Velo Mag

Portraits de cyclistes vénérables

- MAXIME BILODEAU

Pierre Gendron Toujours aussi accro

« On le surnomme le patriarche, ou encore Gendronix, car sa barbe blanche rappelle celle de Panoramix », écrivait le collègue Gilles Morneau dans un (superbe) portrait de Pierre Gendron publié dans les pages de Vélo Mag. C’était en 2006, alors que « Papi-vélo » survolait les sentiers du Québec, accrochant au passage quelques jolies médailles à son cou déjà bien garni – l’homme a notamment remporté le titre de champion du monde des maîtres de descente en 2003. Juste ça.

Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Du haut de ses 72 ans, Pierre Gendron ne tripe plus autant sur le vélo de montagne, qu’il trouve quelque peu guindé. « L’époque me plaît moins, les pratiquant­s ont les jambes rasées... En plus, il faut absolument embarquer dans son char pour pratiquer le sport », dit ce résident de la ville de Québec. À la place, il bouffe du bitume, surtout dans la Côtede-Beaupré, qu’il affectionn­e tout particuliè­rement. Il voyage, aussi – le chanceux pédalait en Bourgogne lorsque nous l’avons contacté. « Sur un Willier en carbone loué », précise celui qui a été intronisé au Temple de la renommée du cyclisme québécois en novembre dernier.

Bref, Pierre Gendron a ralenti la cadence. Le patriarche parle désormais de « concession­s sur les performanc­es », de « mauvais moments à relativise­r ». Lui, ce touche-à-tout de la chose cycliste, cet abonné aux plus hautes marches du podium, apprend en somme l’humilité, synonyme de vieillisse­ment. « J’apprends à apprécier l’effort pour ce qu’il est, et non plus pour ce qu’il a un jour été. Cela étant dit, je suis toujours aussi accro aux sensations que me procure le vélo. C’est ma soupape, mon essentiel plaisir solitaire », souligne-t-il.

Gilles Émond Le « tamalou », vous connaissez?

« Il n’y a rien de plus occupé qu’un retraité qui pédale et qui fait du bénévolat », nous avait prévenus Gilles Émond. Par exemple, lorsque contacté par Vélo Mag en juin dernier, l’homme de 67 ans travaillai­t sur le bilan annuel de Bénévolat Saint-Sacrement, un organisme communauta­ire de Québec dont il est membre du conseil d’administra­tion. Par chance, il pleuvait, ce jour-là. « J’en profite pour faire du bureau. Sinon, je serais probableme­nt sur la route, en train de rouler », avoue cet ancien directeur des communicat­ions de la Régie des rentes du Québec – il est retiré depuis dix ans.

Essayer de l’attraper un mercredi aurait été tout aussi compliqué. C’est que toutes les semaines, Gilles Émond sort avec le groupe Vélo du mercredi, un club cycliste informel de 70 membres. En compagnie de ces derniers, il bat les routes de la région, en plus de pratiquer le « tamalou ». « C’est un classique chez les gens de mon âge : on énumère nos petits bobos! » note ce bon vivant. Et pendant un week-end, ç’aurait été un meilleur moment? « Ah non: les fins de semaine

sont réservées à la famille. J’ai quatre petites-filles, vous savez. » Et une femme, à laquelle il est marié depuis 46 ans.

N’empêche, il a pris le temps de répondre à nos questions. Bien que « classique », sa feuille de route n’en est pas moins impression­nante : initiation au cyclotouri­sme par le Fondateur de Vélo Québec Gabriel Lupien, triathlons dans les années 1980 et 1990, 14 marathons à son actif, et ainsi de suite. Tout au long de sa vie, le vélo aura néanmoins été un fil conducteur. Et ce n’est pas près de changer: « Je ne vois pas le jour où je vais accrocher. Le vélo m’aide à bien vieillir, il n’y a pas de doute. » On le croit sur parole.

Jean Desrochers Athlète à vie

Cinq mille kilomètres de vélo par année. Trois séances de natation du lundi au vendredi. Douze heures d’entraîneme­nt hebdomadai­re, beau temps, mauvais temps. Jean Desrochers ne se gêne pas pour étaler son exceptionn­el emploi du temps sportif. On le comprend: malgré ses 87 ans bien comptés, ce fier Sorelois et vétérinair­e à la retraite semble avoir oublié de vieillir. La preuve: il ne se passe pas une journée sans qu’on l’interroge à ce sujet. Son truc ? « J’aime bouger, tout simplement. Si je ne m’entraîne pas, je fatigue », résume-t-il.

Il faut dire que le sport fait partie du quotidien de Jean Desrochers depuis... toujours ! Au milieu du siècle précédent, ce lanceur de grand talent est invité au camp d’entraîneme­nt d’un club-école de la Major League Baseball (MLB), au terme duquel on retient ses services. Puis, dans les années 1970, l’athlète découvre les sports d’endurance par l’intermédia­ire de la course à pied – il totalise 38 marathons, dont un terminé en 2 h 54 min. Un jour, il se blesse à l’entraîneme­nt, ce qui l’amène à s’intéresser au vélo et à tomber en amour avec ce sport « qui épuise moins ».

Encore aujourd’hui, le membre des Dynamiks de Contrecoeu­r participe aux contre-lamontre individuel­s régionaux orchestrés par ce club cycliste de la Rive-Sud. Sans surprise, il est le compétiteu­r le plus âgé. « Je vais un peu moins vite d’une année à l’autre, mais ce n’est pas grave. À mon âge, il ne faut pas s’épuiser », explique-t-il. Chaque année, les Dynamiks organisent d’ailleurs une épreuve de 20 km en son honneur : la Classique Jean Desrochers, à l’issue de laquelle un trophée est remis à un athlète persévéran­t du club. Comme l’auteur de ces lignes, au centre sur la photo.

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Pierre Gendron
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Gilles Émond
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