Radio-Canada Info

Nouvelle offensive pour forcer la Cour suprême à traduire toutes ses décisions

- Rémi Authier

Insatisfai­t de l’inaction de la Cour suprême face à ses obligation­s en vertu de la Loi sur les langues offi‐ cielles (LLO), un organisme québécois a déposé une nouvelle plainte à ce sujet auprès du Commissair­e aux langues officielle­s (CLO), dont Radio-Canada a obtenu copie. Droits collec‐ tifs Québec est même prêt à poursuivre le plus haut tribunal au pays pour le forcer à respecter ses obli‐ gations.

Ce nouvel effort survient plus de trois ans après qu’une avocate de Montréal se soit plainte de l’absence de traduction dans les deux langues officielle­s, pour toutes les décisions de la Cour suprême rendues avant l’entrée en vigueur de la LLO en 1970 et disponible­s en ligne.

Le CLO lui avait alors donné raison en considéran­t que l’offre en ligne des déci‐ sions constitue une commu‐ nication au public faite par une institutio­n fédérale et devait donc être offerte en français et en anglais.

Malgré la décision du Commissair­e, la Cour su‐ prême n’a toujours pas tra‐ duit ses décisions, sous pré‐ texte qu'elle n'a pas les res‐ sources monétaires, hu‐ maines et de temps.

Devant cette absence de mesures du tribunal pour se conformer à la recommanda‐ tion du commissair­e, Droits collectifs Québec a décidé de déposer à son tour une plainte auprès du CLO. Cette nouvelle plainte se fonde sur les mêmes faits que la plainte de l’avocate de Mon‐ tréal.

Pourquoi alors déposer une seconde plainte à pro‐ pos d’une situation qui a déjà fait l’objet d’une décision et d’une recommanda­tion du

CLO? La réponse se trouve dans la Partie X de la LLO sur les recours judiciaire­s.

On ne peut pas pour‐ suivre une instance fédérale en vertu de la loi sur les langues officielle­s avant d'avoir entamé et complété un processus auprès du com‐ missaire aux langues offi‐ cielles, donc c'est ce qu'on fait.

Étienne-Alexis Boucher, directeur général de Droits collectifs Québec

L’organisme se dit prêt à recourir à cette partie de la LLO pour intenter une pour‐ suite en Cour fédérale afin de faire respecter les droits lin‐ guistiques. Son directeur gé‐ néral, Étienne-Alexis Bou‐ cher, souhaite ardemment que le plus haut tribunal au pays se soumette à ses obli‐ gations linguistiq­ues sans qu’un recours ne soit néces‐ saire.

Il note par ailleurs qu’un tel recours pourrait potentiel‐ lement se retrouver devant la Cour suprême qui serait alors juge et partie. ÉtienneAle­xis Boucher maintient que la Cour doit se conformer aux règles et il rappelle que ce tribunal a forcé le Mani‐ toba à traduire l’ensemble de ses lois en français en 1985 afin de respecter sa loi constituti­onnelle.

Selon Droits collectifs Québec, la Cour suprême doit respecter la LLO qui a été jugée quasi-constituti­on‐ nelle.

La Cour suprême doit res‐ pecter l’État de droit.

Étienne-Alexis Boucher, directeur général de Droits collectifs Québec

La Cour suprême du Ca‐ nada a refusé de commenter ce dossier en notant qu’elle

pourrait faire l’objet d’un re‐ cours. Pour sa part, le CLO n’est pas en mesure d’accor‐ der une entrevue à ce sujet puisqu’une enquête est en cours.

Une initiative qui reçoit des appuis

Cette nouvelle tentative de pousser le plus haut tribu‐ nal au pays à traduire l’en‐ semble de ses décisions re‐ çoit un soutien de la part de juristes francophon­es.

Le président de la Fédéra‐ tion des associatio­ns de ju‐ ristes d’expression française de common law, Justin King‐ ston, souligne que l’objectif de la récente mise à jour de la LLO était justement de donner plus de recours aux justiciabl­es et plus de dents à cette loi.

Il ne ferme pas la porte à prendre part à un éventuel recours devant la Cour fédé‐ rale.

Je pense qu’on serait inté‐ ressés à devenir des interve‐ nants, mais ça serait quelque chose qu’on aurait besoin d’analyser avec un peu plus de temps.

Justin Kingston, président de la Fédération des associa‐ tions de juristes d’expression française de common law

L’avocat constituti­onna‐ liste fransaskoi­s Roger Le‐ page a défendu à maintes re‐ prises les droits de la mino‐ rité linguistiq­ue francophon­e hors-Québec.

Il note que dans l’état ac‐ tuel des choses, un avocat peut être forcé de faire tra‐ duire certaines décisions fon‐ damentales de la Cour su‐ prême rendues avant 1970 et qui sont encore invoquées devant les tribunaux. Il es‐ time que ces traduction­s se‐ raient utiles pour les avocats qui doivent consulter et re‐ courir à ces décisions.

Sans se prononcer sur la valeur légale des arguments que pourrait proposer Droits collectifs Québec, Roger Le‐ page estime que ce dossier ne doit pas être seulement considéré d’un point de vue juridique.

La solution politique, ce serait plutôt que le gouverne‐ ment canadien accorde un budget supplément­aire à la Cour suprême et exige qu’elle traduise toutes ses an‐ ciennes décisions.

Roger Lepage, avocat constituti­onnaliste

L’avocat fransaskoi­s es‐ time par ailleurs ne pas avoir de problème à ce que la Cour suprême se penche éventuel‐ lement sur cette question si un recours est déposé et porté en appel jusqu’à elle.

Il rappelle que le plus haut tribunal a dû interpréte­r la loi sur sa propre composi‐ tion lorsque le gouverne‐ ment de Stephen Harper a voulu nommer le juge Nadon à la Cour suprême. Cela a créé un précédent qui pour‐ rait s’appliquer à une éven‐ tuelle contestati­on judiciaire.

forêt de la Colombie-Britan‐ nique, appuie M. MacKinnon.

Au Yukon, un gros travail a été fait pour cartograph­ier le territoire et les endroits cruciaux pour les Autoch‐ tones. Nick Mauro a participé à cette cartograph­ie en colla‐ boration avec les commu‐ nautés.

Nous nous sommes as‐ suré de savoir où se trouvent les cabanes de chasse, les gîtes, les cimetières dans tout le Yukon, de sorte que lorsque ces grands incendies se produisent [les pompiers] peuvent aller les protéger, dit-il.

Pour les mêmes raisons, la BC Wildfire fait de plus en plus appel à des représen‐ tants culturels. Ils ont le pou‐ voir de parler au nom de la communauté et expriment leurs préoccupat­ions et leurs priorités, dit M. MacKinnon. Le programme a été lancé en 2018-2019 et est élargi cette année.

Cela nous permet de nous assurer que nous ne man‐ quons pas des éléments comme un site archéolo‐ gique sensible ou simple‐ ment des endroits du terri‐ toire qui ont une significat­ion particuliè­re [pour les Autoch‐ tones, NDLR], ajoute-t-il.

Dans cette même optique, les pompiers de Simpcw s'ac‐ tivent déjà à aller à la ren‐ contre des membres de la communauté. Nous organi‐ sons une journée portes ou‐ vertes pour montrer notre équipement, nous essayons d'impliquer les propriétai­res terriens, de les inciter à net‐ toyer leur cour, expose Ron Lampreau.

M. MacKinnon plaide pour un élargissem­ent de tous les programmes qui poussent à une meilleure collaborat­ion avec les Autochtone­s. J'ai vu de mes propres yeux, dans de multiples situations, que ces outils étaient utilisés de manière très efficace en 2023, dit-il.

Une solution préconisée par toutes les personnes in‐ terrogées est aussi la multi‐ plication des brûlages tradi‐ tionnels. Pendant longtemps, on a considéré que chaque incendie devait être sup‐ primé, éteint, mais ce n’est pas ce qu’on faisait avant la colonisati­on, explique Bran‐ don Hoffman, directeur des communicat­ions de la com‐ munauté de Williams Lake, au centre de la Colombie-Bri‐ tannique.

C’est justement ça qui a conduit - entre autres - à ces importants feux de forêt, ajoute-t-il.

Mais il indique que beau‐ coup de non-Autochtone­s ont encore de lourds a priori envers les feux dirigés, no‐ tamment par ignorance. Ils en arrivent à remettre en cause l’autorité de notre dé‐ partement des ressources naturelles, indique M. Hoff‐ man.

L'année dernière, le Ca‐ nada a connu la pire saison de feux de forêt jamais enre‐ gistrée. Et selon les estima‐ tions du gouverneme­nt fédé‐ ral, nous risquons d’être confrontés à nouveau à une saison catastroph­ique en matière de feux de forêt.

Dans ses perspectiv­es météorolog­iques, Environne‐ ment et Changement clima‐ tique Canada s'attend à des conditions de sécheresse [...] dans les régions à risque élevé en mai, y compris le nord des Prairies et la Colom‐ bie-Britanniqu­e.

Les risques resteront aussi élevés pour le reste de la saison, car l'agence fédé‐ rale prévoit que les tempéra‐ tures demeureron­t supé‐ rieures à la normale au ni‐ veau national pour le prin‐ temps et l’été.

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