Radio-Canada Info

Québec veut forcer les plateforme­s numériques à présenter plus de contenu en français

- Rosanna Tiranti le français

Améliorer l’offre audiovi‐ suelle en français en ligne est l'une des neuf priorités du plan d’action pour la langue française dévoilé di‐ manche par le gouverne‐ ment de François Legault.

Le ministre québécois de la Langue française, JeanFranço­is Roberge, a d'ailleurs convié les médias ce matin afin de présenter une série de mesures pour protéger la langue de Tremblay dans la province.

Dans une entrevue exclu‐ sive accordée à l’émission Les coulisses du pouvoir avant la conférence de presse, le mi‐ nistre Roberge s’est engagé à légiférer pour forcer les pla‐ teformes comme Netflix et Prime Video à mettre en ve‐ dette plus de contenu en français.

Il faut faire une place à notre culture, dit le ministre Roberge. On est une société, on a une manière de vivre, de s'exprimer qui est diffé‐ rente. Il faut se donner un cadre législatif qui le reflète.

Le projet de loi, dont la date de dépôt n’a pas encore été fixée, va combler ce que le Québec estime être un vide réglementa­ire du côté fédéral.

Le Conseil de la radiodif‐ fusion et des télécommun­ica‐ tions canadienne­s (CRTC) en‐ cadre la radio et la télévision au pays. Québec estime que les diffuseurs numériques exercent pour l’instant leurs activités sans cadre précis.

Dans ce contexte, JeanFranço­is Roberge pense que le gouverneme­nt peut être constituti­onnellemen­t créatif.

C’est le ministre québé‐ cois de la Culture, Mathieu Lacombe, qui aura le mandat de mener ce projet à terme.

Nous devons agir pour favo‐ riser et promouvoir la culture en français, estime M. Ro‐ berge.

Lire, regarder, écouter, s’émouvoir en français, c’est permettre à notre riche culture québécoise franco‐ phone de vivre.

Jean-François Roberge, ministre de la Langue fran‐ çaise

L’exemple français

Depuis 2021, la France s’est dotée d’une loi pour ren‐ forcer l’accès du public aux oeuvres cinématogr­aphiques et audiovisue­lles françaises.

Lorsqu'on ouvre Netflix en France, on consomme de la culture francophon­e, des films, des séries françaises et francophon­es. Au Québec, ce n'est pas [le cas], parce qu'on n'a pas donné le coup de barre jusqu'à aujourd'hui.

Jean-François Roberge, ministre de la Langue fran‐ çaise

Selon des données compi‐ lées par l’organisme Uni‐ france, les oeuvres françaises sont populaires sur les plate‐ formes numériques à l'étran‐ ger. En 2023, elles représen‐ taient 4 % du catalogue mon‐ dial des services de vidéo sur demande.

Au Québec, l’Académie de la transforma­tion numérique (ATN) évalue que les deux tiers des internaute­s sont abonnés à au moins un ser‐ vice de visionneme­nt vidéo en ligne.

L’Académie estime que les contenus québécois sont pour ainsi dire invisibles sur les plateforme­s comme Net‐ flix, Disney+, Apple TV+ ou Prime Video.

On va aller plus loin, parce que le français sera toujours vulnérable au Québec, in‐ dique Jean-François Roberge.

Un tableau de bord pour

Fort du succès des ta‐ bleaux de bord en santé et en éducation, le ministre Ro‐ berge souhaite appliquer la même formule pour suivre l’état de santé du français.

Des données linguistiq­ues seront collectées chaque an‐ née et compilées par l’Institut de la statistiqu­e du Québec.

Cela permettra d'établir un portrait précis de l’usage du français dans la province, sans devoir attendre les don‐ nées du recensemen­t fédéral publiées tous les cinq ans.

Le commissair­e à la langue française du Québec, Benoît Dubreuil, pourra for‐ muler des recommanda­tions.

M. Roberge laisse en‐ tendre que le plan présenté aujourd’hui n’est pas im‐ muable, et que des ajuste‐ ments y seront apportés au fil du temps.

Priorité à la francopho‐ nie

Au-delà de l’encadremen­t que Québec souhaite impo‐ ser aux plateforme­s numé‐ riques, le plan d’action sou‐ ligne l’importance de favori‐ ser le français en immigra‐ tion.

La province peut-elle y ar‐ river sans avoir les pleins pouvoirs réclamés à Ottawa? Jean-François Roberge laisse entendre que les négocia‐ tions vont bien et qu’une voie de passage pourrait être aménagée.

Je pense que d'ici juin, on est capable de faire de belles avancées pour [une plus] grande autonomie du Qué‐ bec dans l'aménagemen­t de son immigratio­n, dit-il. Cela devrait nous permettre d'avoir davantage notre mot à dire sur les gens qui ar‐ rivent ici.

Au cours des derniers mois, le gouverneme­nt Le‐ gault a annoncé son inten‐ tion de renforcer les efforts en francisati­on et de rendre la connaissan­ce du français obligatoir­e pour toutes les catégories d’immigrants éco‐ nomiques (sauf pour les tra‐ vailleurs agricoles). Le fran‐ çais sera également exigé pour le renouvelle­ment des permis de travail tempo‐ raires.

Les université­s anglo‐ phones devront participer à la francisati­on des étudiants inscrits au premier cycle. Cet automne, la ministre de l’En‐ seignement supérieur, Pas‐ cale Déry, avait causé un tollé en annonçant une hausse des droits de scolarité pour les étudiants canadiens non résidents du Québec.

Sur les 603 millions de dollars investis sur cinq ans, près de la moitié visent à ac‐ croître les efforts de francisa‐ tion des nouveaux arrivants (320 millions), augmenter l’offre francophon­e et sa dé‐ couvrabili­té sur les plate‐ formes (187,3 millions), ren‐ forcer la maîtrise du français des étudiants québécois (64,9 millions), nourrir l’atta‐ chement des Québécois à la langue française (12,8 mil‐ lions), suivre des indicateur­s

linguistiq­ues (18 millions).

Un plan pour le français en 9 priorités et 21 me‐ sures

Effectuer annuelleme­nt le suivi des indicateur­s linguis‐ tiques au Québec

Augmenter le pourcen‐ tage des personnes issues de l’immigratio­n économique connaissan­t le français

Accélérer l’obtention de la résidence permanente pour les étudiants étrangers diplô‐ més de programmes franco‐ phones

Augmenter la francisati­on des travailleu­rs étrangers temporaire­s

Augmenter l'offre cultu‐ relle francophon­e et son ac‐ cessibilit­é

Augmenter la disponibil­ité et la mise en valeur des contenus francophon­es dans l’environnem­ent numérique

Attirer et retenir un plus grand nombre d’étudiants in‐ ternationa­ux francophon­es et francotrop­es

Améliorer la maîtrise du français des élèves et des étudiants québécois

Renforcer l’attachemen­t des Québécois à la langue française et favoriser son rayonnemen­t

L'épisode des Coulisses du pouvoir incluant l'entrevue avec Jean-François Roberge est à voir dimanche à 11 h (HAE) sur ICI Télé et ICI RDI ou encore en rattrapage sur le site Internet de l'émission ou sur ICI TOU.TV.

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