Alain Juppé
« Je suis très inquiet pour la mobilisation de samedi »
Dans une interview exclusive pour 20 Minutes, Alain Juppé revient sur le conflit des « gilets jaunes » et les propositions du gouvernement.
On se dirige vers de nouvelles manifestations ce samedi. Craignezvous de nouveaux débordements ?
La situation est extrêmement préoccupante, et je crains que cet appel à manifester n’aboutisse encore une fois à des violences. Le gouvernement vient de faire des avancées, en proposant des mesures d’apaisement, c’est un appel à discuter. Face au moratoire des taxes, les gilets jaunes seraient bien inspirés de décider un moratoire des manifestations. Je suis très inquiet pour samedi, puisqu’en plus, maintenant, on appelle à la rescousse les agriculteurs avec leurs tracteurs, et à Bordeaux, réputée pour sa tranquillité, nous risquons d’avoir beaucoup de débordements.
Estimez-vous que ce moratoire annoncé est à la hauteur de l’ampleur des manifestations ?
Non, c’est un premier pas. C’est un appel au dialogue qui devrait susciter une réponse moins négative des « gilets jaunes », qui sont d’ailleurs partagés. Il y a une absence totale d’organisation et de sens des responsabilités, qui est une vraie différence avec ce que j’ai vécu en 1995, où il y avait un million de personnes dans la rue ! Mais à cette époque, j’avais en face des leaders syndicaux responsables. Ils ne me faisaient pas de cadeaux, mais au moins il y avait des services d’ordre qui encadraient les manifestations, il y avait une possibilité de discuter…
Pensez-vous qu’Emmanuel Macron a stigmatisé les corps intermédiaires ?
Je ne sais pas s’il les a stigmatisés, en tout cas, aujourd’hui, il faut qu’il s’appuie davantage sur eux. On voit bien que dans certaines circonstances, c’est vers les maires que se tournent les habitants. Que ce soit les inondations dans l’Aude, ou ici quand on a fait évacuer deux immeubles rue SainteCatherine. Alors c’est bien gentil de vilipender les élus d’une manière générale, mais ils sont là, à l’écoute des populations. Et je suis moi-même prêt à recevoir une délégation de «gilets jaunes», s’ils le souhaitent.