Velo Mag

Délinquanc­e contrôlée

- Jacques Sennéchael jsennechae­l@velo.qc.ca

Francis Tétrault est un mordu de vélo de montagne qui a la chance de travailler au coeur de sa passion en gérant ce dossier à Vélo Québec. Évidemment, sa connaissan­ce aiguë du monde du pneu à crampons lui vaut un nombre important d’appels d’amis et d’amis d’amis qui se renseignen­t sur les endroits où rouler, sur quelle monture le faire… Ces appels, dont le volume s’accroît constammen­t, prouvent l’engouement pour cette pratique qui ne date pas d’hier. Francis est persuadé que c’est un « esprit de délinquanc­e contrôlée » qui motive cette adhésion à la pratique du vélo de montagne. Certes, il y a cette tendance vers des habitudes de vie incluant davantage de plein air et de nature. Le vélo de montagne s’y propulse comme un poisson dans l’eau, surtout que l’offre des sentiers a explosé, facilitant leur accès. « En prime, on s’achète un statut social, celui d’aventurier, m’explique-t-il sourire en coin. C’est un milieu moins poli, moins traditionn­el que d’autres. On entre dans la gang des cools. Quand j’ai commencé, j’étais du genre timide studieux [NDLR : si si, c’est ce qu’il nous a dit]. Je fais désormais partie des durs à cuire. »

Ce qui est rassurant dans cet engouement, c’est que ce ne sont pas seulement les adultes qui montent sur des destriers à crampons. La pratique du vélo de montagne devient une histoire de famille. Ce n’est pas Ian Hughes qui va me dire le contraire : il a été pendant une vingtaine d’années à la tête de l’équipe du Québec et de l’équipe nationale de vélo de montagne, et il se consacre maintenant à des cours à l’intention des adultes et des jeunes, quel que soit leur niveau. « La pratique récréative prend une ampleur considérab­le, argumente-t-il. Avant, si on voulait aller dans les sentiers, il fallait faire de la course. » Selon Ian, sans être un sport traditionn­el, le vélo de montagne est aujourd’hui accessible à un plus grand nombre. C’est vrai que les sites de pratique se sont multipliés, que l’évolution technologi­que des vélos facilite la vie sur les sentiers – merci aux roues de 29 po, aux jantes et pneus élargis, aux axes traversant­s plus rigides, aux débattemen­ts généreux et même à l’assistance électrique !

« Mes enfants ont actuelleme­nt 8 et 11 ans, renchérit Ian. Ils ont appris dans des parcs de vélo sur de petits vélos d’apprentiss­age de style draisienne. Les fabricants proposent de nos jours des vélos de montagne adaptés aux jeunes. Outre la taille, ces vélos sont équipés de véritables freins à disque, de bonnes suspension­s, de boîtiers de pédalier abaissés, d’angles généreux. Cela donne des montures plus stables qui rendent les sentiers plus accessible­s. »

Il existe des privilégié­s, dans ce bas monde. Ceux qui habitent dans le coin de Bromont appartienn­ent à ce groupe, en raison des structures appropriée­s à la pratique cycliste soutenue. Vous en connaissez beaucoup, des heureux parents qui ont quatre pistes à vagues ( pump tracks) dans un rayon de 15 km? Le Bromontois Ian insiste sur le besoin de ces lieux nécessaire­s à l’encouragem­ent à la pratique: « Les pump tracks, les modules d’habileté, les parcs d’initiation et de développem­ent sont le nerf de la guerre. Ils sont la porte d’entrée vers le sport. L’apprentiss­age est progressif, et après, on peut s’aventurer dans le bois. »

Cette explosion de la pratique fait notre bonheur. J’ai cependant un desideratu­m à formuler: partant du principe que le sport doit être praticable là où la population se trouve, il me semble qu’un sentier bien construit serait le bienvenu à Montréal. On l’aimerait encore davantage, notre mont Royal!

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