Summum

Mike Beaudoin et son ami Dave créent des souvenirs

- PAR MIKE BEAUDOIN PHOTOGRAPH­E : SARAH DAGENAIS

On a tous un ou une ami(e) un peu intense dans la vie. Tu sais, le genre d’ami qui parle fort, qui se fout de ce que les autres pensent, qui se saoule comme si c’était la dernière journée de sa vie et qui te fait des pranks que juste lui trouve drôles. Le genre d’ami que tes autres amis trouvent gossant… T’as une personne en tête? Moi, il s’appelle Dave.

Dave est un autre humoriste avec qui je suis devenu ami il y a environ huit ans, mais j’me souviens pas trop comment c’est arrivé. J’pense qu’on a pris un verre ensemble une fois, mais il est jamais reparti.

Cette année, j’suis allé faire un show en Beauce avec Dave et voici ce qui s’est passé. Après le spectacle, on a décidé d’aller prendre un verre, Dave, le booker/chauffeur et moi. On finit par trouver un bar un peu miteux avec deux ou trois personnes au comptoir, quatre qui jouent au billard et la serveuse qui a l’air d’un mélange entre Gullum pis Marjo un lendemain de veille.

Y’a pas d’ambiance, on se fait regarder croche par tout le monde, mais bon, on est en Beauce… tu peux ben me dévisager si tu veux, moi au moins je couche pas avec mes cousines. En passant, si tu viens de la Beauce pis que t’es offusqué, décroche; c’est juste des jokes, mais tu le sais que c’est vrai.

Les gars vont se commander un verre au bar et moi j’men vais aux toilettes. Même ça c’est weird, y a plein de cabines, mais pas de portes… fait que quand tu chies, t’as sûrement du monde qui te fixe dans les yeux en te disant : « Le gros, t’achèves-tu? »

Je finis mes affaires, sors de là et vais me commander une bière. C’est là que Dave vient me voir en essayant de me convaincre de jouer au pool contre les gars du bar et de miser de l’argent. Moi j’ai pas le goût et je sais pas jouer, mais il s’en fout de ma réponse et me tire vers la table.

Il arrive devant les gars et sort de ses poches 200 $ en disant : « On veut juste s’amuser, on n’est pas super bons pis lui y sait pas jouer. » Les autres boys font : « OK… » Boom, 200 $... Le booker du show nous regarde : « Je rajoute 200 $... » Pis moi j’suis comme : « Voyons, calvaire! Vous faites quoi? Je sais pas jouer, on va perdre tout cet argent-là… »

Moi j’suis frustré après Dave parce que c’est le genre de gars qui nous met toujours dans des situations de marde et, finalement, c’est moi qui dois nous sortir de là.

La partie commence, je suis le premier à casser, aucune boule entre. Ensuite, les deux autres jouent, Dave et ainsi de suite jusqu’au moment où il reste juste la noire à rentrer, pis c’est à mon tour. J’en n’ai pas réussi une, je panique et j’me dis : « Si je l’ai pas, eux autres vont gagner pis on perd tout l’argent. » Je donne un p’tit coup sec, la boule roule pas vite vers le trou, cogne sur les deux rebords du trou, pis elle entre. Je capote! La seule boule que j’ai eue nous a fait gagner, on ne perdra pas notre argent pis Dave va rester mon ami; sinon, je l’aurais tué.

Je regarde Dave : « Prends le cash pis on fout le camp. »

Les deux gars et les autres dans le bar s’approchent vers nous et commencent à nous pousser en criant : « HEY! Vous n’aurez pas une cenne, on garde tout, c’est chez nous icitte!» Rendu là, on est encerclés par des colosses pas de dents qui nous poussent et veulent se battre… Je t’avoue que j’ai un peu eu la chienne… Pis un moment donné… y partent tous à rire « Ha! Ha! Ha! Ha! Ha! As-tu vu sa face? Ha! Ha! Ha! Ha! Ha! »

Je regarde Dave et j’comprends rien. C’est là qu’il s’approche de moi pour m’expliquer que c’est un coup monté qu’il a organisé quand je suis allé aux toilettes pour me faire capoter. Ben il avait réussi, je tremblais pis j’ai fait un p’tit pet sauce… Good job, Dave.

Donc on a ri, on a bu des shooters pis j’suis allé changer de bobettes. Dave a toujours une phrase pour excuser ses niaiseries : « Le gros, j’nous crée des souvenirs. »

Le plus beau dans cette histoire-là, c’est que j’ai réussi à me venger. Un soir, on était encore en spectacle ensemble. Il commençait à être sur le party et je savais très bien que c’est moi qui allais le ramener chez lui parce qu’y’a pas de blonde, pas de permis de conduire et si je le laisse dans la rue, il retrouvera jamais sa maison.

Je vais le voir et lui demande d’aller fouiller dans mon auto pour trouver mon cell pendant que je cherche dans le bar. Il se rend à mon auto et moi, j’appelle mon ami policier en lui demandant de me faire une faveur et juste de venir faire semblant d’arrêter Dave.

Je ne sais pas si t’as déjà eu le feeling d’une revanche qui se passe exactement comme tu veux, mais c’est jouissif. J’avais une semi-croquante.

La police arrive, se met derrière mon auto, allume ses grosses flashlight­s en pointant Dave et j’entends dans les haut-parleurs : « Veuillez sortir du véhicule, sortez du véhicule maintenant! »

Dave est saoul et il fouille à quatre pattes dans un véhicule qui ne lui appartient pas. Moi j’suis dans le bar à regarder par la fenêtre et à rire comme un maniaque tout seul : « Ha! Ha! Ha! Ha! Ha! »

La police s’approche de lui, Dave ne comprend rien, il s’obstine, il sent l’alcool, il est énervé et sur le bord de péter un plomb : « Voyons cr&$%, c’est le char à mon ami, je vole rien, je mettrai pas mes mains dans les airs… »

Bon… As-tu déjà vu un de tes chums se faire estamper le chest sur un capot de char de police… C’t’un peu ça le bonheur. Il se fait menotter et se fait lire ses droits. C’est là que moi j’arrive. La face qu’il avait à ce moment-là valait tous les mauvais coups qu’il m’a faits.

Je le regarde comme si je ne comprenais pas ce qui se passait. Dave me dit : « Le gros, c’est quoi qui se passe? Dis-leur que je fais rien de mal. » J’ai regardé mon ami policier en disant : « Oui, c’est lui qui essaie de voler mon auto. »

Sa face est tombée comme s’il venait de voir un fantôme. Il a les yeux pleins d’eau et il me parle comme un gars trop saoul et émotif : « Man, pourquoi tu me fais ça? Pourquoi man? »

J’me suis approché de l’auto, accoté sur le bord de la fenêtre pis je lui ai dit : « Le gros, j’nous crée des souvenirs! »

JE TREMBLAIS PIS J’AI FAIT UN P’TIT PET SAUCE

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