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Olivia Baril et Charles-Étienne Chrétien : saisir sa chance

- par David Desjardins

En attendant que le monde reprenne un cours plus ou moins normal, la carrière de plusieurs jeunes talents est condamnée à errer dans les limbes. Charles-Étienne Chrétien et sa compagne, Olivia Baril, ont choisi de convertir cet impondérab­le en opportunit­é. Charles-Étienne nous a donné de leurs nouvelles. Pour des cyclistes doués comme Charles-Étienne Chrétien, la proverbial­e «fenêtre d’opportunit­é» permettant d’accéder à une carrière profession­nelle semble toutefois rétrécir à mesure que la pandémie, elle, s’étire dans le temps.

«Ça ne m’empêche pas de dormir», affirme celui qui a aligné plusieurs présences remarquées aux Championna­ts du monde de cyclisme sur route pour le Canada chez les juniors et les moins de 23 ans. « Je continue d’avancer dans la vie, mais je n’ai pas de contrat pour l’an prochain et c’est assez difficile d’envoyer ton CV à des équipes quand tu n’as rien à mettre dessus. »

Après une belle performanc­e au Sun Tour, à l’hiver 2020, la saison de l’espoir canadien de l’équipe Aevolo (auparavant chez Silber et Interpro) s’est arrêtée net. « J’ai rejoint le groupe en Californie pour un camp d’entraîneme­nt, puis je suis allé en Virginie. » La Terre a ensuite cessé de tourner, ou presque. « Je suis rentré chez moi, en Abitibi. Le père d’un ami y possède une entreprise d’arpentage. Il m’a formé et j’ai travaillé pour lui pendant l’été. Disons que j’ai roulé pas mal moins que prévu. »

CONTRE MAUVAISE FORTUNE…

Pendant ce temps, un plan pour la saison suivante s’est échafaudé avec sa copine, Olivia Baril, coureuse cycliste tout aussi prometteus­e, elle aussi frustrée d’une saison de compétitio­n mise à mal par la pandémie.

Le plan ? Partir vivre à San Sebastian, au Pays basque espagnol. Olivia pour y terminer son cours en ostéopathi­e. CharlesÉti­enne pour y poursuivre à distance ses études en gestion d’entreprise à HEC Montréal. Les deux croisant les doigts pour que se matérialis­e un semblant de saison européenne.

D’ici là, ils roulent, la tête haute. « C’est sûr que si je faisais du rouleau en Abitibi, la motivation serait faible, mais là, c’est tellement beau ici. Et je peux pédaler tout l’hiver en faisant beaucoup de volume, ce que je n’ai jamais vraiment expériment­é auparavant. Donc, mon problème consiste davantage à me retenir pour ne pas en faire trop. »

« Nous ne pouvons pas, Olivia et moi, nous entraîner souvent ensemble à cause de l’horaire de nos cours, poursuit celui qui a d’abord attiré l’attention au sein du programme I am Gold, mais nous avons fait un tour du Pays basque de 540 km en quatre jours pendant les Fêtes. Nous transporti­ons de gros sacs de selle de 20 litres, avec le minimum dedans. Ça nous a permis de parcourir des kilomètres tout en découvrant le coin. C’était magnifique. »

LE MODE VIRTUEL NE SUFFIT PAS

Au moment de l’entrevue, à la mi-janvier, Olivia s’apprêtait à rejoindre sa nouvelle équipe espagnole (Massi Tactic) pour un camp d’entraîneme­nt à Gérone, puis à faire une course à Valence, tandis que Charles-Étienne ignorait toujours à quoi ressembler­ait sa saison. «L’an dernier, mon équipe Aevolo avait un super beau programme européen. Là, nous attendons de savoir à quelles courses elle sera invitée… Mais plus encore, la question, c’est : est-ce que ces épreuves-là vont avoir lieu, ou non ? »

D’où la légère angoisse qui taraude ce rouleur polyvalent possédant aussi un solide punch et ne rechignant pas devant la grimpe, puisqu’il est le seul Canadien, sur quatre, à avoir rallié la ligne d’arrivée aux Mondiaux d’Innsbruck chez les U23 (remportés par un certain Marc Hirschi). Quant à sa performanc­e aux championna­ts du monde de vélo virtuel sur la plateforme Zwift, où lui et ses comparses canadiens ont vaillammen­t animé la course, Chrétien n’y voit pas une solution de rechange pour se faire voir par une équipe de haut calibre. «À la limite, si tu gagnes une étape dans une course comme le Tour of the Gila, aux États-Unis, t’as un peu de chance d’être repéré, mais sur Zwift, je n’y crois pas vraiment. »

Tous les compétiteu­rs vous le diront: chaque saison rajoute une couche de profondeur au talent préexistan­t d’un athlète. Aussi, selon Charles-Étienne Chrétien, le fossé se creuse toujours un peu plus entre les actuels pros et les aspirants à ce statut, pendant que les circuits de deuxième et de troisième divisions demeurent incertains.

Mais Charles-Étienne Chrétien n’attend pas que la vie l’amène dans sa roue jusqu’à l’arrivée. «J’étudie comme s’il n’allait pas y avoir de courses et je m’entraîne comme s’il allait y avoir une saison à plein temps. »

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