Y a pas d’âge pour la coloc
Logement Auparavant plébiscitée par les étudiants, cette cohabitation l’est aujourd’hui par les trentenaires et les quadragénaires
De nombreux trentenaires et quadragénaires privilégient, aujourd’hui, la colocation. Un choix dicté avant tout par des préoccupations économiques.
«J’ai 46 ans et je cherche une colocation en France pour les prochains mois. J’ai déjà tenté l’expérience, puisque je partage un appartement avec des trentenaires depuis près d’un an en Espagne. C’est une solution pratique, économique et conviviale.» Le cas d’Emmanuel, cadre dans l’immobilier, n’est pas si rare. Après les étudiants, la «coloc» se développe bien chez les trentenaires et les quadras. « Près de 20 % des personnes en recherche d’une colocation ou d’un colocataire sur notre site ont plus de 31 ans, confirme Karine Texeira, responsable du service clients du site Appartager.com. Et leur nombre progresse depuis plusieurs années.» Un constat partagé aussi par Jean de Balincourt, fondateur de Lokizi, société spécialiste de la location meublée longue durée. Aujourd’hui, la colocation fait de moins en moins peur aux bailleurs, « notamment parce que la loi Alur [de 2014] et la loi Elan [de 2018] en ont redéfini et stabilisé les contours», note Claire Lévy-Vroelant, professeure de sociologie de l’habitat à l’université de ParisVIII Saint-Denis.
« Ça m’a ouvert des horizons »
La tendance s’explique aussi par la cherté des loyers. «La difficulté à se loger pousse davantage de personnes déjà lancées dans la vie active à cohabiter avec un autre adulte, sans qu’il y ait de liens familiaux ou sentimentaux entre eux, souligne la sociologue Sabrina Bresson, codirectrice du Centre de recherche sur l’habitat. C’est souvent un choix temporaire dans un parcours résidentiel. » De son côté, Claire Lévy-Vroelant relève que «le fait que 35% des ménages actuels soient composés d’une personne seule et que 9 % des ménages soient monoparentaux montre bien le potentiel à inventer de nouvelles formes de cohabitation ».
La cohabitation est également encouragée par la mobilité professionnelle, observe Jean de Balincourt. « Outre le confort, ça permet de ne pas rester seul devant sa tranche de jambon le soir et d’avoir une vie sociale dans une ville où l’on ne connaît personne. » Emmanuel abonde : « La colocation m’a ouvert des horizons, je partage mon quotidien avec des personnes qui ont une manière de vivre différentes de la mienne. » Partager le même appartement, c’est aussi le moyen de s’entraider, complète Sabrina Bresson : « Des familles monoparentales en viennent ainsi à vivre ensemble pour mutualiser, mais aussi pour se rendre des services, notamment la garde des enfants.»
Reste que, pour réussir une cohabitation avec un autre adulte, il faut faire preuve de souplesse, ce qui semble moins évident à 30 ou 40 ans qu’à 20 ans. Ainsi, « je suis très sélectif dans mes choix de colocataires, lance Emmanuel. J’attends de mon futur colocataire français, par exemple, qu’il soit propre ! »