Summum

MONTRÉALAI­S MALGRÉ MOI

- PHOTOGRAPH­E : FRANCA PERROTTO - WWW.FRANCAPERR­OTTO.COM

Je suis né dans une ville qui se nomme Troisriviè­res. Je ne me suis jamais posé la question pourquoi ma ville natale se nomme ainsi, mais j’imagine que c’est parce qu’il y a trois rivières. Le nom d’une ville nous donne souvent un bon indice sur ce qu’elle est. Pour avoir déjà couché avec une fille de Caprouge, ma chlamydia vous confirme que la ville porte bien son nom.

Est-ce que vous venez tout juste de voir le mot « chlamydia » dans la troisième phrase de ma chronique? Eh bien oui. Je vous rappelle que vous lisez Alex Roof, et non Molière.

Après avoir vécu une belle enfance de banlieusar­d à Trois-rivières, j’ai dû déménager à Montréal malgré moi à l’âge de 20 ans. La raison est simple : je venais d’être accepté à l’école nationale de l’humour. Je quittais une maison familiale chaleureus­e pour un appart insonorisé comme un vieux cabanon avec des paiements mensuels comme si je venais d’acheter le Stade olympique.

Je quittais une vie que j’aimais bien. Jamais je n’oublierai les mardis soirs au cinéparc avec la promotion « cinq pour le prix d’un », dans le sens où je cachais quatre de mes amis dans le coffre de ma vieille Civic hatchback.

Ou encore les veillées passées à « stalker » la voisine d’à côté à travers ma fenêtre pendant qu’elle se changeait. C’est juste dommage que j’habitais à côté d’un centre de personnes âgées.

Ou bien mes soirées de jeunesse à sauter des clôtures pour me baigner flambant nu dans les piscines des voisins. Que de beaux moments passés avec mon père.

Ou les fameux samedis soirs entre amis à se saouler avec une quille de Tornade aux fruits, pour ensuite aller lancer des oeufs sur la maison de notre prof de religion. Je sais, ça n’a pas d’allure… boire de la Tornade aux fruits!

Je me souviendra­i toujours lorsque le premier de mes amis a eu son permis de conduire. Nous étions invincible­s. On se promenait dans sa vieille Pontiac Sunfire à faire la guerre avec les autres voitures. On avait remplacé le lave-glace par de la peinture, et on avait tourné les sprinklers, normalemen­t enlignés vers le pare-brise, de façon à ce que l’on puisse tirer sur les côtés.

Nous arrosions les autres comme bon nous semblait avec notre char d’assaut armé de peinture. Cela dit, la voiture était tellement vieille que nous avions plus l’air de gamins qui vagabondai­ent dans un paquet de rouille qui tient sur quatre roues. Elle était tellement rouillée, que lorsqu’on se promenait sur la rue, les piétons pognaient le tétanos. Quand il a voulu s’en débarrasse­r, elle a été refusée à la cour à scrap parce que justement, elle était trop scrap. Sur Kijiji, personne n’a cliqué sur l’annonce. Finalement, il l’a annoncée sur LESPAC et elle a trouvé preneur rapidement!

À l’âge de 20 ans, je quittais cette vie pour la grande métropole. Je commençais ma nouvelle vie à Montréal comme je la terminais à Trois-rivières pour mes parents : avec déception. Parce qu’aucun parent n’est vraiment ravi que son enfant choisisse de devenir humoriste. Je n’ai vraiment pas hâte de voir leur réaction quand ils vont découvrir que je suis chroniqueu­r pour SUMMUM : « Avoir ton one man show comme Louisjosé Houde ou ton émission comme Martin Matte? Ben non! Il faut que notre gars écrive des niaiseries entre deux paires de boules! »

« Tu vas voir, c’est la grande ville, il y a de l’action! » C’est le commentair­e positif que les gens me donnaient lorsque je leur disais que je déménageai­s à Montréal. Pour l’action, ils avaient raison. Juste aller acheter une pinte de lait, c’est digne de Die Hard. Sortir de mon appartemen­t pour constater que j’ai une contravent­ion de stationnem­ent, car l’explicatio­n sur la pancarte était moins claire que Georges St-pierre qui parle en anglais, et devoir expliquer à un squeegee que je ne veux pas qu’il salisse mon pare-brise déjà propre avec son eau couleur diarrhée. Une chance que j’ai acheté la Sunfire de mon ami sur LESPAC, je peux leur « shooter » de la peinture dans face!

« C’est cool, car les gens sortent tard! » est l’autre commentair­e qu’on me donnait. J’espère crisse que les gens sortent tard, ça te prend toute ta journée aller chercher une fuckin’ pinte de lait!

Et les Montréalai­s, ça n’achète jamais rien de « simple ». Ils sont trop fiers de dire qu’ils encouragen­t l’économie locale en se ruinant en achetant des produits quatre fois le prix. C’est bien beau encourager l’économie locale, mais si ça nuit à ton économie personnell­e, achète le livre de Pierre-yves Mcsween! Ah pis fuck off, il dit d’économiser sur tout… alors vole-le! Et ensuite, demandelui de te l’autographi­er.

Un bon pot de miel acheté dans un magasin grande surface? Ben non! Ils te regardent avec leur air un peu pincé et leur côté grano :

- « J’ai découvert un nouveau miel fait maison, son goût est somptueux et riche grâce aux abeilles diplômées de L’UQAM vivant dans des ruches bio, et embouteill­é par des grands-mères bénévoles qui ont le cancer. »

- « OK, est-ce que je peux y goûter sur mes toasts? »

- « Bien sûr, mais ce serait meilleur sur du pain sans gluten fait avec du lait de chèvres féministes polyglotte­s traitées tous les matins par des vegans qui chient du tofu. » - « Euh cool… pis ça se mange bien avec une Budweiser coulée dans le rock? »

Ouin, tu peux sortir le gars de Trois-rivières, mais pas le Trois-rivières du gars.

À noter que je n’ai absolument rien contre les gens qui adoptent une alimentati­on vegan, mais bien contre ceux et celles qui en font une religion au point où ils t’en parlent aussi souvent qu’ils vont aux toilettes dû à leur alimentati­on riche en fibres. Tu peux être vegan si tu veux, mais écoeure pas le peuple avec ça! Moi le matin, je prends mon café sans sucre pis j’en fais pas des conférence­s!

Cela dit, il ne faut pas généralise­r. Ce n’est pas parce que tu habites à Montréal, que nécessaire­ment tu te promènes en Bixi avec un foulard l’été suivi de ton chien saucisse bisexuel. Autant que tu peux vivre à Amos, sans aller à la chasse pour égorger un sanglier à mains nues et avoir trois Ski-doo stationnés en face de ta shed à bois que tu t’es fait construire après avoir marié ta cousine.

Je vous avouerais qu’il y a même des éléments positifs de vivre à Montréal. Beaucoup d’attraction­s sont à proximité. En une seule soirée, je peux aller au Casino et finir ma soirée avec une pute. Dans les deux cas, je suis certain de me faire vider. Ensuite, je peux même aller au Centre Bell s’il me reste 100 $ pour une bière.

Déménager à Montréal en valait heureuseme­nt la chandelle, car sans ça, vous ne seriez pas en train de me lire en ce moment. Je vous entends penser jusqu’ici : « Alex, est-ce que tu as mis en pratique ce que tu as appris à l’école nationale de l’humour? » Je vous décrirais mon passage à cette école du rire avec une phrase de l’artiste Fernand Mourlot qui va comme suit, et je cite : « He looked, he listened, he did the opposite of what he had learnt, and it worked. »

Si t’as pas compris la dernière phrase en anglais, c’est pas grave. Va mater le cul de la fille de la page 34.

Ce que je veux dire, c’est que peu importe les choix que tu fais dans ta vie, l’important est de rester toi-même, de suivre tes propres conviction­s et de ne pas te laisser assimiler par la masse en devenant une guenille molle que tu « pitches » et qui prend la forme du coin.

Tu peux être plombier sans avoir un fétichisme pour l’exhibition de ta raie. Tu peux être garagiste sans inventer des problèmes aux voitures de tes clients. Tu peux être une candidate de l’émission Barmaids sans être une cruche. Bon, le dernier est un mauvais exemple, mais vous comprenez.

Et tu peux être Montréalai­s en ayant une coupe de cheveux de Dragon Ball tout en gagnant ta vie en faisant des jokes de « plottes ».

JE N’AI VRAIMENT PAS HÂTE DE VOIR LEUR RÉACTION QUAND ILS VONT DÉCOUVRIR QUE JE SUIS CHRONIQUEU­R POUR SUMMUM

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