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La fumée des feux de forêt est un enjeu de santé publique, selon des intervenan­ts

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Des intervenan­ts du Grand Nord demandent que des mesures législativ­es soient adoptées dans les trois ter‐ ritoires canadiens, afin de reconnaîtr­e que la fumée des feux de forêt pose un risque de santé publique.

En octobre 2023, la direc‐ trice de la santé publique des Territoire­s du Nord-Ouest, Kami Kandola, a dit que les effets sur la santé de la fu‐ mée des feux de 2023 pren‐ draient des années à être connus.

Pour Paul Josie, un ré‐ sident d’Old Crow, au Yukon, ces effets sont déjà visibles.

Cette fumée constante et épaisse a causé des pro‐ blèmes de respiratio­n, de la toux… Cet hiver, quand les gens ont eu des rhumes, la toux persistait pendant long‐ temps, dit celui qui a dû éva‐ cuer sa communauté en août 2023.

La chef néo-démocrate du Yukon, Kate White, a récem‐ ment soulevé cet enjeu à l’As‐ semblée législativ­e, et a parlé des effets néfastes de la fu‐ mée chez les pompiers fores‐ tiers.

Malgré les preuves acca‐ blantes qui établissen­t un lien entre l'exposition aux in‐ cendies de forêt et un risque accru de cancer, les pom‐ piers du Yukon sont exclus de la couverture présumée qui reconnaît le cancer comme une maladie profes‐ sionnelle, dit-elle.

Établir la toxicité de la fumée

Des saisons de feux de fo‐ rêt de plus en plus intenses poussent la recherche à dé‐ terminer les effets de la fu‐ mée sur la santé humaine.

Le médecin Christophe­r Carlsten est pneumologu­e et directeur du Laboratoir­e d’ex‐ position à la population de l'air de l’Université de la Co‐ lombie-Britanniqu­e et titu‐ laire de la Chaire de re‐ cherche du Canada sur les maladies pulmonaire­s pro‐ fessionnel­les et environne‐ mentales.

Il dit que la fumée des feux de forêt est encore sous-étudiée.

On aimerait en savoir da‐ vantage sur les effets aigus, les effets à court terme. Mais nous ne savons presque rien des effets à long terme de la fumée d'incendie, indique-til.

Les données existantes sur l’impact des particules de fumée sur les poumons pro‐ viennent d’études portant sur les gaz d’échappemen­t des voitures.

Plus ces particules pé‐ nètrent profondéme­nt dans les poumons, plus elles peuvent causer des effets né‐ fastes et c'est ce que nous a appris la pollution liée à la circulatio­n routière, ajoute Christophe­r Carlsten.

Les études portant sur les impacts des feux de forêt ont fait la démonstrat­ion qu’ils ne sont pas sans danger pour la santé humaine.

Une étude publiée dans le journal The Lancet en 2022 fait état d’un risque légère‐ ment plus élevé de cancer du poumon et de tumeur au cerveau chez un individu ex‐ posé à de la fumée prove‐ nant d’un feu de forêt à moins de 50 kilomètres de sa résidence.

Rester à la maison

Une chercheuse en santé publique des Territoire­s du Nord-Ouest, Leanne Goose, aimerait que les gouverne‐ ments adoptent la même ap‐ proche que durant la pandé‐ mie de COVID-19, et émettent des ordonnance­s de santé publique pour an‐ nuler des événements exté‐ rieurs.

On a connu des situations où la fumée a vraiment affec‐ tée les gens, dit-elle.

Elle dit que ces mesures permettrai­ent aux tra‐ vailleurs de rester à la mai‐ son quand les conditions sont potentiell­ement dange‐ reuses pour la santé.

Quelques événements ont été annulés aux T.N.-O. en 2023 en raison de la fumée.

Le médecin Carlsten n’est pas convaincu que ce soit la meilleure approche. Il dit que sans connaître véritablem­ent l’étendue du risque, c’est dif‐ ficile de trouver un équilibre entre les conséquenc­es éco‐ nomiques et les effets sur la santé mentale en demandant aux gens de rester à l’inté‐ rieur.

Alors même que c’est diffi‐ cile de voir des gens dehors dans de la fumée très dense, l’alternativ­e [de rester à l’inté‐ rieur] n’est pas sans consé‐ quence, ajoute-t-il.

La réalité est que la majo‐ rité des gens peuvent tolérer une exposition à des taux très élevés [de fumée] pour une courte période de temps.

Il estime que les gouver‐ nements devraient jouer un plus grand rôle dans la pré‐ vention, comme de fournir des purificate­urs d’air.

Les filtres à air sont aussi bons, sinon plus, que les mé‐ dicaments payés par le gou‐ vernement, dit-il. On paie pour des médicament­s, alors pourquoi pas pour des me‐ sures comme des filtres à air?, se demande-t-il.

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