Un paratonnerre au rayon laser
Attirer la foudre en utilisant un faisceau laser à très forte puissance pourrait protéger les sites sensibles des dommages causés par les ondes magnétiques.
Les éclairs qui zèbrent le ciel lors de violents orages comptent parmi les phénomènes naturels les plus spectaculaires. Mais ils constituent aussi un réel danger, tant pour l’homme que pour les infrastructures. Rien qu’en France, la foudre tue dix à vingt personnes par an et en blesse deux cents autres. D’après Météo France, en métropole, 470000 impacts au sol sont détectés chaque année qui causent aussi d’importants dommages sur les immeubles, déclenchent des incendies, détruisent les compteurs électriques ou endommagent les centres de télécommunications… Pourtant, grâce à l’invention du paratonnerre par Benjamin Franklin en 1752, on sait comment protéger les bâtiments. Le souci, c’est que cet équipement ne capte la foudre que dans sa zone d’influence, qui correspond, à peu près, à un rayon égal à sa hauteur. En outre, il ne protège pas des dommages causés par l’onde magnétique qui accompagne l’éclair. C’est elle, principalement, qui détruit les équipements électriques et électroniques. Pour éviter ce type de dommages, la solution la plus simple consisterait à empêcher la foudre d’atteindre ces infrastructures. Par exemple en installant une longue tige de métal à proximité, qui concentrerait les éclairs. Mais pour être efficace, elle devrait mesurer plusieurs centaines de mètres de haut! Impossible, évidemment. Et si, plutôt que le métal, on créait une longue tige… de lumière?
Paratonnerre virtuel
C’est l’objet du projet européen Laser Lighting Rod (LLR), expérimenté sur le Mont Säntis, en Suisse. L’idée, c’est d’utiliser les propriétés qu’ont certains faisceaux laser d’ioniser l’air afin de le rendre conducteur. Concrètement, il s’agit de créer un paratonnerre virtuel constitué d’un filament laser dont la hauteur pourrait dépasser le kilomètre! Si le dispositif a été installé sur le Säntis, à 2502 mètres d’altitude, c’est que son sommet est surmonté d’une fine tour de télécommunication de 123 mètres de haut qui reçoit chaque année plus de cent impacts de foudre, ce qui en fait l’un des sites les plus touchés d’Europe! Le LLR a été orienté de façon que le faisceau, formé par mille pulsations laser ultracourtes par seconde, pointe le ciel en passant juste au-dessus du sommet de la tour. Les scientifiques s’attendent à ce que ce paratonnerre virtuel, en raison de sa taille, concentre une plus importante proportion d’éclairs qui suivront le filament laser pour frapper l’antenne. Si les résultats sont convaincants – les premiers essais réalisés fin juillet sont prometteurs – ce type d’installation, très compacte et aisée à installer, pourrait protéger à l’avenir certains sites sensibles. Par exemple, un aéroport, un champ d’éoliennes ou le pas de tir d’une fusée. Il suffira de placer le dispositif à proximité d’un paratonnerre de quelques mètres de haut, qui sera frappé par la foudre attirée par le rai de lumière ionisée.