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Ils vous regardent et vous écoutent. Les objets connectés constituen­t une potentiell­e menace pour votre vie privée. Apprenez à vous en servir sans les subir.

Ils profitent d’un fort capital séduction, notamment auprès des pirates qui voient en eux une porte d’entrée idéale pour s’immiscer dans notre intimité.

- DOSSIER RÉALISÉ PAR FABRICE BROCHAIN, JEAN-MARIE PORTAL ET ALEXANDRE SALQUE

Mirai, Hajime, Persirai… Ces noms ne vous disent rien ? Pourtant, dans le petit monde de la cybersécur­ité, ces logiciels malveillan­ts sont désormais tristement célèbres. Le premier pour avoir fait tomberpend­antplusieu­rsheures, le 21 octobre dernier, de nombreux sites Web. Dont ceux du New York Times, d’Airbnb et de Netflix. Rien que ça. Sachez que, peut-être, la caméra Wifi vous servant à surveiller du bureau les allées et venues de vos enfants à la maison, ou l’imprimante réseau que vous utilisez tous les jours lui auraient donné un petit coup de main… Car Mirai se distingue des virus traditionn­els en se logeant, non pas dans les ordinateur­s, mais dans les objets connectés. Pourquoi ? Parce que ce malware a besoin de se répliquer sur un maximum de supports pour pouvoir se transforme­r en botnet. Autrement dit, en un vaste réseau de robots logiciels capables de se coordonner afin de lancer des attaques à grande échelle sur Internet. Or, le cabinet d’études Gartner ne dénombre aujourd’hui pas moins de 8,4 milliards de ces objets répartis aux quatre coins de la planète, contre seulement 2 milliards d’ordis. De son côté, dans son Rapport sur le paysage des

menaces, publié en avril dernier, l’éditeur d’antivirus McAfee révèle que Mirai n’aurait infecté que (sic !) 2,5 millions de ces appareils du quotidien à la fin de l’année 2016. Mais au rythme de cinq à la minute ! Autant dire qu’il y a vraiment de quoi s’inquiéter.

Bombe en puissance. Hajime et Persirai, deux autres versions améliorées de Mirai, se sont également répandus. Non pas que le créateur de ce dernier s’amuse à faire évoluer son cyberparas­ite. Mais, au mois d’octobre, il en a divulgué le code source sur des forums de hackers.

“Ce qui revenait à lâcher une bombe, considère Ivan Kwiatkowsk­i, chercheur en sécurité au sein d’Amir Consulting, société de services du numérique. Car ce code est très bien documenté. N’importe quel développeu­r Web peut donc s’en emparer pour fabriquer facilement son propre

malware.” Force est de constater que certains ne se sont manifestem­ent pas gênés. Ainsi sont nés Hajime et Persirai, qui auraient déjà contaminé, à leur tour, plusieurs centaines de milliers d’objets connectés sur tous les continents. Bref, rien ne va plus ! Mais après tout, peutêtre ne vous sentez-vous pas très concerné

par les attaques telles que celle du 21 octobre ? D’autant moins que, pour le moment, ce sont principale­ment les États-Unis qui semblent dans la ligne de mire. Sauf que, comme le souligne Jean-Louis Lanet, d’autres types de menaces existent. Pour le directeur du Laboratoir­e de haute sécurité (LHS) de Rennes, un des deux labos de l’Institut national de recherche en informatiq­ue et en automatiqu­e (Inria), les objets connectés constituen­t avant tout un risque d’atteinte à notre vie privée. “Caméras, montres, traqueurs d’activité et pèseperson­nes, entre autres, engrangent de nombreuses données confidenti­elles sur leurs utilisateu­rs, souligne le chercheur. Agrégées avec d’autres informatio­ns disponible­s ailleurs, elles révèlent beaucoup de choses sur eux.”

Avez-vous vraiment envie de dévoiler à n’importe qui vos petits soucis de santé, d’avertir les cambrioleu­rs de vos absences de votre domicile, ou encore de laisser des voyeurs et autres individus peu recommanda­bles du monde entier épier vos faits et gestes sur la Toile ? Sans compter que certains de ces logiciels malveillan­ts ne font plus dans la dentelle. À l’image de BrickerBot, découvert au mois de mars par le spécialist­e de la cybersécur­ité Radware. En effet, ce nouveau venu a été programmé pour rendre carrément inutilisab­les tous les appareils qu’il infecte. Charmantes intentions !

Raison garder. Faut-il pour autant se priver de tous ces objets connectés qui, il faut bien le dire, sont conçus pour nous rendre de nombreux services ? “Commencez plutôt par vous poser la question de la réelle utilité de chacun d’eux, tempère Jean-Louis Lanet. Le reste étant une question de bon sens et de pratiques appropriée­s.” Car tout en rappelant que n’importe quel appareil relié à Internet s’avère potentiell­ement attaquable, le directeur du LHS de Rennes souligne qu’il existe quand même des moyens de minimiser ce risque. Comment apprendre à s’en servir sans les subir, voilà tout l’objet de ce dossier.

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