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Quand la Lune camoufle le Soleil : du mystique au scientifiq­ue

- Alain Labelle

Des éclipses solaires se pro‐ duisaient dans le ciel pré‐ historique, bien avant qu’Homo sapiens ne foule la surface terrestre.

La plus ancienne éclipse de l’histoire humaine se se‐ rait produite, selon nos connaissan­ces actuelles, il y a plus de 5000 ans.

Des pétroglyph­es compo‐ sés de cercles concentriq­ues qui se chevauchen­t, décou‐ verts au monument mégali‐ thique de Loughcrew, en Ir‐ lande, représente­raient selon certains scientifiq­ues une éclipse survenue le 30 no‐ vembre 3340 avant notre ère. Cette interpréta­tion ne fait cependant pas l’unanimité et reste débattue.

Un peu plus récemment, environ en 1200 avant notre ère, des scribes d'Anyang, en Chine, consignaie­nt les éclipses sur des omoplates de boeuf et des carapaces de tortue. Les scribes auraient inscrit : Le Soleil a été mangé.

En Amérique centrale, les Mayas tenaient aussi des re‐ gistres des événements as‐ tronomique­s, documentés par des hiéroglyph­es gravés dans la pierre ou écrits dans des codex, des livres d'écorce pliés en accordéon.

D’autres groupes indi‐ gènes d'Amérique du Nord ont aussi répertorié les éclipses. À Chaco Canyon, au Nouveau-Mexique, un pétro‐ glyphe gravé dans une paroi rocheuse par les premiers Pueblos représente­rait une éclipse qui s'est produite à cet endroit le 11 juillet 1097. Le pétroglyph­e présente une boucle tourbillon­nante qui jaillit sur le côté, représen‐ tant ce qui serait une éjection de masse coronale du Soleil.

Repères

Dans toutes les civilisa‐ tions et religions qui sont ap‐ parues sur Terre depuis la préhistoir­e et qui ont laissé des documents écrits, des éclipses sont décrites. Elles ont longtemps été considé‐ rées comme de mauvais pré‐ sages. Les Grecs de l'Anti‐ quité pensaient que la dispa‐ rition du Soleil était un signe de la colère des dieux et qu'elle annonçait des temps sombres. Les anciens Chinois pensaient que les éclipses étaient des signes célestes annonçant l'avenir de l'empe‐ reur. La légende racontait aussi qu’un dragon céleste dévorait le Soleil. À Babylone, certains voyaient les éclipses comme un présage politique. Des souverains demandaien­t aux roturiers de monter sur le trône lors d'une éclipse, au cas où la disparitio­n du Soleil entraînera­it un effondreme­nt du pouvoir politique. En Tur‐ quie, des armées auraient déposé leurs armes et ac‐ cepté un traité de paix en 585 av. J.-C., après avoir as‐ sisté à une éclipse et consi‐ déré l'événement comme un signe des dieux.

La science de l’ombre

Si des interpréta­tions sur‐ naturelles ont expliqué les éclipses à travers les siècles, elles sont étudiées de façon scientifiq­ue depuis au moins 700 ans av. J.-C., explique l’as‐ trophysici­en Olivier Hernan‐ dez, directeur du Planéta‐ rium de Montréal. Parce qu’elles sont un jeu d’ombre et de lumière entre la Terre, la Lune et le Soleil, elles peuvent nous permettre de mieux cerner la nature des objets observés.

Olivier Hernandez ex‐ plique que les éclipses ont rapidement permis de calcu‐ ler assez précisémen­t les dia‐ mètres de la Lune, de la Terre et du Soleil.

On a été capable de calcu‐ ler correcteme­nt les dia‐ mètres de la Terre et du So‐ leil bien avant même qu'on sache que la Terre tournait autour du Soleil! C’était quand même un exploit!

Olivier Hernandez, Plané‐ tarium de Montréal

La capacité de la Lune à couvrir le Soleil pendant les éclipses solaires a longtemps été la seule façon d'étudier sa couronne, la couche ex‐ terne de l’astre, et sa chro‐ mosphère, qui se situe tout juste dessous. Cette dernière se manifeste pendant une éclipse sous la forme d’un mince anneau rouge.

En fait, la couronne du So‐ leil a été décrite pour la pre‐ mière fois lors d’une éclipse totale le 22 décembre 968.

La découverte de l’hé‐ lium

En 1868, pendant une éclipse totale en Inde, le phy‐ sicien et astronome français Pierre Jules César Janssen re‐ marque pour la première fois la présence de raies jaunes très brillantes dans le spectre du Soleil.

La découverte de l'hélium s'est faite à ce moment en observant la chromosphè­re du Soleil, rappelle l’astrophy‐ sicien Olivier Hernandez, di‐ recteur du Planétariu­m de Montréal.

Ce n’est toutefois que quelques mois plus tard qu’une analyse approfondi­e de son collègue britanniqu­e Joseph Norman Lockyer per‐ mettra d’établir qu'elles cor‐ respondent à l’élément in‐ connu qui sera nommé hé‐ lium en l’honneur du dieu grec du Soleil, Hélios.

De plus, cette même éclipse permet au chercheur de bien distinguer les raies caractéris­tiques de l'hydro‐ gène dans les protubéran­ces solaires, des structures fai‐ sant partie de la couronne.

Le cycle solaire

L’astronome français a aussi répondu à une ques‐ tion posée par son collègue allemand Heinrich Schwabe dans les années 1840. Ce dernier, qui avait découvert que le nombre de taches dé‐ nombrables à la surface du Soleil augmente et diminue selon un cycle de 11 ans, se demandait si le caractère de la couronne solaire changeait également en fonction de ce cycle.

L'astronome français Pierre Jules César Janssen a été l'un des premiers à ob‐ server une corrélatio­n en comparant les éclipses de 1871 et 1878.

Ainsi, la couronne appa‐ raît plus ronde au maximum des taches solaires, et elle présente une forme plus el‐ liptique au minimum de l’acti‐ vité.

La théorie de la relati‐ vité

Une éclipse solaire a aussi permis de vérifier la théorie de la relativité générale d’Al‐ bert Einstein.

Le physicien avait pré‐ senté sa théorie en 1916, mais celle-ci n’avait pas en‐ core été validée par des ob‐ servations dans la réalité. Ce fut chose faite en 1919 grâce à des expédition­s scienti‐ fiques dirigées par l’astro‐ nome britanniqu­e Arthur Ed‐ dington.

L’une des prédiction­s d’Einstein était que la gravité va faire plier un petit peu la lumière d'une étoile loin‐ taine, explique le professeur Nicolas Cowan des départe‐ ments de physique et de sciences de la Terre et des planètes de l’Université Mc‐ Gill.

Un objet de grande taille déformerai­t suffisamme­nt l'espace-temps pour que sa gravité puisse déformer la lu‐ mière, ajoute le professeur, qui rappelle que cet effet n’est pas facile à détecter, particuliè­rement à l’époque, parce qu’il n’y avait pas d’ob‐ jet assez massif entre les étoiles et nous.

Sauf lorsqu’une éclipse to‐ tale du Soleil survient.

Avec un ciel bleu, on ne voit pas vraiment les étoiles autour. Mais durant une éclipse, puisque le Soleil est caché, le ciel autour devient noir, ce qui permet de voir les étoiles voisines, souligne Nicolas Cowan.

Le jour de l'éclipse du 29 mai 1919, deux équipes asso‐ ciées à Arthur Eddington se sont rendues à Sobral, au Brésil, et à Sao Tomé-et-Prin‐ cipe, au large du Gabon, en Afrique, pour photograph­ier un amas d’étoiles proches du Soleil, dans l’objectif de com‐ parer leurs positions lorsque le Soleil ne se trouve pas entre elles et la Terre.

Après plusieurs mois d’analyse des données, Ar‐ thur Eddington a annoncé le résultat de l’expérience de‐ vant la Royal Astronomic­al Society à Londres : ses conclusion­s concordent avec les prédiction­s d’Einstein.

C'était le premier grand test réussi pour la théorie de la relativité générale, qui a depuis été reconfirmé­e à plu‐ sieurs occasions.

Nicolas Cowan, Université McGill

Tourne la Terre

Le ralentisse­ment de la vi‐ tesse de rotation de la Terre a aussi été déduit de l’obser‐ vation des éclipses, rappelle Olivier Hernandez.

Lors des premières me‐ sures qu'on a faites, on s'est aperçu qu’une éclipse qu'on attendait au-dessus du Ma‐ roc apparaissa­it plutôt audessus de Babylone, explique Olivier Hernandez.

Des astronomes ont uti‐ lisé des observatio­ns d’éclipses passées pour préci‐ ser les changement­s dans la rotation de la Terre à travers le temps. Ainsi, en détermi‐ nant exactement le moment de l'éclipse et l'endroit où l'ombre de la Lune est tom‐ bée sur la Terre, ils ont pu calculer la vitesse de rotation de la Terre.

Cela nous a permis de comprendre qu’en 2500 ans, la Terre avait ralenti d’un peu plus de 3 heures.

Olivier Hernandez, Plané‐ tarium de Montréal

Cerner l’ordre de gran‐ deur

Au 18e siècle, le travail du navigateur James Cook et de l'astronome Charles Green a également permis de mieux cerner l’ordre de grandeur de notre système solaire grâce à un autre type d’éclipse : un passage de Vénus devant le Soleil.

Vénus est plus grande que la Lune, mais elle est aussi pas mal plus loin de la Terre que la Lune. Elle ne peut donc pas complèteme­nt ca‐ moufler le Soleil, mais uni‐ quement une infime portion. C’est ce qu’on appelle un transit.

Nicolas Cowan, Université McGill

À ce moment, Vénus passe directemen­t sur la tra‐ jectoire entre le Soleil et la Terre, prenant l'apparence d'un petit point noir se dépla‐ çant sur la face du Soleil, ajoute le professeur Cowan.

Les astronomes ont vite réalisé qu'ils pourraient dé‐ terminer la taille du système solaire en observant le même transit de Vénus de deux endroits très éloignés sur la Terre.

Au cours de leur premier voyage autour du monde, le capitaine Cook, l'astronome Charles Green et l'équipage du HMS Endeavour ont ob‐

servé et documenté le transit de Vénus devant le Soleil tel qu'il est apparu le 3 juin 1769, depuis Tahiti.

En faisant de petits des‐ sins très précis, ils vont voir la planète Vénus passer de‐ vant une partie un petit peu différente du Soleil qu’ailleurs sur la planète et, grâce à la trigonomét­rie, vont être capables d’établir les rayons de la Terre et du So‐ leil, et des principale­s pla‐ nètes de notre système.

Nicolas Cowan, Université McGill

L’ordre des choses

À l’époque, l’idée d’un sys‐ tème héliocentr­ique avec le

Soleil au centre avait fait son chemin, mais on ne savait toujours pas encore la taille des objets qui s’y trouvaient.

Ils savaient que le Soleil était là, qu’il était au milieu, mais sa taille demeurait in‐ connue. C’était une immense boule lointaine, ou plus pe‐ tite et plus proche?

Nicolas Cowan, Université

McGill

Ces travaux ont ainsi per‐ mis de mesurer l'unité astro‐ nomique, qui correspond ap‐ proximativ­ement à la dis‐ tance entre la Terre et le So‐ leil, soit environ 150 millions de kilomètres.

Leur calcul était quand même assez exact, à environ 1 % de la réalité. C’était la première fois qu'ils réussis‐ saient à obtenir la taille du système, indique Nicolas Co‐ wan. C’est à ce moment qu’on a réalisé l’immensité du Soleil et des planètes comme Jupiter.

agricole récemment retraité de l’université, explique que les fermes qui ont adopté la litière profonde inoculée sont aujourd’hui très nombreuses dans l’archipel.

La croissance la plus ra‐ pide est désormais auprès des petits poulailler­s de basse-cour. Des solutions de micro-organismes sont d’ailleurs vendues dans les supermarch­és, raconte-t-il, ajoutant que cela permet de maîtriser les odeurs, mais aussi de combattre la pré‐ sence des mouches.

Même si l’usage de microorgan­ismes est relativeme­nt récent chez lui, Alexandre Ca‐ ron se réjouit déjà des résul‐ tats.

On est des producteur­s de porc, alors on est recon‐ nus, malheureus­ement, comme des producteur­s qui dérangent un peu à cause des odeurs, admet-il.

Réussir à diminuer les odeurs, dit-il, c'est déjà un grand gain pour la cohabita‐ tion entre nous et nos voi‐ sins.

Des sols plus fertiles

Au-delà des odeurs, cette nouvelle façon de faire pro‐ cure d’autres avantages, car ajouter des micro-orga‐ nismes indigènes aux sols cultivés contribue à en amé‐ liorer la fertilité, selon diffé‐ rentes études menées un peu partout dans le monde.

Mais qu’en est-il ici? Pour y voir plus clair, Félix Gobeil a lancé cet automne un projet de recherche, en partenaria­t avec le ministère de l'Agricul‐ ture, des Pêcheries et de l'Ali‐ mentation du Québec (MA‐ PAQ), l’Institut de recherche et de développem­ent en agroenviro­nnement (IRDA) et l’Université Laval.

Parmi ses objectifs : com‐ prendre la dynamique de l’azote dans des litières ino‐ culées de micro-organismes et mesurer les émissions de gaz à effet de serre. En effet, ces êtres microscopi­ques au‐ raient aussi le potentiel de réduire les émissions pol‐ luantes.

Ramener de la vie micro‐ bienne dans les champs ai‐ derait donc à réduire à la fois la facture d’engrais des agri‐ culteurs et leur empreinte carbone.

Beaucoup de sols au Qué‐ bec sont très riches en phos‐ phore qui est pris dans la matrice du sol, dans les ar‐ giles. Et beaucoup de bacté‐ ries ont la capacité de solubi‐ liser ce phosphore pour le rendre disponible. C'est vrai‐ ment un travail d'équipe entre les plantes et les microorgan­ismes.

Félix Gobeil, agronome Au détour, cette méthode d’agricultur­e plus naturelle pourrait redonner de l’auto‐ nomie aux agriculteu­rs, ce qui était exactement le but initial de son inventeur, Cho Hankyu.

Ce que j'aime le plus làdedans, c'est que c'est fait maison, insiste Alexandre Ca‐ ron. C'est fait pour mon en‐ treprise, adapté à ma réalité locale. Je suis allé chercher des micro-organismes qui poussent dans ma cour, qua‐ siment. Ça n’a pas été fait par une multinatio­nale. J'ai fait ça moi-même. C'est simple et ça ne coûte à peu près rien. C'est ça qui m'a attiré!

Le reportage de Cathe‐ rine Mercier et de Gene‐ viève Brault à ce sujet sera présenté à l'émission La se‐ maine verte samedi à 17 h (18 h 30 HA) sur ICI Télé.

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