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Des plaintes contre eVisitNB, le manque de services en français est dénoncé

- Marie-Emma Parenteau

Au Nouveau-Brunswick, le Commissari­at aux langues officielle­s (CLO) met en lu‐ mière des plaintes visant eVisitNB, une plateforme de consultati­on virtuelle pour soins médicaux. Après avoir fait une demande en français, le système aurait répondu aux utilisateu­rs qu’il ne comprenaie­nt pas leur demande, et ce, par un message en anglais.

Deux rapports d’enquête datés du mois de mars ont été rendus publics mercredi. Dans l’un d’eux, le CLO ex‐ plique avoir reçu sept plaintes entre le 29 octobre 2022 et le 5 février 2023, liées aux nombreuses diffi‐ cultés à recevoir des soins de santé en français par ce sys‐ tème.

La plateforme de consul‐ tation virtuelle eVisitNB uti‐ lise l’applicatio­n Maple et ap‐ partient à l’entreprise privée eVisitNB Inc. Le ministère de la Santé a conclu un contrat avec cette entreprise pour of‐ frir des services médicaux en ligne aux résidents du Nou‐ veau-Brunswick qui ont une

carte d’assurance-maladie.

Une réponse en anglais à une demande en français

Dans quatre des sept plaintes du premier rapport, les plaignants affirment avoir demandé un service en fran‐ çais. Au bout d’un certain moment, ce n’est pas les conseils d’un médecin qu’ils ont reçus, mais bien un mes‐ sage en anglais : Unfortuna‐ tely I’m not able to unders‐ tand your request well en‐ ough to provide treatment. (Malheureus­ement, je ne suis pas en mesure de com‐ prendre votre demande de manière suffisamme­nt adé‐ quate pour vous fournir un traitement.)

L’un des plaignants ayant reçu ce message demandait simplement un renouvelle‐ ment d’ordonnance et a énu‐ méré les médicament­s en question. On aurait fermé son dossier automatiqu­e‐ ment et celui-ci a dû faire une autre demande.

La langue choisie dans le profil de l’utilisateu­r de l'ap‐ plication pose aussi pro‐ blème. Lorsqu'un plaignant a sélectionn­é le français comme langue désirée, il a reçu ce message : Attention : la désélectio­n de l’anglais peut augmenter le temps d’attente. Êtes-vous certain?

Enfin, un autre plaignant allègue qu’on lui a suggéré qu’il serait préférable de ré‐ écrire le message en anglais.

Dans un deuxième rap‐ port rendu public par le CLO, un autre plaignant explique aussi ne pas avoir été en me‐ sure d’obtenir des services en français. À deux reprises lors de la même journée, il aurait reçu le message suivant : cannot understand what you wrote, sorry. (Je ne peux comprendre ce que vous avez écrit, désolé.)

Le plaignant a par la suite fait sa demande en anglais. Celle-ci a été acceptée presque immédiatem­ent, et j’ai pu échanger avec un infir‐ mier, mais en anglais seule‐ ment.

Des plaintes fondées, d’autres s’ajoutent

Le Commissari­at aux langues officielle­s (CLO) a conclu que ces plaintes sont fondées. Même si ce service est fourni par un intermé‐ diaire, le ministère de la Santé a manqué à son devoir en vertu de la Loi sur les langues officielle­s du Nou‐ veau-Brunswick de veiller à ce que les obligation­s qui lui soient imposées par cette loi soient respectées par son tiers.

Shirley MacLean, commis‐ saire aux langues officielle­s, évoque l’urgence d’agir. Le manque de services en fran‐ çais dans un domaine comme la santé peut avoir des conséquenc­es graves.

Ils n’ont même pas eu le service en français, mais, en plus, ils se faisaient dire ça en anglais!

Shirley MacLean, commis‐ saire aux langues officielle­s du N.-B.

Quand on parle de ques‐ tions de santé, il y a des gens qui n’ont pas accès à un ser‐ vice de santé, surtout à cause de la langue, et le choix de langue, c'est très important que cette situation s'améliore aussi tôt que possible, dit la commissair­e.

Ces deux rapports portent sur huit plaintes datant d’il y a plus d’un an. Aujourd’hui, le problème persiste, selon la commissair­e.

On continue même de re‐ cevoir des plaintes au‐ jourd’hui. C'est le même type de plaintes qu’on reçoit, ajoute Shirley MacLean.

Des mesures immé‐ diates recommandé­es

Pour son enquête, le CLO a communiqué avec le minis‐ tère de la Santé pour lui sou‐ mettre des questions afin de bien comprendre le fonction‐ nement d’eVisitNB, de l’ins‐ cription jusqu’au traitement, en passant par le temps d’at‐ tente et le fonctionne­ment du site web. Les deux rap‐ ports montrent les réponses du ministère à ces questions.

Le CLO souligne que les situations vécues par les plai‐ gnants n’ont pas été niées par le ministère de la Santé et que celui-ci reconnaît ses obligation­s en matière de langues officielle­s.

Ainsi, plusieurs recom‐ mandations émanent de ces deux rapports. Le CLO de‐ mande au ministère de la Santé qu’il prenne des me‐ sures immédiates pour s’as‐ surer que les utilisateu­rs de ce système reçoivent des ser‐ vices dans la langue officielle de leur choix et que le choix de la langue officielle n’en‐ traîne aucun délai dans la prestation des services par le tiers fournisseu­r, eVisitNB Inc.

Il recommande aussi que des changement­s soient ap‐ portés au site web et à l’ap‐ plication Maple pour qu’un utilisateu­r puisse continuer d’utiliser la langue officielle de son choix, peu importe l’étape où il se trouve dans le processus, et que la plate‐ forme dispose d’un person‐ nel adéquat pour respecter les obligation­s en vertu de la LLO.

Il faut avoir des services égaux tout le temps, à chaque étape et sans délai.

Shirley MacLean, commis‐ saire aux langues officielle­s du N.-B.

Dans le deuxième rap‐ port, le CLO affirme que des améliorati­ons ont été faites au système depuis le dépôt de la plainte en instance et qu’il encourage le ministère à continuer ses efforts en ce sens. Le CLO demande aussi au ministère de lui fournir un

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