Se soigner autrement grâce aux médecines douces numériques
Vous êtes anxieux, stressé, insomniaque, dépressif ? Plutôt que de recourir aux médocs, essayez donc les médecines douces numériques. Fermez les yeux et laissez-vous porter par Petit Bambou ou Dreem 2.
« Bonjour. » La voix féminine est engageante. « Installez-vous dans un endroit calme où vous ne serez pas dérangé. Soyez ouvert au présent et persévérez avec bienveillance à votre égard. » Le ton est rassurant. « Asseyez-vous confortablement sur une chaise ou en tailleur sur le sol. » Écouteurs aux oreilles, vous voilà embarqué pour une dizaine de minutes de méditation en compagnie de Petit BamBou.
Cette appli de médecine douce aide à développer sa pensée, gérer ses émotions et déstresser. La méthode repose sur des séances autonomes, guidées ou libres, avec de petites vidéos animées et des ambiances sonores. Après son burn-out, Clotilde Nicolay-Servant (lire encadré p. 29), ancienne spécialiste du développement économique des territoires, a pris conscience de son hypersensibilité et Petit BamBou l’a aidée à reprendre pied.
Elle aurait cependant tout aussi bien pu méditer avec Pause, Serenity, Namatata, Zenfie ou encore Mindful Attitude. D’autant que cette dernière est justement pensée spécifiquement pour les cadres d’entreprise. Pour aller plus loin, d’autres, comme Nathalie Mendy (lire encadré p. 30), font appel à Melomind, un casque audio Bluetooth avec quatre électrodes sèches sur la partie arrière. Conçu par des chercheurs en neurosciences, il capte les ondes alpha émises par le cerveau, les analyse et renvoie des signaux sonores censés aider l’utilisateur à travailler son mental, muscler son esprit, se relaxer, soigner son stress ou son anxiété (neurofeedback).
Approche quantique versus pharmacopée
Mais une fois relaxé, il reste parfois à retrouver le sommeil. Auguste, 30 ans, auditeur financier dans un grand cabinet à Paris, a pour cela fait appel à Dreem. Porté la nuit, ce bandeau de 120 grammes abrite neuf capteurs qui enregistrent son activité cérébrale, sa respiration, son rythme cardiaque et ses mouvements. Ces informations sont transmises à une application qui les décompose en phases de sommeil ou d’éveil. Un algorithme identifie ensuite le niveau et la fréquence des insomnies, comme le ferait un appareil clinique complexe exploité par un spécialiste du sommeil. « Au début, le bandeau a évalué mon index de sévérité de l’insomnie à 21 sur 26 », se souvient-il. Les somnologues de Dreem lui ont alors proposé, au téléphone, une thérapie cognitive et comportementale censée l’aider à mieux dormir. «Au bout de quarante-cinq jours, les résultats m’ont surpris: j’ai effectivement retrouvé un sommeil réparateur et, surtout, moins d’appréhension à me coucher.»
Insomnie, stress, burn-out… Les médecins traditionnels sont souvent
peu sensibles aux troubles cognitifs. Si quelques conseils sur l’hygiène de vie ne marchent pas, ils passent très vite à la pharmacopée. C’est pour éviter ces traitements chimiques invasifs que de plus en plus d’adeptes se tournent vers les médecines douces ou alternatives. Résultat : les praticiens en neurofeedback, en psychologie, en médecine chinoise ou même quantique se multiplient.
Cependant, peu d’entre eux font appel à l’informatique, à l’électronique ou aux objets connectés. C’est pourtant la voie choisie par ■■■
■■■ quelques-uns, comme Dominique Pelca (lire encadré p. 31). Les séances de neurofeedback de cette excadre hospitalier reposent sur un logiciel couplé à un électroencéphalogramme, qui lui permet de traiter les symptômes de nombreux troubles physiques, cognitifs et émotionnels, parfois graves.
De son côté Laurent Guiraud, psychopraticien en technique de libération émotionnelle à Vézénobres, dans le Gard, pratique l’hypnose ericksonienne (du psychiatre américain Milton H. Erickson, qui plonge dans l’inconscient du patient), la réflexologie (chaque fonction repose sur un point dans les pieds ou les mains) et les fleurs de Bach (des elixirs floraux supposés rétablir l’équilibre émotionnel). Avant chaque séance, il fait appel à son logiciel, Consult. À travers une batterie de questionnaires, il explore et qualifie les addictions (tests de Horn ou de Fagerström), évalue le stress (test de Holmes-Rahe), étudie la sensibilité sensorielle (test Vakog) ou encore mesure le niveau de dépression (inventaire de Beck) ou de burn-out (test de Maslach) de ses patients. «Cela permet de signaler des troubles graves nécessitants une orientation clinique en médecine traditionnelle », explique-t-il. Selon lui, les patients réagissent très bien à ce type d’approche numérique qui mesure leurs maux et engage une relation de confiance.
La technologie ne remplace pas les échanges humains
Manuel Sperling, qui pratique la médecine quantique, propose peut-être le système numérique le plus surprenant. Genius Insight, l’appli qu’il utilise – et vend très cher (990 €) au tout-venant –
utilise des moyens non invasifs (analyse de la voix, de la physionomie…) afin d’évaluer toute une série de paramètres physiologiques et corriger les déséquilibres par la biorésonance.
Autrement dit, son dispositif agit sur l’activité électrique de l’organisme en lui envoyant des ondes de fréquence qui interfèrent avec celles de ses cellules, diffusées via un casque ou des électrodes. « C’est une véritable boîte noire qui propose un traitement autonome pour éteindre des inconforts simples, reconnaît Manuel Sperling. Mais le recours à un praticien spécialisé devient vite indispensable dès qu’il convient d’étudier finement un profil et, surtout, d’identifier la cause qui génère un mal persistant. »
Comme pour toutes les médecines alternatives – usant ou pas du digital –, certains y croient, d’autres sont
sceptiques. Il faut dire que Genius Insight n’hésite pas à prétendre protéger aussi des virus ! Mais si ça ne fait pas de mal, où est le problème ? Une question qui n’est pas sans rappeler les virulents débats autour de l’homéopathie.
L’enjeu est ailleurs, estime néanmoins Solange Arnaud, la patronne du site Medoucine, un équivalent de Doctolib qui sélectionne les praticiens alternatifs les plus sérieux. « Les personnes qui font appel à leurs services viennent surtout pour être écoutées. Elles attendent des pratiques douces de la bienveillance et du calme », affirme-t-elle. Pas sûr, donc, que leurs partisans se contentent de se retrouver uniquement face à un ordinateur, une application ou un objet connecté qui répondrait de façon standardisée.z