Radio-Canada Info

Rencontre avec deux Canadiens qui ont frôlé la mort dans le séisme à Taïwan

- Philippe Leblanc

Lélia Lemay, originaire de Longueuil, et son copain Brandon Iwanyshyn, d’Ed‐ monton, étaient en train de faire de la randonnée dans les gorges de Taroko, dans l’est de l’île, quand la terre a tremblé.

Ça devait pourtant être une semaine de vacances magique pour le jeune couple qui réside à Dalian, en Chine. Les deux travaillen­t dans une école internatio‐ nale.

La gorge de Taroko se voulait le décor parfait pour célébrer le 34e anniversai­re de Lélia.

C’était une journée par‐ faite. On sait qu’il y a beau‐ coup d’autobus de touristes qui arrivent vers 8 h là-bas, donc nous, on a commencé notre randonnée à 7 h 15. La gorge était turquoise, le ciel bleu, se rappelle Lélia Lemay, en entrevue à Radio-Canada.

Lélia et Brandon étaient seuls dans une clairière quand, soudaineme­nt, à 7 h 58 mercredi de la semaine dernière, la terre a tremblé, ce qui a provoqué des glisse‐ ments de terrain partout au‐ tour d’eux.

On s’est fait attaquer par des roches, raconte Lélia. Tout était brun, on ne pou‐ vait rien voir. Avec l'impact des roches, je me suis ramas‐ sée à terre. J'ai essayé de pro‐ téger ma tête. J'ai essayé de me relever, mais la pression était vraiment très forte de tout ce qui tombait.

Je me suis juste dit : "Voilà, c'est le 3 avril. Demain, je n'aurai pas 34 ans. Ça se termine maintenant."

Lélia Lemay

Sous le choc, ils ont tout de même réussi à courir pour aller se réfugier aux abords d’une petite centrale électrique située tout près.

Nous ne nous souvenons pas vraiment de cette partielà. Mais la seule chose que nous pouvons vraiment sup‐ poser, c'est que, oui, ces ins‐ tincts de survie se sont mani‐ festés et nous avons sprinté vers cette couverture, relate Brandon.

Je me souviens de l’abri en béton, mais il était fermé à clé, donc on ne pouvait pas y entrer, ajoute-t-il. La dernière chose dont je me souviens, c'est que nous étions à quatre pattes et que nous es‐

sayions de nous protéger. Nous nous sommes cachés derrière ce petit mur.

Tous deux étaient grave‐ ment blessés.

Lélia a eu des vertèbres fracturées et de nombreuses lésions. Brandon a subi une fracture ouverte du crâne et une autre à un pied.

À 15 h 30 cet après-midilà, on s'est dit : "Il nous reste à peu près deux heures de clarté." On a marché pendant 45 minutes. On savait que, les deux, on avait des bles‐ sures, mais on s'est dit : "Estce qu'on peut marcher? Oui. Alors, faisons-le."

Lélia Lemay

Moi, je ne voulais vrai‐ ment pas passer la nuit-là. Brandon, il n’avait pas vu la coupure sur sa tête. Lui, il me disait : "I'm OK, I'm fine." ("Ça va, je vais bien.") Mais moi, j'avais vu sa coupure, je sa‐ vais que ce n'était pas "fine". Je ne voulais pas qu'on passe la nuit-là, insiste Lélia.

Poussés par l’instinct de survie et l’adrénaline, ils ont donné leur position à leurs proches avant de perdre la réception cellulaire. Presque sans eau ni nourriture, ils ont réussi à se rendre au point de départ du sentier avant de pouvoir être évacués plus tard en soirée avec d’autres randonneur­s.

Brandon avait enregistré toutes les données de leur randonnée depuis leur dé‐ part. C’est ce qui a été un des éléments les plus importants permettant leur sauvetage et leur navigation pour retrou‐ ver le point de départ du sen‐ tier.

Nous avions remarqué que les roches ne débou‐ laient pas dans la rivière, souligne Brandon. Nous avons donc pensé qu’utiliser la rivière serait notre meilleur choix pour nous rendre mal‐ gré les nombreuses répliques sismique.

Nous sommes finalement arrivés à cet endroit où il y a des abris, où ils vendent de la nourriture et des souvenirs, poursuit-il. Nous avons trouvé là les 10 autres survi‐ vants. Ils y étaient tous proté‐ gés. Et ils ont dit qu’aucune pierre n’était tombée dans cette zone. Voir tout ce monde en sécurité, c'était comme le matin de Noël! Brandon Iwanyshyn Le groupe de 12 randon‐ neurs a été transporté dans un hôpital de Hualien.

Le couple devra y demeu‐ rer pour encore au moins 10 jours afin de se remettre des chirurgies. Lélia porte un col‐ let cervical et Brandon a le crâne rasé depuis son opéra‐ tion à la tête.

Chaque réplique - plus de 700 ont été enregistré­es de‐ puis une semaine - sème la panique.

Pour nous, dans la gorge de Taroko, chaque réplique signifiait qu’il fallait faire at‐ tention, car des roches tom‐ baient, dit Lélia. Je pense que ce sentiment d'être non pas en panique, mais en alerte supplément­aire, il est difficile de s'en défaire.

Lors des premières grosses répliques, quand nous étions à l’hôpital, je suis presque sûre d'avoir fait une crise de panique. Je me disais que le plafond nous tombait dessus. C’est un sentiment associé à l'endroit où nous étions, je suppose. Chaque fois qu'il y a une plus grosse réplique, il y a une infirmière qui frappe à notre porte et qui demande si on va bien, confie-t-elle.

Lélia et Brandon ex‐ priment leur gratitude. Im‐ possible d’oublier, entre autres, cette femme pleine de générosité, Rovina, qu’ils ont rencontrée à l’hôpital.

Elle a juste vu que j'étais en douleur. Elle m'a pris la main et elle me flattait les cheveux, précise Lélia. Elle a appris que c'était ma fête, puis elle est revenue avec un gâteau et une carte de fête. C'était juste incroyable, la bonté des gens, des incon‐ nus.

Nous avons été complète‐ ment submergés par l'amour et le soutien de nos amis, de nos familles, de nos col‐ lègues de travail, de tous ceux qui font partie de la communauté ici, ajoute Bran‐ don.

Le couple se dit aussi im‐ pressionné par l’aide fournie rapidement et constammen­t par le consulat canadien de Taipei. Un représenta­nt est allé les visiter presque chaque jour à l’hôpital.

Le programme des pro‐ chains jours malgré la dou‐ leur constante se résume en un mot : repos.

On y va par petits objec‐ tifs. Être capables de mar‐ cher au bout du corridor. Au‐ jourd'hui, j’ai pris une douche avec l'aide des infirmière­s. Lundi, on a été capables de regarder un film. Des petites choses comme ça. Je pense que, chaque jour, on se sent vraiment mieux, dit Lélia.

À lire et à voir :

Taïwan a retrouvé le der‐ nier Canadien qui manquait à l’appel à la suite du séisme VIDÉO - Des images du séisme qui a frappé l'île de Taïwan VIDÉO - Entrevue avec un sismologue

dons, c'est de prendre notre place légitime au sein de la communauté des Nations.

Riyad Mansour, ambassa‐ deur palestinie­n à l'ONU

Interrogé sur l'existence d'un projet de résolution en ce sens, l'ambassadeu­r algé‐ rien Amar Bendjama a ré‐ pondu : pas encore, mais bientôt. En cas de veto amé‐ ricain, ce ne serait pas la pre‐ mière fois qu'une demande d'adhésion à l'ONU serait bloquée au Conseil de sécu‐ rité.

Pendant la Guerre froide, les États-Unis et l'Union so‐ viétique avaient plusieurs fois bloqué l'entrée de pays alliés de l'autre bloc. Le der‐ nier veto date de 1976. Les

Américains avaient alors blo‐ qué l'entrée du Vietnam.

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