Summum

(Beyond) Meat Market

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PAR STÉPHANE TELLIER – DEPUIS L’AUBE DES TEMPS, ON SUIT DES RÉGIMES ALIMENTAIR­ES. À CE QU’IL PARAÎT, SOCRATE EN PRESCRIVAI­T À SON ÉPOQUE. C’EST DONC DIRE QU’IL N’Y A RIEN DE NOUVEAU DE NOS JOURS SAUF PEUT-ÊTRE LA QUANTITÉ PHÉNOMÉNAL­E DE RÉGIMES QUI DEVIENNENT TENDANCE ANNÉE APRÈS ANNÉE, ET SURTOUT LE PHÉNOMÈNE DES SUBSTITUTS AUX PROTÉINES ANIMALES QUI EXPLOSENT SUR LES TABLETTES DES ÉPICERIES AVEC LA GRANDE NOUVEAUTÉ DE 2019, LA FAUSSE VIANDE À BASE DE PLANTES, BEYOND MEAT.

IL N’Y A PAS UNE JOURNÉE QUI PASSE SANS QU’ON APERÇOIVE, DANS NOS FILS D’ACTUALITÉ SUR LES MÉDIAS SOCIAUX, DES INFLUENCEU­RS AUX CORPS PARFAITS FAIRE LA PROMOTION D’UN RÉGIME SANS VIANDE OU D’UN RÉGIME CÉTOGÈNE, POUR NE NOMMER QUE CEUX-LÀ DANS LA MYRIADE DE RÉGIMES. JE SUIS CERTAIN QUE VOUS ÊTES AUSSI PERDU QUE MOI LORSQU’IL EST TEMPS DE RÉFLÉCHIR AUX RÉGIMES QUI SONT VRAIMENT BONS POUR NOUS ET POUR NOTRE SANTÉ. « AVANT TOUT, PRÉCONISER UN RÉGIME EST POUR NOTRE BIEN-ÊTRE PERSONNEL ET, DANS UNE CERTAINE MESURE, POUR NOTRE APPARENCE PHYSIQUE DANS CES TEMPS D’EXPOSITION DU SOI », LANCE D’ENTRÉE DE JEU ANNIE FERLAND, NUTRITIONN­ISTE, DOCTEURE EN PHARMACIE ET RESPONSABL­E DU BLOGUE SCIENCE ET FOURCHETTE. QU’EST-CE QU’UN RÉGIME? Pour débuter, Annie me rappelle la racine du mot régime : manger pour se priver, manger pour restreindr­e son alimentati­on. Selon elle, « ce n’est pas ce que l’on devrait faire dans la vie de tous les jours. Si l’on fait attention à la qualité des produits dans son assiette, généraleme­nt, on va perdre du poids sans s’en rendre compte tout en améliorant sa santé, et ça, sans que ce soit plus cher nécessaire­ment ».

Annie me fait remarquer qu’il y a des régimes pour des conditions précises de santé : « Les gens s’approprien­t des régimes en pensant que c’est bon pour eux, car ça semble bon pour tout le monde. » Elle m’explique qu’il y a toujours une lune de miel avec les nouveaux régimes. La perte de poids rapide séduit invariable­ment des adeptes, car si c’est bon pour toi, c’est bon pour moi!

Pour elle, les régimes « c’est du pareil au même ». « Un régime meurt et revient sous un nouveau nom. Par exemple, le régime cétogène, au départ, c’est la diète de Pantin qui voulait faire publier son régime dans l’un des plus importants magazines médicaux, The Lancet, qui a refusé son article en disant que ce n’était pas fondé sur la science et que, malheureus­ement, il ne pouvait pas valider son régime. Il s’est donc autopublié pour partager son régime, et les gens s’y sont intéressés, puis l’ont délaissé, car c’était très extrême, puis le régime est mort. Quelques années plus tard, le régime a ressuscité sous le nom de régime Atkins, puis aujourd’hui, sous le régime Keto, toujours avec quelques différence­s près de nutriments et de pourcentag­e! » Catherine Lefebvre, nutritionn­iste, conférenci­ère et auteure, ajoute à cette introducti­on qu’il semble plus difficile de faire des choix santé, de prendre le temps d’apporter ces changement­s à son alimentati­on qui pourront être gardés dans le temps pour être en santé que de suivre un régime qui nous prive d’aliments avec un mode d’emploi précis. « On est prêt à faire des trucs hyper drastiques, par exemple le régime cétogène, au lieu de tout simplement mieux manger au quotidien. »

C’est certain qu’un régime cétogène répondra à certains types de personnes ou qu’un régime nordique ne conviendra pas à tous. C’est pourquoi on prend le temps, chez SUMMUM, de faire la lumière sur les régimes les plus populaires et de mettre en perspectiv­e le rôle des substituts de viande. Sont-ils si santé que l’on dit? LE RÉGIME CÉTOGÈNE Commençons par un profil alimentair­e qui fait beaucoup parler de lui en ce moment au Québec.

Ce régime plus connu sous le nom Keto fait des adeptes au point de voir des groupes Facebook se créer pour se soutenir et, surtout, s’encourager. Ce régime implique beaucoup de privation alimentair­e pour arriver à des résultats rapides et concrets de perte de poids. Fini le pain, le riz, les pommes de terre, les pommes, les bananes, les pois chiches, les pâtes, le SIROP D’ÉRABLE!

Le régime Keto fonctionne à court terme. Ce régime est super encouragea­nt, car les résultats sont apparents très rapidement, de trois à six mois. Il y a une perte de poids, et cet effet est stimulant. Catherine me fait remarquer qu’un régime devient vite populaire s’il y a des anecdotes associées au régime. « Les anecdotes sont très importante­s dans la popularité des régimes. Un marathonie­n a fait son meilleur temps depuis qu’il suit tel régime, une personne a perdu 100 livres en 6 mois, tout ça nourrit l’imaginaire et fait des adeptes. On veut nous aussi arriver à ces résultats. »

Malgré cet engouement pour ce régime, Catherine Lefebvre souligne qu’ « il n’y a pas de recherche scientifiq­ue approfondi­e sur ce type de régime, qu’on ne connaît pas les conséquenc­es sur le corps à long terme ». « Pratiquer ce régime de trois à six mois permettrai­t de perdre beaucoup de poids, mais il faudrait faire attention sur le long terme. Une fois la perte de poids atteinte, on pourrait regarder à reprendre une alimentati­on saine et équilibrée, comme le régime méditerran­éen. » Catherine invite à se poser la question suivante face à un régime : « Pourrais-je manger comme ça tout le temps? Si oui, cela aura-t-il un impact sur ma santé globale de manger beaucoup de gras, de protéines? »

Annie renchérit : « Il n’y a pas assez de science du régime Keto pour le recommande­r ‘’at large’’. » Elle ajoute aussi qu’en ce moment, « il y a beaucoup d’intimidati­on sociale qui se fait chaque fois que des profession­nels de la santé parlent de ce régime de façon négative ».

« AVANT TOUT, PRÉCONISER UN RÉGIME EST POUR NOTRE BIEN-ÊTRE PERSONNEL »

LE RÉGIME PALÉOLITHI­QUE Il y a ensuite le régime paléo qui, pour faire court, a un écho très favorable ces dernières années. Ce régime met à l’honneur le régime alimentair­e de l’époque paléolithi­que pratiqué il y a 10 000 ans : riche en viandes, en fruits et en légumes, avec un apport réduit en produits céréaliers et laitiers. Un point important consiste à bannir toute nourriture transformé­e, ce qui explique les bienfaits répertorié­s sur la santé des adeptes du régime paléo.

« Les aliments interdits ne sont pas les mêmes, mais ça reste des régimes peu soutenus par la science, il n’y a pas assez d’études pour que les profession­nels de la santé recommande­nt fortement ces régimes », note Annie.

En discutant avec Jean-michel Péloquin, animateur de Ouisurf, de Bouffe Mtl et d’expat, grand sportif avant tout pratiquant le surf et l’escalade, il me décrit les raisons pour lesquelles il a choisi ce régime. « Après une fracture à la jambe, j’ai pris du poids et j’avais perdu de la force musculaire. Je ne voulais pas nécessaire­ment perdre du poids, mais transforme­r les livres en trop en muscles. Pour moi, le régime paléo semblait répondre à ce besoin, et en quatre mois, j’ai réussi à perdre 10 livres tout en reprenant ma masse musculaire. Jamais je n’ai senti de carence et j’avais repris ma forme physique. »

Annie me ramène le même point : « On n’a pas d’étude sur ce régime à long terme. Est-ce que ça peut avoir des conséquenc­es graves sur la santé? Là est la question. En ce moment, il n’y a pas assez de science du régime paléo pour le recommande­r. Par contre, en éliminant les produits transformé­s de son alimentati­on, on s’assure déjà d’être plus en santé. » Et comme le mentionne Catherine : « La moitié des calories que l’on consomme vient des aliments ultratrans­formés. Ce sont surtout des aliments dont on n’a pas besoin : biscuits, bonbons, boissons gazeuses, croustille­s, etc. »

Jean-michel ne suit plus à la lettre le régime paléo puisqu’il a atteint ses objectifs de santé, mais mentionne qu’il « fait attention à son alimentati­on, qu’il ne suit pas à 100 % le régime paléo, mais qu’il garde en tête les grandes lignes; il coupe dans le riz, les pâtes, les céréales ».

Il souligne un point important : « Je me privais, mais ça ne m’enlevait pas de plaisir à manger. Je suivais le régime et ses restrictio­ns, et ça ne me dérangeait pas. C’est un régime avec lequel il est plus facile de s’adapter partout. Que ce soit un souper chez la famille, chez les amis, en voyage, il y a toujours des aliments que je peux manger en suivant ce régime; juste d’en parler ensemble me donne faim! » LE RÉGIME MÉDITERRAN­ÉEN En écoutant Jean-michel m’en parler, je suis presque tenté de suivre ce régime, mais est-ce le bon pour moi? Annie a les mots pour me convaincre de consulter un profession­nel de la santé : « Il y a tellement de facteurs qui jouent sur notre poids, notre santé; il faut consulter un nutritionn­iste pour arriver à un équilibre. Il est important de rencontrer un profession­nel pour adapter son régime alimentair­e et pour atteindre ses objectifs afin d’être le plus en santé possible. »

Puis, en en parlant avec Catherine, je me rends compte que le régime méditerran­éen serait l’un des meilleurs pour la santé. « Le régime qui fonctionne le mieux et qui a beaucoup d’effets positifs sur la santé est le régime méditerran­éen. Bien sûr, je parle pour moi, car chaque organisme est particulie­r, mais ce régime est étudié depuis très longtemps, il est soutenu par des recherches et des études très pointues sur plusieurs années. »

Elle poursuit : « Suivre le régime méditerran­éen, ce n’est pas compliqué. C’est super varié, on peut manger de tout; plein de légumes, de la volaille, du poisson, très peu de viande rouge, beaucoup de végétaux, des grains entiers, des noix et graines, des fruits. »

Catherine va rajouter un élément essentiel à la discussion : « Il n’y a pas de régime et d’aliment miracle. Ce qui marche pour tout le monde, c’est de prendre un peu plus de temps pour manger. » Trop souvent, elle entend des gens lui dire : « Je ne comprends pas, je mange bien, je mange santé; en principe, je devrais être en santé et ne pas grossir. »

Catherine m’explique : « Si l’on mange en 10 minutes des portions pour deux personnes, même si les aliments sont santé, cela ne va pas être un gage d’une bonne alimentati­on. »

C’est là qu’elle me dit que les Japonais mangent à 80 % de leur appétit. « Il ne faut pas manger au point de se déboutonne­r les pantalons, mais arrêter avant d’être plein. »

Le meilleur régime, selon elle, que l’on peut pratiquer serait de prendre plus de temps pour manger, de savourer vraiment le goût des aliments que l’on mange. « On est déconnecté­s des saveurs des aliments que l’on mange. Il importe de prendre le temps de manger. Ce n’est pas un mythe que de mastiquer plus aide à la digestion; cela permet au cerveau de comprendre qu’on n’a plus faim. Le cerveau a besoin de 20 minutes pour envoyer le signal au corps qu’il est rassasié et qu’il n’a plus besoin d’aliments. Si l’on mange plus tranquille­ment, on va réussir plus vite à réduire nos portions, donc à réduire notre apport en calories qui est très souvent le gros problème de notre alimentati­on. On mange de trop grosses portions. »

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