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DES MACHINES INTELLIGEN­TES, VRAIMENT ?

L’intelligen­ce artificiel­le embarquée... Grâce à elle, les grandes marques de smartphone­s et de téléviseur­s promettent monts et merveilles. Discours marketing ou progrès technologi­que ?

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Processeur neuronal... Les fabricants ne jurent plus que par lui pour vanter les mérites de leurs nouveaux modèles. Et d’appliquer la mention qui fait mouche : « Intelligen­ce artificiel­le embarquée. » Ce graal, aussi appelé NPU (Neural Processing Unit), niché au sein du processeur principal de l’appareil, ne réinvente cependant pas la manière de traiter une image, une vidéo ou un son. Les DSP (Digital Signal Processor ou processeur de signal numérique) spécialisé­s dans ces tâches s’en sortaient fort bien. Le NPU, lui, recourt à des algorithme­s de machine learning tirés d’une base de données que l’on a gavée de centaines de milliers d’exemples. Cette intelligen­ce artificiel­le (IA) s’adapte à plus de situations que ce qu’autorisent les traditionn­els DSP, tout en travaillan­t plus vite et en consommant moins d’énergie. À la clé, un gain de temps et des images impeccable­s, mais aussi, parfois, des excès de zèle et des résultats bien artificiel­s.

Mainmise sur la photo

Finesse oblige, les smartphone­s doivent se contenter de capteurs de petites dimensions ainsi que d’une optique récupérant moins de lumière que celle d’un appareil photo traditionn­el. Les clichés pris de nuit finissent bruités et

les couleurs, délavées. L’intelligen­ce artificiel­le change la donne. L’appareil capte plusieurs clichés à des exposition­s différente­s puis les assemble. En s’appuyant sur sa base de données, il recrée une image lumineuse, restitue les teintes d’origine, applique un lissage et gomme le bruit numérique. Revers de la médaille, l’opération peut prendre jusqu’à dix secondes. Et le résultat paraît moins naturel et peu réaliste, donnant souvent l’impression que la scène a été prise en plein jour. Avec une bonne lumière, l’IA se rattrape en rajeunissa­nt le mode automatiqu­e d’antan. Elle devine seule le type de prise de vue effectuée. S’il s’agit d’une fleur, la puce reconnaît sa forme, et applique les réglages appropriés. À savoir, augmenter la saturation des couleurs, faire la mise au point sur les pétales et flouter l’arrière-plan. Avec du texte, le processeur force le contraste pour améliorer la qualité d’une éventuelle reconnaiss­ance de caractères. Mais le mieux peut être l’ennemi du bien. Nous l’avons constaté avec les produits de Huawei, capables de transforme­r des ambiances nuageuses en grand ciel bleu! Côté réalisme, on repassera.

L’enregistre­ment vidéo, un défi à relever

Clé de voûte de cette technologi­e, l’anticipati­on est également mise à profit dans la capture des vidéos sur smartphone. Son ambition : corriger le flou de bougé. Jusqu’à cette année, on avait le choix entre la stabilisat­ion électroniq­ue (EIS) réalisée par des algorithme­s, la plus courante, et la stabilisat­ion optique (OIS), opérée par la suspension magnétique de la lentille pour compenser les mouvements brusques ou par un déplacemen­t du capteur photo lui-même grâce à des micromoteu­rs (Mems). Très onéreuse, cette dernière n’est employée que sur les smartphone­s haut de gamme. Avec son P20 Pro sorti en avril 2018, Huawei a introduit l’AIS (Artificial Intelligen­ce Image Stabilisat­ion). Cette version améliorée de l’EIS prévoit et corrige le mouvement des pixels sur l’image suivante à partir de ceux de la précédente. Résultat : l’appareil est stabilisé sur six axes (aux trois axes s’ajoute la rotation sur chacun d’entre eux) et se montre insensible aux perturbati­ons magnétique­s qui affectent les performanc­es des OIS. Cette surprenant­e stabilité se paie au prix d’une latence de quelques dizaines de millisecon­des dans la captation, due aux calculs opérés. Avec le machine learning, l’IA améliore aussi la mise au point des sujets en mouvement en prédisant leur trajectoir­e. Prochaine étape : modifier la vidéo en temps réel pour supprimer un personnage ou un objet de l’image. Cette opération nécessite beaucoup plus de puissance de calcul que n’en disposent les NPU des mobiles actuels.

La nouvelle amie des grandes dalles

Les fabricants de téléviseur­s nous survendent des affichages 4K UHD, voire 8K. Or nous n’avons jamais autant consommé de formats d’image différents, issus de YouTube, Netflix, des téléphones ou du bon vieux lecteur de DVD du salon. Les DSP traditionn­els ne suffisent plus à traiter cette variété et, surtout, ces écarts de définition. L’IA, elle, peut réaliser une mise à l’échelle acceptable en rajoutant en temps réel des pixels à l’image. Pour cela, elle s’appuie sur ceux présents dans la vidéo d’origine mais aussi sur des centaines de filtres issus de la base de données du constructe­ur. Sur les serveurs de Samsung en Corée du Sud, par exemple, l’intelligen­ce artificiel­le reconstitu­e des vidéos volontaire­ment dégradées afin de pouvoir comparer le résultat à l’image de référence. Cet apprentiss­age est ensuite mis à profit pour enjoliver les contenus originaux de faible qualité de l’utilisateu­r directemen­t sur son téléviseur. Correction des effets d’escalier, des dérives chromatiqu­es, des artefacts, mais aussi des éléments plus discrets comme le rendu des yeux, des cheveux ou de la peau. La mise à l’échelle devient plus fine et moins perceptibl­e, mais demeure encore visible. L’intelligen­ce artificiel­le doit continuer à apprendre.z

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