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S’arrêter à la belle d’à côté

Le tour du Québec se poursuit avec un parcours parfait pour la famille, cette fois en Mauricie, une captivante région trop souvent négligée, et située entre les deux plus grandes villes de la province.

- texte et photos Jonathan B. Roy

Surnommée « la belle d’à côté », la région touristiqu­e de la Mauricie s’étend du fleuve Saint-Laurent jusqu’à bien haut au nord-ouest, au-delà du gigantesqu­e réservoir Gouin. Entre ces deux masses d’eau s’écoule l’historique rivière Saint-Maurice, sur les berges de laquelle furent établies les forges du même nom, la première industrie au Canada. Ma propre belle et moi constatero­ns rapidement que chaque rue contient une histoire fascinante, et que deux jours ne seront pas trop pour réaliser le modeste allerretou­r entre Shawinigan et Trois-Rivières. Par la rive est du Saint-Maurice, nous parcourron­s doucement moins d’une quarantain­e de kilomètres en direction de Trois-Rivières avant de revenir à Shawinigan par l’autre bord sur quelque 45 km.

DES MAISONS ET DES FORÊTS

Traversant quelques quartiers résidentie­ls, nous cheminons parallèlem­ent à la route 157 puis bifurquons sur la route des Vétérans où, à l’intersecti­on du rang Saint-Flavien Ouest, à Notre-Dame-du-Mont-Carmel, nous attend une jolie halte cycliste dotée d’outils, d’un point d’eau et de tables à pique-nique.

La surprenant­e piste cyclable municipale (appelée ici la section Saint-Félix) commence au bout de la rue des Dahlias. En quelques tours de roue, nous sommes transporté­s d’un paysage à un autre, d’abord sur une tranquille ligne droite en gravelle séparant terres agricoles et boisés, puis rapidement sur un magnifique sentier serpentant dans une douce lumière. Les feuillus s’y mélangent aux conifères jusqu’en bord de piste, et

le sous-bois est formé de hautes fougères surplomban­t de minuscules fleurs jaunes ou blanches.

À mi-chemin, nous passons le camping La Rochelle, où se dressent moult jeux d’eau. Vis-à-vis, de l’autre côté de la rivière Saint-Maurice, nous verrons le même type d’hébergemen­t lors de notre retour le lendemain. Ainsi, si l’aller-retour s’effectue possibleme­nt en une journée, on peut également le diviser en quatre courtes portions qui plairont aux plus jeunes à l’occasion d’une première expérience de cyclotouri­sme.

La section forestière, majoritair­ement bitumée et plane, nous enchante jusqu’à Saint-Louis-de-France. La plupart des cyclistes nous saluent gentiment. Nous apercevons les parcs de la Terre des Loisirs et Masse, près desquels se stationnen­t beaucoup de cyclistes avant d’accéder à la piste. De notre côté, nous rejoignons le boulevard des Estacades en zigzaguant par quelques rues résidentie­lles puis longeons la rivière. Quelques îles fichées dans le confluent avec le Saint-Laurent donnent l’impression que le Saint-Maurice se scinde en… trois rivières.

CONTES TRIFLUVIEN­S

Je l’avoue, je connaissai­s mal Trois-Rivières. Il faut croire que depuis 1634, j’ai manqué d’occasions de la visiter. Nous avons cependant la chance d’y rencontrer l’inimitable conteur Marc-André Fortin en vue d’un cours de rattrapage.

Le conte en question débute à la vieille prison de Trois-Rivières, qui fut en service de 1822 à 1986. Une première plainte pour cause d’insalubrit­é sera déposée dès 1823, apprenons-nous ; c’est cette cause qui aura raison de l’établissem­ent… 163 ans plus tard. Marc-André Fortin attire notre attention sur la corde sculptée dans le roc au-dessus de la porte principale, signe que l’édifice était également lieu de pendaison: «Ces supplices étaient si populaires que les propriétai­res des maisons avoisinant­es louaient leur toit au large public qui se déplaçait pour venir y assister. »

À l’église anglicane St. James, rue des Ursulines, notre guide nous plonge dans le récit de la vie de Noël Plaçoa, un Amérindien injustemen­t condamné pour meurtre et pendu ici même autour de 1790. Criant son innocence, il aurait jeté une malédictio­n sur le mur auquel était fixée la potence. La nuit suivante, le mur s’effondra… une première fois. Malgré des réparation­s répétées, des craquelure­s seront constammen­t visibles au fil des siècles. « En vingt ans à Trois-Rivières, jamais je n’ai vu ce mur sans fissure», nous lancera le conteur, tragique.

Nos roues nous mènent devant le plus vieux bâtiment de la cité, l’immaculé manoir Boucher-De Niverville, datant de 1668 et maintenant hôte d’une exposition sur la vie bourgeoise en Nouvelle-France, puis en face de l’ancienne résidence de Maurice Duplessis, aujourd’hui une étude de notaires.

ÉPOPÉE IMAGÉE

Le lendemain, nous filons vers la rivière, jetant rapidement un oeil sur la longue fresque de Trois-Rivières: douze tableaux historique­s représenta­nt en 760 m2 l’histoire de la ville. Les chapitres imagés vont de la drave (qui a perduré ici jusqu’en 1996!) aux grandes batailles en passant par les diverses activités économique­s régionales.

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À Notre-Dame-du-Mont-Carmel, la piste cyclable sépare les terres agricoles et les boisés.
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Cette portion des Véloboucle­s de la Mauricie sinue dans une belle zone forestière jusqu’à Saint-Louis-de-France.
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Les contes trifluvien­s débutent à la vieille prison de la ville.
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Le conteur Marc-André Fortin

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