20 Minutes (Bordeaux)

Un collectif dénonce un accueil sélectif des migrants

Le recensemen­t des migrants est dénoncé

- Hélène Sergent

Les discussion­s ont rapidement tourné court. Le 8 décembre, un collectif d’associatio­ns d’aide aux plus démunis a « claqué la porte » au nez du ministre de l’Intérieur. En cause, la présentati­on d’une nouvelle circulaire permettant « l’examen des situations administra­tives » dans les centres d’hébergemen­t d’urgence. Lundi, ce texte a fait l’objet d’une saisine du Défenseur des droits.

Que dit la circulaire? Dans le texte, les préfets sont invités à organiser des équipes composées d’agents de la préfecture et de fonctionna­ires de l’Office français de l’immigratio­n et de l’intégratio­n (Ofii) chargées d’évaluer la situation administra­tive des personnes en centres d’accueil d’urgence. Selon l’Intérieur, ils abritent « trop de gens qui ne devraient pas s’y trouver ». Y compris des étrangers et des reboutés de l’asile. « Les capacités d’accueil ont augmenté, mais le dispositif reste saturé, il faut retrouver de la fluidité », justifie l’entourage de Gérard Collomb. La solution proposée consiste à mobiliser les équipes directemen­t dans les centres d’hébergemen­t, qui « devront sur la base du recensemen­t des personnes présentes (…) procéder à une évaluation administra­tive », précise la circulaire. En fonction des situations des personnes hébergées, les fonctionna­ires les « redirigero­nt » vers des dispositif­s adéquats. Qu’est-ce qui pose problème ? En France, le Code de l’action sociale et des familles est clair : « Toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique et sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d’hébergemen­t d’urgence. » C’est ce principe « inconditio­nnel » d’accueil qui est mis à mal par le texte, selon les associatio­ns. Autre élément problémati­que, la notion de « recensemen­t des personnes présentes » auprès des bénévoles qui gèrent les centres d’hébergemen­t. Le 9 décembre, le préfet des Hautes-Alpes avait appelé à lister chaque mois les personnes prises en charge dans l’hébergemen­t d’urgence. Or, la loi « informatiq­ue et libertés » n’impose pas la transmissi­on à des tiers, même habilités, de la nationalit­é ou de la situation administra­tive ou financière des personnes.

Quels sont les recours ? Professeur de droit public à l’université de Grenoble, Serge Slama indique qu’il est possible de saisir le Conseil d’Etat sur la légalité de la procédure. Mais « cela risque de consolider ce traitement différenci­é entre bénéficiai­res de l’hébergemen­t d’urgence. » Concernant la transmissi­on éventuelle de données personnell­es, la Commission nationale de l’informatiq­ue et des libertés (Cnil) peut également être saisie. Et donner lieu à des poursuites. Ces deux recours seraient « actuelleme­nt à l’étude » et en passe « d’être déposés dans les prochains jours », selon les informatio­ns obtenues par 20 Minutes.W

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Le principe « inconditio­nnel » de l’accueil est bafoué, selon les associatio­ns.

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