En 2020, la tech a rendez-vous avec le vintage
Quatre-vingt-quinze ans que l‘Internationale Funkausstellung, plus connu sous son sigle IFA, dévoile le futur technologique. Cette année, priorité est donnée aux valeurs sûres.
Ça se bouscule dans les allées. Ça hurle dans les haut-parleurs. Ça racole au pied des stands. Ça éblouit avec des écrans démesurés. Il y flotte une odeur douceâtre de plastique chaud et de bretzels. Bienvenue à l’IFA, le grand salon européen consacré à la tech qui se tient chaque année à Berlin. S’il occupe un espace plus modeste que son équivalent américain, le Consumer Electronics Show (CES), il se veut aussi moins tape-à-l’oeil et moins superficiel. L’événement, qui peut se targuer d’avoir confié son inauguration à Albert Einstein en 1930, se drape en 2019 d’un voile de nostalgie, tout en retournant vers les valeurs sûres. À défaut d’essayer de vendre des évolutions technologiques qui peinent à séduire par manque de réelles innovations, nombre de constructeurs présents se sont rabattus sur ce qui saute immédiatement aux yeux : le design. Ainsi, même s’il demeure massivement utilisé, le plastique noir cède peu à peu sa place à des matières plus nobles telles que le bois, l’aluminium, l’acier. Surtout, les formes tirent majoritairement leur inspiration de l’école du Bauhaus, mettant en avant simplicité, élégance épurée et fonctionnalisme. Appareils rectangulaires, lignes sobres, boutons proéminents ou en bas-relief, mais à l’usage immédiatement identifiable... Quels que soient les stands que nous avons pu visiter, l’esprit de ce courant artistique – lequel, coïncidence, fête ses 100 ans à quelques kilomètres de là, avec l’exposition Original Bauhaus – semblait bel et bien habiter les concepteurs. La preuve la plus flagrante? Le retour de Braun Audio. Après pratiquement trois décennies de sommeil, c’est avec un modèle d’enceinte directement inspiré de celle conçue par Dieter Rams en 1959 que la marque allemande se remet en selle.
LA QUALITÉ, PAS LA QUANTITÉ. Dans une interview accordée en 2017 à Kinfolk, magazine danois dédié aux professionnels de la création, le même Dieter Rams, à la tête du design de Braun de 1961 à 1995 et influencé par l’école de Walter Gropius, indiquait : « J’ai toujours eu tendance à comprendre cette discussion sur la beauté et à plaider pour un design aussi réduit, clair et orienté utilisateur que possible, et simplement plus supportable plus longtemps. » Un credo repris par nombre de fabricants, dans tous les domaines (audio, vidéo...), y compris dans celui de la téléphonie mobile. Ne reste plus qu’à appliquer l’autre précepte de Dieter Rams soutenant la durabilité de nos appareils. « Nous devons vraiment nous demander très attentivement si nous avons constamment besoin de nouvelles choses, précisait-il encore à Kinfolk. Cela fait longtemps que je plaide pour le "moins, mais mieux". » Pas sûr que les exposants du salon de Berlin se plient aisément à l’exercice.