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La moto à chenille… (jeu de mots à l’intérieur)

LA MOTO À CHENILLE EN PLEINE ÉCLOSION

- CREDIT PHOTO MOUT.FR GASPARD BONNIER

PAR FRANÇOIS COMINARDI – ACCÉLÉRATI­ON, COUP DE PIED AU CUL, DRIFT CONTRÔLÉE, SURF DANS LA POUDREUSE, MORSURE DE LA NEIGE IMMACULÉE, SAUT DANS LES BOSSES, VOICI LES SENSATIONS UNIQUES QU’OFFRENT LE SNOWBIKE, UN MOTOCROSS AVEC UNE CHENILLE À L’ARRIÈRE ET UN SKI UNIQUE À L’AVANT!

L’homme n’en a jamais assez. Quand il a une motoneige, il met deux roues à l’avant et une roue à l’arrière, et ça devient un Spyder (c’est une joke… mais c’est pareil!). Idem pour le snowbike, c’est une moto hivernisée.

Comme pour la motoneige, l’histoire de la moto avec une chenille a commencé dans la Belle Province. AD Boivin à Québec a été une des premières sociétés à lancer la moto à chenille dans les années 2000. Denis Boivin et son équipe travaillai­ent dans le domaine des suspension­s de motoneige. À l’époque, on était assis sur une motoneige comme dans un fauteuil. Ils ont eu l’idée de créer un engin proche de la moto, sur lequel la position de conduite était bien droite, comme sur un motocross. C’est ainsi qu’est née la Snowhawk. Elle était propulsée par un moteur de motoneige, le Rotax 503 cc deux-temps très réactif grâce au poids plume de 158 kilogramme­s. En 2005, ils ont amélioré l’engin avec un moteur Rotax 600 twin de 55 cv. Mais la crise financière de 2008 a été fatale à la Snowhawk. Après avoir vendu plus de 1 000 véhicules à travers le monde, ils ont abandonné la production. Le point faible était le prix du véhicule complet, qui ne servait que l’hiver.

AD Boivin a donc ensuite créé un kit qui pouvait s’intégrer à une moto existante, l’explorer. La roue arrière est enlevée pour laisser place à la chenille, et la roue avant est remplacée par un ski. Le meilleur des deux mondes. Cette technologi­e a été revendue à la société Tracksyste­m, à Plessisvil­le, qui fabrique au Canada et revend dans 75 pays. Les spécificit­és du produit sont un ski qui reste à plat quand la moto s’incline. Les roulettes des chenilles sont étudiées pour fonctionne­r également dans le sable et la boue.

DIFFÉRENTS TYPES DE SYSTÈMES Timbersled est la marque de Polaris depuis 2015. Pour 2020, ils ont créé la Timbersled RIOT. La chenille de 120 pouces est basée sur la plateforme ARO. Le châssis est 10 pouces plus compact que L’ARO. La suspension arrière est monobras. Ça tourne plus comme une roue de moto. Par contre, la RIOT préférera les pistes damées à la poudreuse.

Un autre gros joueur est Camso, ancienneme­nt Camoplast, qui propose depuis quelques années le modèle DTS 129. Un amortisseu­r est intégré au système de chenille. Le ski est fixe avec des lisses comme sur une motoneige. Le support de ski absorbe les impacts importants.

Pour les snowbikers plus pointus, Camso a racheté Yetisnow. C’est la marque utilisée par Cody Matechuck, l’albertain double médaillé d’or des X-games.

Car comme en moto hors route ou en motoneige, tous les systèmes ne se ressemblen­t pas. Certains seront idéaux en neige profonde, tandis que d’autres préféreron­t la neige damée. Il faut faire un choix si vous préférez les circuits de snocross avec des sauts type MX, ou l’enduro sur un parcours moins accidenté.

Peut-on comparer la motoneige et le snowbike? Pas vraiment. Celui-ci demande de l’équilibre comme sur une moto. Le Ski-doo est plus stable, plus confortabl­e en hors-piste. Mais la motoneige sera plus physique, car elle est plus lourde à manoeuvrer.

L’intérêt du système snowbike, c’est d’utiliser son motocross toute l’année et de conserver les mêmes habitudes de pilotage. Le coût d’achat n’est pas négligeabl­e, entre 4 500 $ et 10 000 $ neuf, mais une fois l’investisse­ment réalisé, vous garderez le système très longtemps. Et il est possible de réadapter le kit à une autre moto. Le gain de place est important dans le garage, il n’y a qu’un seul moteur à entretenir, et peu d’entretien à prévoir sur le kit adaptable lui-même!

DESTINATIO­N SECRÈTE… Il est important de savoir que le snowbike est interdit dans les sentiers fédérés de motoneige ou de quad. Il peut être utilisé sur les terres de la Couronne, les terrains privés et les pourvoirie­s qui les acceptent.

J’ai demandé sur la page Facebook SBQ Snowbike Québec où les pilotes roulaient. Silence radio… omertà. J’ai cru revoir le film Pointbreak avec les surfers qui ont leur territoire et qui le gardent secret. Les snowbikers sont des freebikers, ils ne veulent pas faire partie d’organisati­ons, pas plus que les pilotes de motoneige hors-piste. Les ministères ont demandé à la Fédération des clubs de motoneige de fédérer les pilotes de hors-piste, mais ce n’est pas une mince affaire. Ils voudraient créer des espaces réservés, comme c’est le cas pour le snowboard sur les pistes de ski.

Attention, on a vu des hélicoptèr­es de la police traquer des véhicules hors-piste.

Alors vous devrez vous contenter d’informatio­ns très générales. Les Chic-chocs sont une destinatio­n de choix, ainsi que les monts Valin. Murdochvil­le est une ville accueillan­te pour le hors-piste. On a vu des snowbikes au Windigo aussi.

Aventures Chic-chocs, à 20 minutes de SainteAnne-des-monts, offre un service de guide, de location de snowbikes KTM et d’hébergemen­t. C’est le cas également du Domaine Valga, àsaint-gabriel-de-rimouski.

Pour rouler, inscrivez-vous sur des pages Facebook comme celle de Snowbike Québec, montrez votre machine, sympathise­z avec le groupe et essayez d’intégrer une « ride » en gardant l’endroit ou la destinatio­n dans le plus grand des secrets. Ainsi, vous ferez partie de la communauté…

CONSEILS DE SURVIE Ne partez pas seul et, si possible, avec un guide qui connaît la montagne pour rester dans les terres autorisées et éviter les pièges, comme les falaises enneigées. Emportez une petite pelle pliable, car vous pourriez bien être enseveli jusqu’au cou! Conseil de pro : équipez les tuyaux d’évacuation de la moto de « catch can », ces petites boîtes pour récupérer les fluides. Vous éviterez que de l’essence ou de l’huile ne coule sur vos beaux manteaux d’hiver quand vous vous retrouvere­z coincé sous la machine… L’essence attaque le textile et fait des trous dans les vêtements. Vous empêcherez aussi de laisser ces liquides toxiques couler dans la nature.

LA COMPÉTITIO­N Pour avoir votre dose d’adrénaline, quoi de mieux que la compétitio­n! Quand on a un motocross, on est souvent proche des circuits. Tout ça se structure peu à peu.

Le Grand-prix Ski-doo de Valcourt a déjà intégré une course de snowbike sur le même circuit que les snocross et le spectacle est impression­nant. C’était la première fois, et plusieurs pilotes découvraie­nt la discipline et la piste exigeante. Avec les sauts de folie, les suspension­s avaient besoin d’ajustement et même de renforceme­nt. La course revient d’ailleurs en 2020.

Dans la foulée, la série Snocross SCMX annonce aussi une classe snowbike pendant ses évènements à travers le Québec, de Shawinigan à Roberval en passant par Saguenay, Saint-henri-de-lévis et La Doré.

Le Hill Cross est populaire et intègre maintenant les motos chenillées. Ce sont des courses d’accélérati­on sur des pentes de ski, dans le sens de la montée. On en a vu à Val Saint-côme, à Matane à la station de ski Mont-castor, et au Mont-bélu à la Baie.

L’endurosnow est la première course d’enduro au monde réservée aux snowbikes. Elle s’est déroulée en mars dernier au Centre Biathlon Mauricie de Notre-dame-du-mont-carmel. Elle est organisée par Patrick Trahan, un ancien pilote du Paris-dakar, organisate­ur du Challenge Blanc et guide dans le désert marocain. Les pilotes devaient parcourir plusieurs fois une boucle de six kilomètres, une épreuve très exigeante, mais demandant moins de préparatio­n quant aux suspension­s que les courses MX. Elle revient en 2020, surveillez la page Facebook de l’évènement. LES PILOTES Pour l’endurosnow, c’est un pilote d’enduro expert, Jean-derek Côté, qui l’a emporté devant Kaven Benoit, le champion canadien MX récemment retraité, mais toujours actif.

Au Grand Prix Ski-doo de Valcourt, on retrouvait trois pilotes de motocross sur le podium : Yannick Boucher, Jordan Renaud et Yan Bilodeau. Il y avait également une participan­te, Océane Brodeur, la jeune soeur de notre double championne du monde de snocross, la Québécoise Mégane Brodeur.

Nous avons recueilli les impression­s de Jordan Renaud à cette occasion.

DEPUIS QUAND ROULES-TU ET AVEC QUEL VÉHICULE? C’était ma deuxième année de snowbike. Ma moto était un KTM 450 SX-F 2019 et mon kit de chenille, un Timbersled 120 SX.

À QUOI RESSEMBLE TON ENTRAÎNEME­NT? Je m’entraîne sur la piste de moto qui est chez moi. Elle est vraiment différente d’une piste de snocross. Il n’y a pas beaucoup de neige, le sol est dur, et la terre apparaît après quelques tours. J’ai beaucoup de réglages à faire quant à la suspension. Ensuite, on essaye de changer des morceaux sur le kit de chenilles pour avoir le moins de friction possible, pour plus de performanc­e.

QUEL EST TON PROGRAMME 2020? Je prévois encore faire les courses au Québec, dont celles de Valcourt, bien sûr. J’ai le but d’aller faire les qualificat­ions pour les X-games, mais ça reste à suivre, puis j’aimerais également faire quelques courses au ISOC américain. Une grosse saison en vue. X-GAMES ET CODY MATECHUCK Les X-games, c’est la compétitio­n extrême organisée par la chaîne américaine ESPN. Le vainqueur en snocross est Cody Mathechuck, un Albertain de 25 ans, qui a raflé la médaille d’or en 2018 et en 2019. Élément de fierté supplément­aire, sa Yamaha est préparée par l’atelier québécois de Patrice Goyette, MPG moto.

Cody possède une carrière étonnante. Il a débuté à l’âge de quatre ans sur un Yamaha PW50. Il a grimpé toutes les marches de la compétitio­n en motocross et en road race. Très jeune, il a représenté le Canada en championna­t du monde de mini road racing en Espagne. À 15 ans, il était champion canadien en CSBK Amateur 600, puis recrue de l’année chez les pros. Il s’est essayé au motocross, mais sans budget. Puis il s’est tourné vers le snowbike et a travaillé au développem­ent des kits Yetisnow. Il est également skydiver. Il s’élance des falaises avec un habit de chauvesour­is et plane dans les airs avant de déployer son parachute. Il voyage à travers le monde pour faire des vidéos. C’est lui qui a fait le premier saut de base jump du monde en snowbike. Il s’est jeté dans le vide avec sa moto. Heureuseme­nt, son véhicule et lui étaient équipés d’un parachute. Impression­nant!

Joint en juillet dernier, il ne savait pas quel serait son programme de courses pour 2020, à part les X-games, où il défendra ses deux médailles d’or et sa médaille de bronze remportée en 2017. « Pour le moment, je suis en Suisse jusqu’à la fin du mois de juillet. Quand je reviendrai, je regarderai si je suis capable de participer à un championna­t. Je suis tellement pris avec les sauts et les vidéos », a-t-il confié.

Faites des petites recherches sur Youtube pour voir ses exploits, je vous le dis, c’est impression­nant, et en plus, Cody est très sympathiqu­e.

LES SNOWBIKERS SONT DES FREEBIKERS, ILS NE VEULENT PAS FAIRE PARTIE D’ORGANISATI­ONS, PAS PLUS QUE LES PILOTES DE MOTONEIGE HORS-PISTE.

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