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Le fonctionne­ment de l’« antenne » de la cellule mieux compris

- Alain Labelle

Le rôle essentiel d’une pro‐ téine dans le fonctionne‐ ment de la cellule est mieux défini à la suite de travaux réalisés au labora‐ toire du Dr Frédéric Char‐ ron, de l’Institut de re‐ cherches cliniques de Mon‐ tréal (IRCM), et à l’Univer‐ sité de Californie à Merced, aux États-Unis.

Cette percée permet de mieux comprendre des dé‐ fauts cellulaire­s qui mènent au développem­ent de petits cervelets, ce qui peut causer notamment un retard global du développem­ent, des sé‐ quelles motrices, un déficit intellectu­el et des troubles du langage.

Comme une cellulaire antenne

Le corps humain possède des milliers de types de cel‐ lules, dont la plupart sont do‐ tées de structures de base qui se ressemblen­t, comme le noyau, qui contient l'ADN.

L’une de ces structures présentes dans la plupart des cellules est le cil pri‐ maire. On a longtemps consi‐ déré le cil comme un vestige de l’évolution [une structure anatomique qui a perdu ses fonctions originelle­s au cours de l'évolution], mais on s’est aperçu dans les 20 dernières années qu’il jouait un rôle es‐ sentiel pour la signalisat­ion cellulaire, explique le Dr Fré‐ déric Charron, de l’IRCM.

Le cil primaire est une protubéran­ce de la cellule qui ressemble à une an‐ tenne. Il agit aussi un peu comme une antenne puis‐ qu’il sert à détecter des si‐ gnaux présents dans l’envi‐ ronnement de la cellule, dont certains sont responsabl­es de stimuler la proliférat­ion cellulaire, indique le Dr Char‐ ron.

Notre travail montre qu'une protéine appelée NUMB est essentiell­e pour transmettr­e les signaux dé‐ tectés par l'antenne.

Frédéric Charron, direc‐ teur de l’Unité de recherche en biologie moléculair­e du développem­ent neuronal à l’IRCM

Lorsque l’antenne détecte un signal, celui-ci doit être transmis à la cellule pour avoir un effet. Ce qu'on a trouvé, c'est la façon par la‐ quelle le cil primaire est ca‐ pable de transmettr­e cer‐ tains signaux grâce à NUMB, ajoute le chercheur.

Le saviez-vous?

Outre les cils primaires, il existe plusieurs cils dans le corps humain :

les cils de la trachée et des bronches, qui font re‐ monter les sécrétions de mu‐ cus; les cellules ciliées, qui ta‐ pissent les ventricule­s céré‐ braux et permettent le mou‐ vement du liquide cérébros‐ pinal; les cils des trompes de Fallope, qui permettent le mouvement des ovocytes.

Quand la ligne est mau‐ vaise

Sans cette protéine, le si‐ gnal est détecté par le cil, mais son informatio­n n’est pas transmise au reste de la cellule, ce qui l'empêche d’avoir l’effet habituel. Le pro‐ blème [ne concerne pas] la réception, mais bien [...] la transmissi­on du signal, pré‐ cise le Dr Charron.

Dans les présents travaux, l’équipe du laboratoir­e du Dr Charron s’est intéressée à un signal en particulie­r, celui d’une protéine qui induit la proliférat­ion cellulaire.

Le signal de proliférat­ion, c'est ce qui fait qu'une cellule se multiplie. Il va enclencher le cycle cellulaire, qui permet à la cellule de répliquer son ADN pour ensuite se diviser en deux cellules filles qui se diviseront à leur tour.

Frédéric Charron, de l'IRCM

Ce processus mène à la multiplica­tion des cellules, et NUMB y tient un rôle essen‐ tiel.

Or, sans la transmissi­on du signal en raison de l’ab‐ sence de NUMB, la proliféra‐ tion de certaines cellules du cerveau ne se produit pas.

Dans les expérience­s me‐ nées sur des souris, lors‐ qu'on inactive le gène qui code pour la protéine NUMB, on assiste à une très forte di‐ minution de la capacité des cellules [des neurones] à se multiplier.

Frédéric Charron, de l'IRCM

Ce sont des défauts qui nuisent au développem­ent du cerveau et du système nerveux en menant à la for‐ mation de petits cervelets, un état appelé hypoplasie du cervelet, indique le scienti‐ fique.

Les chercheurs tenteront de mieux cerner le rôle de NUMB dans de prochains tra‐ vaux.

Malheureus­ement, pour l'instant, on ne connaît pas de molécules ou de drogues qui pourraient corriger l’ab‐ sence de la protéine.

Frédéric Charron, de l'IRCM

Ce qu'on aimerait mieux comprendre, c’est l'impact du mécanisme qu’on a décou‐ vert sur d’autres maladies du développem­ent du cerveau pour éventuelle­ment réussir à créer de nouvelles théra‐ pies, relève le Dr Charron.

Les deux auteures princi‐ pales de ces travaux publiés dans la revue Nature Com‐ munication­s (en anglais) sont les Dres Patricia Yam, de l’IRCM, et Xuecai Ge, de l’Uni‐ versité de Californie à Mer‐ ced, aux États-Unis.

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