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Le Cégep de l’Abitibi-Témiscamin­gue devance les frais de scolarité des étudiants étrangers

- Gabriel Poirier

Les étudiants internatio‐ naux inscrits au Cégep de l’Abitibi-Témiscamin­gue de‐ vront payer en novembre prochain la totalité de leurs frais de scolarité pour l’hiver 2025. Le Cégep, qui voulait imposer cette me‐ sure en mai, a reculé face à la grogne d’étudiants et d’enseignant­s.

Pour la session d’hiver 2025, nos anciens et nos nouveaux étudiants auront une somme à payer en no‐ vembre plutôt qu’en janvier, explique Sylvain Blais, le di‐ recteur général du Cégep. La communicat­ion sur le sujet a été claire et il n’y aura pas de changement, même s’il pour‐ rait y avoir d’autres pres‐ sions.

Du nombre d’environ 220, la poignée d’étudiants inter‐ nationaux inscrits au Cégep paie des frais de scolarité qui avoisinent les 10 000 $ par session. Contrairem­ent aux étudiants nés ici, qui n’en paient pas, ils devront main‐ tenant en assumer le total avant chaque session et non à la rentrée des classes.

Les étudiants internatio‐ naux doivent déjà verser une avance de 7000 $ au Cégep à partir du moment où ils sont admis dans un programme, ce qui survient généraleme­nt plusieurs mois avant le début des cours. Le changement les force maintenant à endosser l’ensemble de la facture.

On espère accueillir entre 80 et 90 nouveaux étudiants internatio­naux pour l’au‐ tomne 2024. Les communica‐ tions ont été très claires avec eux dès le début, à savoir que c’est le nouveau calen‐ drier qui sera en vigueur, complète M. Blais.

Affaires administra­tives

Le Cégep de l’Abitibi-Té‐ miscamingu­e justifie cette modificati­on pour des rai‐ sons administra­tives, notam‐ ment pour assurer de la pré‐ visibilité dans les projection­s étudiantes. M. Blais croit par exemple que la mesure pour‐ rait réduire l’absentéism­e à la rentrée.

C’est vraiment pour nous aider à prévoir le bon nombre de places en rési‐ dences, pour nous aider à les loger convenable­ment et pour nous aider à avoir le personnel nécessaire pour les accueillir, soutient le di‐ recteur général.

La mesure affecte, selon le Cégep, une soixantain­e d’étudiants, tandis que les autres profitent de la gratuité scolaire, notamment en vertu d’une entente entre la France et le Québec.

Satisfait du recul

Ce nouveau règlement re‐ çoit l’appui de l’Associatio­n générale des étudiants (AGE‐ CAT), qui s'opposait avant tout à son entrée en vigueur rapide, avant même la fin de la session d’hiver. Le syndicat des enseignant­s était lui aussi opposé au déploiemen­t précoce de l’initiative, mais ne se positionne pas encore sur la nouvelle politique.

Nous, notre but, c’était de donner un souffle aux étu‐ diants internatio­naux, dé‐ fend Benjamin Brassard, pré‐ sident de l’AGECAT. C’était im‐ portant que cette politique n’entre pas en vigueur immé‐ diatement, car les étudiants n’ont pas été assez informés.

C’était un enjeu très pré‐ occupant et stressant pour eux. Plusieurs d’entre eux croyaient qu’ils auraient la période estivale afin de pou‐ voir cumuler de l’argent, tra‐ vailler et payer leurs frais de scolarité de l’automne.

Anne Blondin, présidente du Syndicat des enseignant­es et des enseignant­s du Cégep de l’Abitibi-Témiscamin­gue

Le syndicat a notamment adopté des motions de sou‐ tien envers l’AGÉCAT lors d’une assemblée générale te‐ nue le 17 avril.

Je peux comprendre leur motivation de départ étant donné qu’ils ont rencontré certaines difficulté­s pour re‐ cevoir les paiements des étu‐ diants internatio­naux, réitère Mme Blondin. Par contre, je crois que le moment où la décision a été prise et annon‐ cée aux étudiants internatio‐ naux n'était pas le bon mo‐ ment.

Erreur de communica‐ tion

Sylvain Blais reconnaît que le Cégep a commis une erreur du point de vue des communicat­ions en tentant d’imposer le règlement cet hiver, en cours de session.

Nous avons communiqué l’informatio­n, mais pas avec toutes les nuances néces‐ saires et l’approche bien‐ veillante qui est habituelle‐ ment celle du Cégep. C’est vraiment par erreur, par mé‐ garde, déclare M. Blais.

Ce nouveau calendrier sera mis en oeuvre, mais on comprend bien le soubresaut que cela peut créer à des étudiants internatio­naux.

Sylvain Blais, directeur gé‐ néral du Cégep de l’Abitibi-Té‐ miscamingu­e

Le report du règlement si‐ gnifie que les étudiants de‐ vront assumer, en un laps de temps très court, leurs frais de scolarité totaux pour l’au‐ tomne 2024 et l’hiver 2025, soit entre les mois d’août et de novembre.

Le prochain paiement sera plus rapide. Ça va en‐ traîner quand même des dif‐ ficultés, prévient le directeur général. Nous sommes au courant, mais au moins le changement sera appliqué de façon plus harmonieus­e.

Outre les frais de scola‐ rité, les visas que détiennent les étudiants internatio­naux les empêchent de travailler plus de 20 heures par se‐ maine.

On est assez favorable, ajoute Benjamin Brassard, de l’AGECAT. Cette politique vise à les aider pour éviter qu’il y ait toujours des retards dans leurs paiements et que cela finisse par peser lourd sur leurs épaules, leur santé mentale et leur santé phy‐ sique.

Détresse étudiante

Pour l’AGECAT, les discus‐ sions sur les frais de scolarité relancent le débat sur le bien-être des étudiants. Le président Benjamin Brassard considère que les étudiants deviennent vulnérable­s dans un contexte de stress finan‐ cier.

Il y a toute la probléma‐ tique qui vient avec ça, comme les enjeux de santé mentale et de santé phy‐ sique. Il y a des étudiants qui enfreignen­t leur visa pour travailler entre 20 et 30 heures par semaine. C’est épouvantab­le d’observer cette détresse. C’est énormé‐ ment de pression pour les étudiants internatio­naux.

Enjeux qui outrepasse­nt les frontières de la région, M. Brassard renvoie la respon‐ sabilité aux autorités, qui ont, selon lui, un devoir d’ac‐ compagneme­nt et de trans‐ parence.

Quitte à répéter 30 fois l’informatio­n, au moins les étudiants auront l’informa‐ tion sur le montant qu'ils doivent payer par session et la date où ils doivent payer. Déjà là, ça peut alléger l’enjeu de la santé mentale et de la pression financière, car ils vont savoir ce qui les attend en venant au Cégep de l’Abi‐ tibi-Témiscamin­gue, achève-til.

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