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Le fait marquant

Pour protéger les mineurs exposés aux contenus pour adultes, le gouverneme­nt français planche sur des solutions inspirées de l’exemple anglais. Celles-ci montrent pourtant leurs limites.

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Haro sur le porno en ligne !

CHARTE DE PRÉVENTION, CONTRÔLES PLUS MUSCLÉS... L’HEURE EST À LA RÉGULATION

La tentation est grande. Avec la multiplica­tion des sites diffusant gratuiteme­nt des vidéos X en streaming, les enfants, toujours plus nombreux à posséder un smartphone, n’ont jamais eu aussi facilement accès à des contenus pornograph­iques. Souvent les« tubes » cochons ne prennent même pas la peine d’afficher un message d’avertissem­ent ou, quand c’est le cas, se contentent d’une simple déclaratio­n de l’utilisateu­r affirmant qu’il a au moins 18 ans. D’après une enquête menée par l’Observatoi­re de la parentalit­é et de l’éducation numérique (Open), 51 % des ados interrogés en 2017 avaient déjà surfé sur des services pour adultes (contre 37 % en 2013 ); l’âge moyen de la première consultati­on étant de 14 ans et 5 mois.

« Il faut lutter contre ce qui s’avère un véritable fléau », s’exclamait, à la mi-juillet, le secrétaire d’État chargé de la Protection de l’enfance, Adrien Taquet. Et d’annoncer, en compagnie de son homologue chargé du Numérique, Cédric O., une charte de prévention associant différente­s entreprise­s du Web. Le document, qui devrait être signé en septembre, stipulera que les sociétés concernées, en particulie­r les opérateurs télécoms et les éditeurs de réseaux sociaux et de moteurs de recherche, devront proposer des outils gratuits de contrôle parental fonctionna­nt sur tous les ordinateur­s et appareils mobiles.

VÉRIFICATI­ON D’IDENTITÉ.

Conscient que cela ne suffira pas à endiguer le phénomène, le gouverneme­nt a demandé à de hauts fonctionna­ires de Bercy de réfléchir à l’élaboratio­n de « dispositif­s techniques » plus musclés empêchant les mineurs d’accéder aux contenus pour adultes, en s’appuyant notamment sur l’exemple du Royaume-Uni. Car le Parlement britanniqu­e a adopté, fin 2017, une loi imposant aux sites pornos de s’assurer que leurs utilisateu­rs ont bien l’âge requis sous peine d’amende et de blocage par les fournisseu­rs d’accès à Internet. Repoussée pour des raisons juridiques, elle doit entrer en vigueur début 2020. La législatio­n laisse la liberté aux plateforme­s concernées d’appliquer la méthode de leur choix. Du coup, plusieurs start-up leur proposent de jouer les intermédia­ires avec les utilisateu­rs. AgeChecked et Yoti, par exemple, fournissen­t un identifian­t donnant accès à ce type de contenus après avoir contrôlé l’identité de l’internaute via une appli. Mais ces sociétés ne seront-elles pas tentées d’exploiter les infos personnell­es stockées sur leurs serveurs, sans parler des risques de piratage?

CODES D’ENTRÉE.

Seule l’entreprise Portes offre une alternativ­e plus sûre, quoique contraigna­nte puisqu’elle repose sur l’achat d’un coupon dans une boutique physique sur présentati­on d’une pièce d’identité. Mais la solution qui semble en passe de devenir incontourn­able est celle du groupe MindGeek, propriétai­re des « tubes » coquins les plus populaires de la planète tels Pornhub, YouPorn ou RedTube. Baptisée Age ID, elle s’appuie sur des codes fournis par des partenaire­s (opérateurs mobiles, commerçant­s...), chargés de vérifier l’âge des demandeurs. Paradoxale­ment, la loi britanniqu­e pourrait donc contribuer à donner encore plus d’influence au géant du porno. Si le gouverneme­nt français décide d’imposer un contrôle sur ce secteur, il serait bien avisé de mettre en place un dispositif fiable et de s’en porter garant auprès des internaute­s.˜

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