Dans les coulisses connectées de la Grande Boucle
Cette année encore, pour que les 40 millions de téléspectateurs du Tour de France se retrouvent au coeur de l’action, Amaury Sport Organisation et France Télévisions ont déployé un véritable arsenal technologique.
Le 26 juin sonnait le début de la grand-messe du cyclisme, le 108e Tour de France. Au départ de Brest, des cyclistes du monde entier sont partis à la conquête de la compétition reine. Ce mercredi 7 juillet, ils relient Sorgues à Malaucène pour une onzième étape 100 % vauclusienne. Les athlètes y retrouveront une légende de la Grande Boucle, le Mont Ventoux. Mais avant cela, alors qu’il ne fait pas encore jour, les équipes techniques les précèdent, s’agitant de toute part pour garantir que le spectacle soit aussi au rendezvous. Bienvenue dans les coulisses technologiques de la Grande Boucle!
Un traceur sous chaque selle
À quoi s’affairent les techniciens à une heure si matinale? D’abord, ils s’assurent du bon fonctionnement des dispositifs de télécommunications. Car, fort d’un partenariat avec l’opérateur Orange, Amaury Sport Organisation (ASO), la société organisatrice du Tour, bénéficie chaque
jour d’un raccordement à une fibre qui lui est exclusivement réservée. « Elle permet aux équipes techniques et télévisuelles de disposer en permanence d’un accès haut débit à internet, pour retransmettre au mieux la course, et gérer facilement l’application ainsi que le site web de la compétition », nous explique Pascal Queirel, le directeur des systèmes d’information d’ASO. Mais également de réceptionner et traiter les informations émises par les coureurs eux-mêmes. Parce que depuis 2015, un traceur a été placé sous la selle de chaque vélo. Non pas pour espionner les cyclistes, mais ici encore pour mieux informer le public sur l’évolution de la course. « On a longtemps rêvé de cette géolocalisation des coureurs, nous confie Pascal Queirel. Avant, les écarts et vitesses étaient connus grâce aux motos TV, mais on était forcément limité par leur nombre. Aujourd’hui, des capteurs émettent toutes les secondes la position des coureurs à l’avion qui survole la course, et toutes les données sont ensuite envoyées au camion régie garé à la ligne d’arrivée.
De nouvelles caméras dernier cri
Naturellement, au moment du top départ, un tout autre dispositif doit aussi entrer en jeu, sans lequel le spectacle n’existerait pas. Il s’agit, bien évi
demment, des caméras de France Télévisions, orchestrées par Anthony Forestier, le réalisateur du Tour. Ce n’est un secret pour personne, c’est grâce à elles que les téléspectateurs peuvent suivre et ne rien rater de la course depuis leur canapé. Mais ce que l’on sait moins, c’est que le dispositif est bien plus complexe qu’il n’y paraît. Cette année, cinq motos se sont élancées pour suivre la course au plus près, chacune étant chargée d’une caméra. Si deux d’entre elles sont pour ainsi dire « normales », les trois autres produisent des ralentis à… cinq cents images par seconde! Ainsi, le réalisateur peut, nous dit-il, « filmer en direct avec une bien plus grande précision et raconter encore mieux le Tour. Les ralentis servent à appuyer l’effort ou une action particulière ». Ils sont utiles, par exemple, pour révéler le moment précis où la course bascule, lorsqu’une échappée se lance après des kilomètres de contrôle par le peloton. Les téléspectateurs profitent aussi désormais des sites touristiques croisés tout au long de la course avec un niveau de détail plus élevé que jamais. Car si, pendant la compétition, ce sont évidemment les cyclistes qui sont surtout mis à l’honneur, France Télévisions s’applique par ailleurs à magnifier les richesses de notre territoire. Notamment grâce aux hélicoptères qui suivent la course depuis les airs. Chacun d’eux embarque deux caméras à son bord, dont une équipée d’un grand-angle pour filmer en plan très large les paysages et notre patrimoine. L’autre, gyrostabilisée, entre dans les détails de la course. Elle peut isoler l’un des compétiteurs et, dans le retour écran (celui que tout le monde voit depuis son canapé), afficher son nom ainsi que les différentes données transmises par le traceur de son vélo. « Pouvoir suivre un coureur en particulier permet d’expliquer au public son positionnement pendant la course et comment il a fait pour gagner, souligne Anthony Forestier. Le but étant toujours de raconter au mieux les histoires du Tour de France. »
La 4G sera-t-elle à la hauteur ?
Enfin, le réalisateur s’attelle à faire vivre la course toujours plus de l’intérieur en installant des caméras d’action (comme des GoPro) sur certains vélos. Mais seulement quelques-uns, car cette technologie comporte deux contraintes majeures. La première concerne la transmission des images en 4G, étant donné que le Tour de France ne passe pas tout le temps dans des zones de couverture optimale. La seconde a trait directement à l’aspect sportif. En effet, la victoire ne tenant parfois qu’à un détail,
les caméras d’action, même si elles restent légères, représentent un poids supplémentaire sur les vélos. Elles ne sont donc pas utilisées tout le temps, et pas en direct. « On préfère se servir des images de ces caméras en postproduction pour réaliser des highlights [un montage des meilleurs moments, NDLR] de la course pour continuer à raconter le Tour de France une fois l’étape ou la compétition terminée », détaille Anthony Forestier. Sur la ligne d’arrivée, encore une fois, c’est la technologie qui départage les compétiteurs. En l’occurrence, la fameuse photo-finish. Cette fois, ce sont deux caméras placées de part et d’autre de la ligne qui, en prenant dix mille images par seconde, se révèlent en mesure de déterminer les plus infimes écarts entre les coureurs. Et c’est Tissot, célèbre horloger suisse et sponsor du Tour de France, qui se charge de traiter et transmettre les données récoltées aux organisateurs et aux journalistes qui, eux, se retrouvent en mesure de communiquer instantanément au public les résultats de la course. Autant dire que le Tour de France est aussi désormais, en plus d’être l’un des événements sportifs les plus vus au monde, une course constante à l’innovation, une course où la technologie prend de plus en plus de place. Mais qu’importe, tant que le spectacle est présent, le Tour nous fascinera toujours autant.