Les chemins de traverse : le Bas-du-Fleuve côté terre
L’arrière-pays de Trois-Pistoles regorge de chemins de traverse. De quoi donner le goût de s’éloigner un brin du littoral.
Jean-François Dionne est presque aussi bon cycliste que boulanger. Ce n’est pas peu dire: il lui suffit de quelques coups de pédale pour me larguer dans l’un des raidillons qui parsèment Les Basques, sa contrée d’adoption. Manifestement, mon vieux chum n’a rien perdu de sa forme physique, et ce, en dépit du fait qu’il se lève à 3 heures du mat’ pour pétrir et cuire le pain.
Personne ne lui tord le bras, remarquez. Avec sa copine, Geneviève Rioux, nutritionniste, le trentenaire a ouvert l’an dernier une boulangerie artisanale en plein coeur de Trois-Pistoles, à proximité de l’église de la ville, reconnaissable par ses cinq clochers. Son nom, qui trahit leurs champs d’intérêt respectifs: Ørigine – microboulangerie et bouffe de course.
Lors d’une tournée de ses nouvelles routes d’entraînement, le Néo-Pistolois m’a exposé les influences derrière ce jeune projet – produits de boulangerie inspirés des pays nordiques, ingrédients locaux, alimentation saine et durable... Mais avant tout, il m’a fait découvrir un territoire plus que propice à la pratique du gravel bike. C’est qu’à part les grands axes routiers comme la 132, véritable piste de course entre Trois-Pistoles et Le Bic
(un secteur de Rimouski), tous les chemins secondaires de l’hinterland sont en terre et en gravier fin.
Même la Route verte, dont la section locale se nomme Littoral basque, se roule mieux en vélo de garnotte que de route. À la hauteur de Saint-Simon-de-Rimouski, la route de Porc-Pic recèle d’ailleurs de superbes points de vue accessibles sur deux roues... à condition de savoir grimper de petites pentes raides ! Le belvédère Beaulieu, qui offre une vue imprenable sur le chenal maritime, vaut à lui seul le jus de mollet. Vous pouvez sans peine y consacrer une journée complète d’exploration, quitte à bifurquer ensuite vers Saint-Mathieu-deRioux pour allonger le trajet. Une cinquantaine de kilomètres en bonne compagnie !
UN CHÂTEAU DE CANETTES
Ce jour-là, à partir de Trois-Pistoles, nous obliquons plutôt en direction ouest vers la rivière presque homonyme, que nous remontons sur quelques bornes. Après l’avoir franchie à la hauteur du spectaculaire sault Mckenzie, nous débouchons sur la route Métayer. Bye bye l’asphalte, nous ne le reverrons que de manière épisodique au cours de la sortie.
Prochaine étape : le pont des Trois-Roches, par lequel nous retraversons la rivière des Trois Pistoles. J’ai une impression de déjà-vu. En effet, l’avant-veille, je suis passé dans les parages en compagnie d’Yvan Rioux, un autre solide rouleur pistolois. Ensemble, nous avions survolé les environs de Saint-Épiphane, Saint-François-Xavier-de-Viger et Saint-Paul-de-la-Croix.
Surtout, nous avions pris la politiquement incorrectement nommée route des Sauvages, un tronçon qui servait jadis de voie de portage entre le lac Témiscouata et le fleuve Saint-Laurent. Une stèle érigée en hommage aux membres de la Première Nation Malécite (maintenant Wolastoqiyik Wahsipekuk) qui empruntaient cette autoroute des temps anciens commémore justement ce fait historique. À pédaler lors des couleurs automnales.
À Saint-Jean-de-Dieu, Jean-François Dionne insiste pour que nous nous accordions une pause devant le château de canettes. «Le quoi?» articulé-je, l’air ahuri. Vous avez bien lu: à l’est de la municipalité se trouve une petite forteresse littéralement constituée de 27 927 contenants cylindriques. Ce lieu insolite est une création de Chanel Rousseau, qui fut un « pionnier » de l’art de la récupération. Eh bien.
Plus tard, nous mettons pied à terre à Saint-Mathieu-de-Rioux. Ici, pas de tourelle du Tupperware, mais plutôt un endroit de villégiature en pleine expansion situé autour du bucolique lac SaintMathieu, dont faire le tour sur deux roues n’est pas du temps perdu. Lors de cette boucle d’environ 20 bornes, on croise le parc du Mont-Saint-Mathieu, une montagne minuscule (à peine 222 m de dénivelé skiable), pour laquelle on entrevoit cependant un avenir brillant : on y prévoit dans les prochaines années l’aménagement de 45 km de sentiers de vélo de montagne. De toute évidence, il va falloir revenir.