Ce qui se trame dans les labos
Reposant sur un algorithme d’apprentissage automatique, le modèle TranSEC prédit l’impact d’un incident de la circulation sur le trafic routier d’une grande métropole.
- Pronostiquer les embouteillages. - Retrouver l’acoustique de Notre-Dame. - Une IA ingénieure en robotique.
C’est l’effet papillon. Un accident impliquant un véhicule et un scooter vient de se produire sur la bretelle d’accès au périphérique, bloquant les deux voies. Alors que le trafic s’intensifie en cette fin d’après-midi, les conséquences d’un tel événement vont se manifester bien au-delà de la zone du sinistre. Certes, les modèles actuels sont capables de prédire assez justement les perturbations que ce type d’incident engendre sur les grands axes de circulation, et de renseigner en temps réel les automobilistes via les panneaux de signalisation. Mais ils ne peuvent anticiper les conséquences d’un sinistre qui se produirait, par exemple, en plein centre-ville.
Les applis participatives pour smartphone, comme Waze ou Google Maps, sont, dans ce cas, d’une aide précieuse puisqu’elles calculent le trajet en tenant compte des données transmises par les usagers. Le problème, c’est que les itinéraires autres proposés en cas de bouchon orientent souvent un grand nombre d’automobilistes vers des zones incapables de soutenir un tel trafic, provoquant de nouveaux points de blocage. Ce qu’il faudrait, c’est un outil capable d’analyser l’ensemble des données fournies à la fois par les capteurs disséminés dans le paysage urbain, et par les véhicules en mouvement, de manière à supprimer l’incertitude liée aux événements aléatoires.
Eh bien, c’est exactement ce que les ingénieurs du Pacific Northwest National Laboratory (PNNL, le département de
l’Énergie des États-Unis) sont parvenus à concevoir. Baptisé TranSEC, pour Transportation State Estimation Capability, leur programme évalue avec précision les conséquences d’une perturbation sur l’ensemble du trafic de la métropole de Los Angeles, soit une superficie de 3800 km²! Pour comparaison, l’agglomération de Paris couvre «seulement» 2850 km². La bonne idée de TranSEC, c’est d’agréger la totalité des données de navigation transmises en temps réel par les chauffeurs
Uber à celles provenant de l’ensemble des capteurs répartis dans la métropole. Disponibles gratuitement, les informations transmises par le service Uber Mouvement renseignent sur la vitesse, les trajets et les temps de parcours de tous les véhicules du réseau. Mais ce qui rend TranSEC aussi efficace, c’est son algorithme d’apprentissage automatique, qui s’améliore à mesure que de nouvelles données lui sont transmises.
UN MODÈLE FACILEMENT TRANSPOSABLE.
Épaulé par un supercalculateur du PNNL, TranSEC a ainsi permis de réduire de quelques heures à une poignée de minutes le temps nécessaire au calcul de l’évolution du trafic à Los Angeles après un accident. Des informations précieuses pour comprendre la façon dont se forment les bouchons et imaginer des aménagements urbains permettant de réduire leur incidence.
L’autre atout de TranSEC, c’est qu’il est très facilement adaptable à n’importe quelle grande ville, du moment que des chauffeurs Uber y circulent. D’après les concepteurs, le modèle peut même être complété par l’ajout d’événements météorologiques (pluie, neige, brouillard) susceptibles de perturber la circulation. De même, le modèle est adaptable au trafic estimé. Si un supercalculateur est nécessaire pour gérer la circulation d’une métropole comme Los Angeles, les ingénieurs indiquent qu’un PC de bureau suffit pour faire tourner un modèle destiné au suivi du trafic de grands axes routiers ou autoroutes.