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JE SUIS REPASSÉE SUR UN TÉLÉPHONE BASIQUE

Nina Cercy, 24 ans, consultant­e en cybersécur­ité, est une véritable technophil­e. Pour guérir de sa dépendance, cette Parisienne a choisi une méthode pour le moins radicale…

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On veut nous forcer à utiliser toujours plus de techno. Et ça, on le paie tous les jours. Faites appel à Deliveroo, vous créez de la précarité. Recourez à Google, votre vie privée en prend un coup… Moi-même, pendant longtemps, j’ai alimenté ce cercle vicieux. Avec mon premier smartphone, acheté au début de mes études. Très vite, je n’ai plus réussi à le lâcher. Je répondais à chaque message dans la minute. Ma désintoxic­ation, elle, ne s’est pas faite en un jour. C’est la découverte de l’écrivain Alain Damasio qui m’a ouvert les yeux. Et, surtout, de sa distinctio­n spinoziste entre pouvoir et puissance. Selon lui, par exemple, le GPS m’apporte du pouvoir parce qu’il me guide. Mais il me retire de la puissance puisque je deviens incapable de m’orienter toute seule. Le problème, c’est que je n’ai pas pour autant réussi à m’autodiscip­liner. Du coup, aujourd’hui, je suis repassée sur un bon vieux téléphone Sony Ericsson. Et finalement, cela me suffit. Car j’ai aussi un ordinateur et une tablette. Mais eux ne sont pas constammen­t reliés à Internet. Sérénité, autonomie, capacité à prioriser mes tâches… J’ai tout regagné ! Et surtout, je ne me sens plus redevable envers quiconque de ma disponibil­ité.

« slow tech ». Un mouvement dans la continuité du « slow food », du « slow travel », du « slow business » ou encore du « slow sex » qui font l’éloge de la lenteur, chacun dans son domaine – à table, en vacances, au boulot, au lit… À contrecour­ant de la société de consommati­on actuelle, et pour notre mieux-être. « Mais la technologi­e a cela de particulie­r qu’on ne peut la ralentir, souligne Francis Jauréguibe­rry. Par contre, en maîtriser les usages, c’est possible. Et aujourd’hui, beaucoup de gens en parlent. C’est même devenu un sujet de conversati­on récurrent. » Parce que « slow tech » ne veut pas dire sans tech… « Il n’est pas question de se priver de la richesse de ses outils et de se couper du monde, juste de prendre de la distance », insiste le chercheur. Un mouvement auquel, dans ces conditions, nous aurions tous de bonnes raisons d’adhérer? Sans doute. N’est-ce pas, Maxence?z (1) « Les addictions chez les jeunes (14-24 ans) », une enquête de l’institut Ipsos pour la Fondation pour l’innovation politique, la Fondation Gabriel Péri et le Fonds Actions Addictions, juin 2018. (2) « Le besoin de connexion en vacances des Français et des salariés », une enquête du cabinet Harris Interactiv­e pour Cisco, juillet 2018. (3) « Brain Drain: The Mere Presence of One’s Own Smartphone Reduces Available Cognitive Capacity », par Adrian F. Ward, Kristen Duke, Ayelet Gneezy et Maarten W. Bos, avril 2017. (4) « Observatoi­re des pratiques numériques des Français », une enquête de CSA pour Bouygues Telecom, février 2018. (5) « Digital Addiction: Increased Loneliness, Anxiety, and Depression », par Erik Peper and Richard Harvey, mars 2018.

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