bris de caméra dus à une nature sauvage, autant de défis qui se sont ajoutés à la rapidité avec laquelle les animaux dévoraient les dé‐ pouilles d’orignal. Il y a un orignal qui avait été complè‐ tement mangé seulement par des corbeaux, deux autres par des ours, se sou‐ vient Robert Morin, qui sou‐ haitait avoir la plus grande variété possible d'animaux à l'écran.

C’est d’ailleurs pourquoi il a fallu autant de carcasses, qui ont été placées à diffé‐ rents endroits de la forêt pour avoir les meilleures images possibles. Le même panache synthétiqu­e a été utilisé pour toutes les car‐ casses par souci de conti‐ nuité, alors que plusieurs bêtes fournies par le minis‐ tère des Transports étaient

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