Procès à New York : « Paie comptant », dit Trump dans un enregistrement soumis en cour
Les jurés ont entendu re‐ tentir en cour la voix de Donald Trump jeudi dans un enregistrement d'une conversation réalisé à son insu par son ancien avocat Michael Cohen : l'ex-pré‐ sident américain y semble conscient des démarches destinées à acheter le si‐ lence d'une maîtresse pré‐ sumée.
L'enregistrement, dont l'existence avait été révélée par CNN en décembre 2018, a capté une discussion qui semble concerner le verse‐ ment fait à Karen McDougal, une ancienne playmate qui affirme avoir entretenu une relation avec Donald Trump entre 2006 et 2007.
Le premier témoin appelé à la barre la semaine der‐ nière, l'ex-PDG du groupe de presse American Media Inc. (AMI), David Pecker, a ra‐ conté que son entreprise lui avait versé 150 000 $ US pour avoir les droits exclusifs sur son histoire dans le but d'enterrer un scandale qui aurait pu nuire à son ami Do‐ nald Trump.
Dans cette discussion qui date de septembre 2016, Mi‐ chael Cohen semble parler entre autres de la sociétéécran qu’il comptait ouvrir pour rembourser le groupe de presse AMI.
Je dois ouvrir une société en vue du transfert [vraisem‐ blablement d’argent] pour toutes ces informations au sujet de notre ami David, tu sais, je vais le faire tout de suite, dit-il. Et j'ai parlé à Al‐ len Weisselberg de la façon de mettre tout ça en place, enchaîne-t-il, se référant à l’ancien directeur financier de la Trump Organization.
Donald Trump semble luimême suggérer de payer 150 000 $.
Alors, qu'est-ce qu'on doit payer pour ça? 150?
Donald Trump, entendu dans un enregistrement pré‐ senté en cour
Oui. [...] Et c’est [pour] toutes les choses, répond Mi‐ chael Cohen. Au cours de son témoignage, David Pecker avait affirmé qu’il devait aussi lui rendre les documents liés à Karen McDougal au cas où il lui arriverait quelque chose.
Paie comptant, dit plus tard Donald Trump.
Non, non, non, je gère la situation, assure son ancien homme de confiance.
Le virement n'a ultime‐ ment pas eu lieu, a expliqué David Pecker lors de son té‐ moignage. Le magnat des médias a lui-même décidé de ne pas se faire rembourser, craignant de faire l'objet de poursuites pour violations à la loi électorale fédérale.
La transcription de cette conversation a été déposée en preuve lors du témoi‐ gnage d'un expert, Douglas Daus, qui a extrait les don‐ nées des cellulaires de Mi‐ chael Cohen. Les procureurs font alterner les comparu‐ tions des témoins qui ont joué un rôle dans cette af‐ faire et celles des témoins dont la présence sert à pré‐ senter des documents en preuve.
Même si les accusations de falsification de documents portées contre Donald Trump dans ce procès ne sont pas liées au versement fait à Karen McDougal, les procureurs allèguent que l'achat de son silence permet d'expliquer le « plan criminel » fomenté par l'accusé « pour corrompre l’élection de 2016 ».
Michael Cohen avait par ailleurs 39 745 contacts ins‐ crits dans un de ses télé‐ phones; 10 pages entières détaillaient des informations liées à Donald Trump, a indi‐ qué M. Daus.
Le témoin a en outre au‐ thentifié une photo montrant Michael Cohen à la MaisonBlanche le 8 février 2017. Les procureurs allèguent que c'est à cette date que Donald Trump a convenu de rem‐ bourser Michael Cohen pour le paiement que ce dernier a versé à Stormy Daniels.
Cette dernière, une an‐ cienne actrice de cinéma por‐ nographique dont le vrai nom est Stephanie Clifford, a reçu 130 000 $ en échange de son silence par le biais d'une société-écran créée par Michael Cohen. Celui-ci a purgé une peine de prison pour son rôle dans les paie‐ ments faits aux deux présu‐ mées maîtresses de Donald Trump.
La défense attaque l’in‐ tégrité de l’avocat de Stormy Daniels
Plus tôt en journée, les avocats de Donald Trump ont mis en doute l'éthique de l'avocat de Stormy Daniels, Keith Davidson, qui témoi‐ gnait pour une deuxième journée.
C'est lui qui, lors des né‐ gociations financières avec des alliés de M. Trump pen‐ dant la campagne électorale de 2016, a représenté Karen McDougal et Stormy Daniels.
Dans un contre-interroga‐ toire au ton hostile, les avo‐ cats de la défense lui ont no‐ tamment fait admettre qu'il avait dit à Michael Cohen que sa cliente perdrait son pou‐ voir de négociation s'il était défait.
Ils ont semblé sous-en‐ tendre que Keith Davidson se spécialisait dans l'extorsion de fonds visant des célébri‐ tés, ou du moins qu'il s'en approchait. Emil Bove lui a par exemple posé des ques‐ tions sur des ententes conclues entre ses clients avec l'acteur Charlie Sheen et avec le lutteur Hulk Hogan.
M. Davidson a reconnu avoir fait l'objet d'une en‐ quête pour déterminer s'il y avait eu extorsion dans l'af‐ faire visant Hulk Hogan, mais il a précisé qu'il n'y avait pas eu d'inculpation.
Lors de l'interrogatoire des procureurs, il a notam‐ ment détaillé les interactions qu'il a eues avec Michael Co‐ hen pour faire taire les ru‐ meurs lorsque le paiement reçu par Mme Clifford a com‐ mencé à filtrer dans les mé‐ dias.
Il a expliqué les dénéga‐ tions initiales de sa cliente, qui avait été contactée par le Wall Street Journal, qui, en janvier 2018, a fait état de l'entente de confidentialité conclue deux semaines avant l'élection de novembre 2016.
Je nie cette aventure parce qu'elle n'a jamais eu lieu, affirmait dans une dé‐ claration écrite Stormy Da‐ niels.
C'est en principe vrai si on lit ce démenti d'un point de vue extrêmement strict, a ré‐ pondu M. Davidson aux pro‐ cureurs, établissant une dis‐ tinction entre une relation qui se serait poursuivie dans le temps et l'unique relation sexuelle que soutient avoir eue sa cliente avec l'accusé.
Je ne pense pas que qui‐ conque ait prétendu qu'une interaction entre elle et M. Trump ait été de nature ro‐ mantique.
Keith Davidson, avocat de Stormy Daniels
Il ne s'agissait pas d'un pot-de-vin ni d'un paiement secret, a-t-il ajouté, préférant un terme juridique : Il s'agis‐ sait d'une contrepartie dans le cadre d'un règlement civil.
M. Davidson a aussi ra‐ conté l'état frénétique dans lequel Michael Cohen était après la publication de l'ar‐ ticle du Wall Street Journal.
Qu'avons-nous fait?
M. Davidson a par ailleurs précisé que le contrat qui contraignait Stormy Daniels au silence incluait une clause prévoyant des dommages d'un million de dollars pour chaque rupture du contrat.
Il a également indiqué
que l'entente de confidentia‐ lité désignait Stormy Daniels et Donald Trump par des pseudonymes, soit Peggy Pe‐ terson et David Dennison. Leurs vrais noms étaient spé‐ cifiés dans une entente paral‐ lèle, réservée à l'usage des avocats, a-t-il ajouté.
Les procureurs ont aussi montré un échange de textos entre M. Davidson et le ré‐ dacteur en chef de l'époque du tabloïd National Enquirer, Dylan Howard, qui l'a mis en contact avec Michael Cohen après le début des négocia‐ tions entourant Stormy Da‐ niels.
La semaine dernière, le premier témoin appelé à la barre par les procureurs, le grand patron de cette publi‐ cation, a expliqué comment il avait mis son entreprise au service de la campagne de Donald Trump, notamment en payant une autre présu‐ mée maîtresse de l'accusé, la playmate Karen McDougal, pour enterrer son histoire.
Qu'avons-nous fait? a écrit M. Davidson à M. Howard le soir de l'élection. Oh mon Dieu, lui a répondu ce der‐ nier.
On comprenait que [..] nos activités pouvaient, d'une certaine manière, avoir aidé la campagne présidentielle de Donald Trump.
Keith Davidson, avocat de Stormy Daniels
Lors de sa comparution, mardi dernier, M. Davidson a dit estimer que l'intérêt des alliés de M. Trump pour le té‐ moignage de Mme Clifford avait atteint un crescendo après la diffusion, quelques semaines avant l'élection de novembre 2016, d'un enre‐ gistrement sur lequel on en‐ tendait Donald Trump se vanter de pouvoir « attraper » les femmes par leur sexe en toute impunité.
À l'époque, la diffusion de l'enregistrement avait semblé menacer les perspectives électorales du candidat répu‐ blicain.
Toujours mardi, M. David‐ son a en outre expliqué les difficultés de sa cliente à se faire payer après la conclu‐ sion de l'entente, disant avoir cru que le camp Trump es‐ sayait d'étouffer l'affaire jus‐ qu'après l'élection.
Donald Trump a nié tant les allégations d'aventures extraconjugales que les chefs d'accusation de falsification de documents au centre du procès.
Michael Cohen, un des vilains de l'histoire
Fait à noter, les procu‐ reurs n'ont pas hésité à lais‐ ser M. Davidson, comme d'autres témoins avant lui, dresser un portrait peu flat‐ teur de Michael Cohen, té‐ moin attendu de ce procès, dans une vraisemblable ten‐ tative de couper l'herbe sous le pied de la défense.
Leur stratégie : faire valoir que M. Cohen correspond peut-être au portrait qu'en font certains témoins - un in‐ terlocuteur difficile et au lan‐ gage grossier qui se montre agressif par moments et qui inspire peu confiance - mais qu'il a agi sur les ordres de Donald Trump.
Leur approche consiste non pas à défendre l'intégrité de l'ancien avocat du politi‐ cien de 77 ans mais plutôt à amener certains des témoins à corroborer le témoignage qu'il devrait faire en cour.
Dès leur déclaration d'ou‐ verture, la semaine dernière, les avocats de Donald Trump ont cherché à saper la crédi‐ bilité de M. Cohen, décrit comme un menteur déjà sanctionné par la justice. Ils l'ont dépeint comme un homme en quête de ven‐ geance après avoir échoué à obtenir un poste dans l'admi‐ nistration Trump.
Interrogé par les procu‐ reurs, M. Davidson s'est rap‐ pelé une conversation télé‐ phonique, en décembre 2016, au cours de laquelle Michael Cohen lui aurait fait part de ses doléances au su‐ jet de Donald Trump.
Après tout ce que j'ai fait pour cet *** de gars-là, je ne peux pas croire que je n'irai pas à Washington. J'ai sauvé les fesses de ce type telle‐ ment souvent que tu ne peux même pas l'imaginer, a-t-il déclaré en citant M. Cohen. Cet *** de gars-là ne me rembourse même pas les 130 000 $.
Deuxième audience sur un outrage potentiel au tri‐ bunal
Pour la deuxième fois de‐ puis le début du procès, le juge a par ailleurs entendu les arguments des parties au sujet de violations alléguées de l'ordonnance restreignant ce que peut dire Donald Trump au sujet du procès.
Mardi, le juge l'a déjà re‐ connu coupable d'outrage au tribunal pour neuf des dix commentaires litigieux que les procureurs avaient sou‐ mis et lui a imposé une amende de 9000 $.
Les procureurs affirment qu'il a violé cette ordonnance à quatre nouvelles reprises entre le 22 et le 25 avril; trois commentaires concernaient des témoins potentiels et un autre était au sujet du jury.
Contrairement aux pro‐ pos pour lesquels Donald Trump a déjà été sanctionné, qui avaient été mis en ligne, les commentaires au centre de cette audience ont été for‐ mulés devant les caméras à la sortie du tribunal ou lors d'entrevues.
Ce jury a été sélectionné vraiment vite. 95 % démo‐ crates, s'est-il notamment plaint. Il a aussi qualifié de menteur condamné son an‐ cien avocat Michael Cohen.
En parlant du jury, M. Trump met en péril le dérou‐ lement du procès, a soutenu le procureur Chris Conroy.
Il a indiqué qu'il ne de‐ mandait pas que Donald
Trump soit sanctionné par une peine de prison s'il est de nouveau reconnu cou‐ pable d'outrage au tribunal.
L'avocat de M. Trump, Todd Blanche, a rejeté les af‐ firmations des procureurs, ajoutant que les déclarations de son client sur Michael Co‐ hen étaient des réponses à ses attaques personnelles.
Cohen a invité - et a presque défié - le président Trump à répondre à presque tout ce qu'il disait, a-t-il plaidé en fournissant des messages publiés sur X par ce témoin potentiel, qui ne s'est pas gêné pour insulter son ancien patron sur les ré‐ seaux sociaux.
Ce n'est pas un homme qui a besoin d'être protégé par une ordonnance de bâillon, a argué Me Blanche.
Le juge n'a pas encore rendu sa décision.
Avant le procès, le juge Merchan a interdit à l'accusé de s'en prendre publique‐ ment aux témoins, aux jurés et au personnel du tribunal, une restriction qu'il a ensuite étendue aux membres de sa propre famille et à celle du procureur du district de Man‐ hattan.
À l'issue de l'audience, Do‐ nald Trump a par ailleurs af‐ firmé faussement que l'or‐ donnance lui interdisait de témoigner.
Contacté par Espaces au‐ tochtones, le représentant de la France à l'ONU indique que des éléments de ré‐ ponse aux questions soule‐ vées par le Comité seront transmis dans les délais im‐ partis, soit d'ici le 26 juin.
rêté hier plus de 300 mani‐ festants propalestiniens qui occupaient un immeuble du campus de l'Université Co‐ lumbia. Selon la police de New York, au moins 282 des manifestants arrêtés n'avaient aucun lien avec le milieu universitaire.
De nombreuses autres in‐ terventions policières ont eu lieu dans des campus de Flo‐ ride, du Wisconsin, de la Ca‐ roline du Nord et de la Loui‐ siane.
L'apparition de campe‐ ments propalestiniens dans les campus universitaires des États-Unis a ravivé le débat déjà tendu sur la guerre que mène Israël dans la bande de Gaza depuis l'attaque du Ha‐ mas le 7 octobre dernier.
Un regain de tension qui perturbe la classe politique américaine à six mois des élections présidentielles, dans un pays qui compte le plus grand nombre de juifs dans le monde après Israël, ainsi que des millions d'Amé‐ ricains arabo-musulmans.
Ces images qui font le tour du monde ont aussi des impacts en Israël, accusé par plusieurs pays d'utiliser l'at‐ taque meurtrière du Hamas comme prétexte pour mener une campagne d'épuration ethnique, voire un génocide, dans la bande de Gaza. Des allégations que rejette en bloc l'État hébreu.
Selon le président israé‐ lien Isaac Herzog, c'est plutôt la haine et l'antisémitisme qui contaminent des campus américains.
Les campements se mul‐ tiplient au Canada
Au Canada, l’opposition à la guerre que mène Israël dans la bande de Gaza a aussi donné lieu à l'appari‐ tion de campements propa‐ lestiniens, notamment de‐ puis la semaine dernière sur les pelouses de l’Université
McGill à Montréal.
Un campement en sou‐ tien aux Palestiniens a aussi vu le jour au début de la se‐ maine sur les terrains de l'université UBC, à Vancouver et un autre a aussi été ins‐ tallé sur les pelouses de l'Université d'Ottawa.
Ce matin, on rapportait également l'apparition de tentes et de clôtures dans le campus de l'Université de To‐ ronto.