Radio-Canada Info

Yves Desautels, l’inépuisabl­e monsieur circulatio­n, annonce sa retraite

- Charles Rioux

Après 47 années à RadioCanad­a, dont 26 à la circu‐ lation, Yves Desautels a an‐ noncé lundi qu’il prendra sa retraite le 30 mai pro‐ chain. « Il me reste trois se‐ maines avec vous, je vais m’ennuyer », a-t-il affirmé la voix pleine d’émotion au micro de Patrick Masbou‐ rian, à l’émission Tout un matin, sur ICI Première.

Yves Desautels a fait ses débuts officiels comme chro‐ niqueur à la circulatio­n à l’hi‐ ver 1998, en pleine crise du verglas, prenant ainsi la place de Roger Laroche, qu’il avait souvent remplacé et qui pre‐ nait sa retraite après une vingtaine d'années à ce poste. Avant d'entreprend­re ce mandat, M. Desautels avait d’abord été reporter dans l’Ouest canadien, de 1977 à 1985, puis à Montréal, de 1985 à 1998.

Il était d’ailleurs le premier journalist­e de Radio-Canada sur les lieux lors de la tuerie de Polytechni­que, le 6 dé‐ cembre 1989. Ça a adonné, un peu par hasard. C’était vers l’heure du souper, il n’y avait plus de reporters dans la salle de nouvelles, et l’af‐ fectateur m’a appelé chez nous parce qu’il savait que j’habitais à Outremont, pas loin de l’École polytechni­que, se souvient-il.

C’est comme ça que j’ai abouti sur le site, sans trop savoir ce qui se passait. Là, j’ai vu que c’était un drame plus important que je pen‐ sais. J’ai passé quasiment toute la nuit là, ça empirait

d’heure en heure.

Un quart de siècle dans le trafic

Dans sa seconde vie à Ra‐ dio-Canada, Yves Desautels est devenu la voix qui, de 5 h 35 à 17 h 58, ponctue les émissions d’ICI Première pour faire le point sur l'état de la circulatio­n dans le Grand Montréal. C’est un mé‐ tier demandant, qui néces‐ site beaucoup de patience, mais l’homme de radio af‐ firme avoir adoré son travail.

Lors d’une journée ty‐ pique, M. Desautels se lève vers 4 h du matin et se rend en studio afin de débuter la journée à 5 h 30 en compa‐ gnie de ses collègues de l’émission matinale, soit Tout un matin dans les dernières années. J’aime ça être là au tour de table, parce que c’est le seul moment où je vois tout le monde, et c’est un peu plus léger, explique-t-il.

Ensuite, il embarque dans sa voiture et circule dans le Grand Montréal, à la re‐ cherche des sites de conges‐ tion ou des accidents de la route, ce que tous les auto‐ mobilistes fuient comme la peste. C’est comme les chas‐ seurs de tornades, illustre-til. Mais j’essaie toujours d’être à l’envers des bouchons.

Dans son véhicule, Yves Desautels reçoit également les appels des auditeurs, qui se sont avérés de fidèles al‐ liés au fil des ans. Il y a des réguliers qui appellent presque tous les matins ou le soir, parce que c’est rendu dans leurs habitudes, t’en a d’autres qui appellent s’ils sont témoins d’un incident précis, explique-t-il. Une chance qu’ils sont là, ça met de la vie un peu dans les re‐ portages.

La circulatio­n à Mon‐ tréal, pire que jamais

En 26 ans de métier sur la route, Yves Desautels a été aux premières loges pour voir l’évolution de la circula‐ tion à Montréal, et il est d’avis que les dernières années ont été les pires. Ça s’est dété‐ rioré pas à peu près, c’est pire que pire, dit-il d’emblée.

Dans les irritants, il y a les fameux cônes oranges par‐ tout et les travaux de la Ville de Montréal. Il y a des fonc‐ tionnaires qui me disaient sous le couvert de l’anony‐ mat qu’il y avait certaineme­nt des manques de planifica‐ tion. Le pire, c’est le centrevill­e et le Plateau-Mont-Royal.

Il déplore aussi la conges‐ tion de plus en plus grande en provenance des banlieues et régions vers Montréal, ré‐ sultat entre autres du prix des maisons de plus en plus prohibitif­s en ville, selon lui. Il donne l’exemple de l’auto‐ route des Laurentide­s.

Quand j’ai commencé, ça bloquait à partir de Laval jus‐ qu’à la Métropolit­aine, ex‐ plique-t-il. Cinq ans plus tard, ça remontait jusqu’à la 640, Boisbriand, Sainte-Thérèse, tout ça. Aujourd’hui, c’est souvent à partir de Mirabel que ça bloque et, dans le pire des cas, à partir de Saint-Jé‐ rôme.

Un métier en voie de disparitio­n

Avec le départ imminent d’Yves Desautels, le métier de chroniqueu­r à la circula‐ tion pourrait être en voie de disparitio­n au Québec. Il ex‐ plique qu’il était l’un des der‐ niers à faire ce travail avec Denis Niquette, qui a pris sa retraite de Rythme FM en 2017.

Les stations privées ont coupé les patrouille­s, mais ils ont les infos quand même via les caméras de Transports Québec et les auditeurs, ex‐ plique-t-il. Reste à savoir si Radio-Canada va emboîter le pas et faire disparaîtr­e le poste de M. Desautels, mais les auditeurs pourront en‐ tendre sa voix rassurante jus‐ qu’au 30 mai.

Après quoi, l’homme ac‐ crochera son micro pour pro‐ fiter de la vie, passer du temps avec ses petits-en‐ fants, jouer au tennis et, sur‐ tout, dormir. Je pense que je vais essayer de récupérer, conclut-il.

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