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Daniel Auteuil : du grand écran à la chanson

- Kathleen Lavoie

Icône du cinéma français révélé par la comédie et consacré par le drame, Da‐ niel Auteuil a, à l’aube de la soixante-dizaine, décidé de laisser libre cours à ses am‐ bitions musicales. De là sont nés un premier album, en

Si vous m’aviez connu, 2021, puis un second, Si tu as peur, n’aie pas peur (de l’amour), en 2023.

C’est donc l’auteur-compositeu­rinterprèt­e - et non l’acteur qui offre présenteme­nt une première série de spec‐ tacles au Québec.

Après des décennies à éblouir les cinéphiles au grand écran, Daniel Auteuil a eu envie de raconter des his‐ toires sous une autre forme. Né de parents chanteurs ly‐ riques, ce fils d’Avignon trempe dans la musique de‐ puis sa tendre enfance.

J’ai fait sûrement acteur pour ne pas faire comme eux. En même temps, je n’avais pas les capacités vo‐ cales d’un chanteur d’opéra… a laissé entendre celui qui, après un arrêt au Grand Théâtre de Québec jeudi, visi‐ tera Le Patriote de SainteAgat­he samedi, le Théâtre Outremont, à Montréal, les mardi 30 avril et mercredi 1er mai, ainsi que le Théâtre de la Ville de Longueuil, le jeudi 2 mai.

Envieux des musiciens dont il trouve l’art plus concret que le jeu, Daniel Au‐ teuil a toujours voulu se mettre à la compositio­n. C’est l’apprentiss­age de la guitare, qui lui a fourni les outils né‐ cessaires à la réalisatio­n de son projet, puisé aux sources de la chanson française.

Chez nous, il y avait des types comme Léo Ferré, Brassens, comme Brel, comme Béart. Et chez vous, il y avait Félix Leclerc. Il y avait une passerelle. Toute mon enfance, mon adolescenc­e et ma vie d’adulte et d’homme plus vieux, ç’a été nourri par ces textes et ces musiques. Ces émotions que j’ai ressen‐ ties en écoutant ces textes et ces musiques, j’ai eu envie de faire pareil, explique-t-il, en entrevue au Téléjourna­l Qué‐ bec.

En cours de route, Daniel Auteuil s’est allié un arran‐ geur de grand talent en la personne du chanteur de Louise Attaque, Gaëtan Rous‐ sel. Rapidement, des chan‐ sons parfois inspirées de sa propre vie ont vu le jour.

Il y a une chanson qui ra‐ conte l’histoire d'un jeune homme qui quitte sa famille. [...] En fait, c’est l’émotion que j’ai ressentie quand j’ai quitté ma ville de province, Avignon, quand j'étais jeune homme, pour aller à Paris, et ma mère sur le quai de la gare qui me fait au revoir. [...] Mes chan‐ sons naissent d’émotions et de ces émotions, j’en fais des petits scénarios, de petits films. Je raconte des histoires comme ça.

Mais bien qu'il soit rompu à la scène, l’acteur plébiscité à Cannes a trouvé la transi‐ tion du jeu dramatique vers l’interpréta­tion musicale ar‐ due.

C’était très dur au début. Tout d’un coup, il n’y a rien à jouer. Il n’y a plus rien à jouer. Si tu te mets à surac‐ ter, ce que tu es en train de dire, ça devient inaudible. Il faut rien faire, mais rien faire, ça n’existe pas non plus. Il faut être soi-même le plus possible.

Daniel Auteuil, acteur et auteur-compositeu­r-inter‐ prète

Et il y a la musique aussi. Il y a d’excellents musiciens. Les mélodies que j’ai compo‐ sées ne sont pas trop mau‐ vaises. Et puis, les arrange‐ ments de Gaëtan Roussel sont très forts. Et donc, la musique est un lien qui nous porte. Il n’y a pas besoin d’en faire plus. Il faut de l’énergie, donner le sentiment qu’on est bien là avec vous. C’est une alchimie. C’est génial.

C’est génial à vivre, a-t-il ré‐ pété, le regard vif.

C’est parce qu’il a luimême signé ses textes et ses musiques que l’acteur dou‐ blement césarisé, aujourd’hui âgé de 74 ans, s’est senti jus‐ tifié de monter sur scène pour les défendre.

Si j’avais été simplement interprète, je pense que je n’aurais pas fait le pas de monter sur scène. C’est le fait que j’écrive mes chansons et mes musiques… Mon ego m’a poussé à venir sur une scène, il y a trois ans. Ce que je viens faire ici, c’est vous rendre ce que vous m’avez donné, affirme-t-il, ajoutant qu’il ne se présente pas aux

Québécois en conquistad­or ou en conquérant. Je viens en ami.

Du Québec, il a le souve‐ nir d’une première visite au plus beau de l'été. En compa‐ raison, le présent passage, au cours duquel il a vécu quatre saisons en quelques jours, pâlit quelque peu. Mais qu’à cela ne tienne. Daniel Auteuil est déterminé à profiter au maximum d’un rare séjour chez nous.

J’ai une peur bleue de l'avion. Je souffre le martyre en avion. Alors pour moi, c’est un gros truc d’être là, quand même. Ça, plus la voi‐ ture de Montréal, sous la neige… a laissé entendre en riant celui qu’on connaît no‐ tamment pour ses rôles dans

Les Sous-doués, Jean de Flo‐ rette. Manon des sources et La fille sur le pont.

En famille

Chez nous, l’acteur, sa conjointe et leur fils Zachary, aujourd’hui de 14 ans, en‐ tendent bien profiter de la nature.

On est allés pêcher. [Mon fils] est pêcheur. Il adore pê‐ cher. Il a pêché dans le canal de Lachine. Il a sorti des gros machins comme ça! [...] Après ça, il y a les musées. C’est basique pour essayer de ne pas rater des trucs. Mais moi, ce que j'aime, c’est marcher et me perdre. Je suis mes camarades, j’entre dans les musées, c’est bien, mais… une ville, ça se découvre en marchant, note-t-il, révélant avoir fait 18 000 pas par jour depuis son arrivée au Qué‐ bec.

Faut-il s’en étonner? Da‐ niel Auteuil possède une énergie inépuisabl­e. Un pro‐ jet n’attend pas l’autre. Il suf‐ fit de visiter sa généreuse fil‐ mographie pour en prendre la pleine mesure.

Ça va faire trois ans que je suis sur scène. J’ai fait plus de 120 concerts. Je suis hyperac‐ tif. Quand je fais du cinéma comme acteur, je peux écrire des chansons, parce que ça ne me prend pas la tête, dans la journée. Quand je fais de la mise en scène, je ne peux pas. Mais quand je fais que l’acteur, je peux écrire, indique celui qui jongle habi‐ lement entre ses multiples

occupation­s.

Festival de Cannes

Et il n’y a pas de ralentis‐ sement en vue! Outre l’ac‐ tuelle tournée de spectacles, Daniel Auteuil participer­a au prochain Festival de Cannes, où sa dernière réalisatio­n, Le Fil, sera en sélection offi‐ cielle. Une visibilité dont il se réjouit.

Presque autant qu'il se ré‐ jouit d’être sur scène et de proposer ses chansons à un public intéressé.

Ça, c’est du bonheur. De la joie! Dans le sens mys‐ tique, presque. Je vous at‐ tends!

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