LA THEORIE DE L’EVOLUTION APPLIQUEE AUX ROBOTS
Des chercheurs ambitionnent de créer des robots autonomes et capables d’évoluer seuls sur d’autres planètes.
Touchdown ! Après neuf mois de voyage, le premier engin spatial habité vient de se poser sur la planète rouge. Mais la zone d’atterrissage n’a rien à voir avec la surface poudreuse rencontrée par Neil Armstrong et Buzz Aldrin lors du premier alunissage. C’est une base spatiale que découvrent les astronautes en quittant la fusée, où s’affairent des dizaines de robots. Il y a là des mineurs, des maçons, des électriciens, des plombiers… Bref, tous les métiers de la construction et de l’entretien du bâtiment.
Une base martienne fonctionnelle avant l’arrivée des astronautes
La scène paraît totalement improbable. Et pourtant, elle reflète une vision partagée par de nombreux scientifiques, qui estiment indispensable de bâtir une base martienne fonctionnelle avant l’arrivée des premiers astronautes. En effet, compte tenu du temps de voyage, mais aussi des risques liés à l’exposition prolongée aux particules solaires, il n’est pas envisageable de réaliser un simple aller et retour. Sur place, les astronautes devront se réfugier dans des abris étanches aux rayonnements cosmiques, construits à l’avance par une armada de robots autonomes. Au sens premier du terme, car ceux-ci seront confrontés en permanence à des situations imprévues. Alors, pour mener à bien leur mission, les robots devront évoluer. Une évidence pour Emma Hart, chercheuse à l’université d’Edimbourg mondialement reconnue pour ses travaux sur le calcul évolutif, un sous-domaine de l’intelligence artificielle. Depuis deux ans, elle supervise le projet Autonomous Robot Evolution (ARE), qui vise à concevoir des robots capables de s’adapter à leur environnement sans intervention humaine. La démarche est d’autant plus ambitieuse qu’elle vise à leur appliquer la théorie de l’évolution de Darwin, comme le précise Emma Hart dans un article paru sur le site d’information australien The Conversation*.
Un double numérique qui apprend des erreurs de l’original
Concrètement, une première génération de robots programmés pour réaliser des tâches bien précises (construire, creuser, assembler, réparer…) va être confrontée à des environnements inconnus, tandis que leurs doubles numériques analyseront leurs actions. Si un robot rencontre une situation bloquante, tel qu’un terrain trop glissant ou un outillage inadapté, son jumeau calcule les modifications qu’il convient d’apporter pour résoudre le problème. Par exemple remplacer les roues par des chenilles, ajouter un nouvel outil ou
changer carrément sa forme globale. De nouveaux modèles seront ensuite imprimés en 3D (un prototype d’usine est déjà en cours de test), puis placés dans une « nurserie » où leur potentiel sera évalué. Et c’est le robot jugé le plus efficace qui donnera naissance à la nouvelle génération, laquelle, à son tour, évoluera vers des modèles toujours plus adaptés à leur mission. Mais avant d’envoyer ses robots sur Mars, Emma Hart envisage de tester son système en leur donnant la tâche d’optimiser la manipulation des déchets radioactifs des centrales nucléaires. Un bon exercice pour évaluer leur capacité à évoluer dans des conditions environnementales extrêmes. * « We’re teaching robots to evolve autonomously – so they can adapt to life alone on distant planets », février 2022.