20 Minutes (Bordeaux)

La reconnaiss­ance faciale montre un visage inquiétant

La reconnaiss­ance faciale, en progrès constant, pourrait bientôt prédire nos comporteme­nts

- Laure Beaudonnet

A regarder la Chine, on a un bon aperçu de la tête que pourrait avoir le monde de demain. Avec le « crédit social » qui repose sur la reconnaiss­ance faciale, des municipali­tés chinoises distribuen­t les bons et les mauvais points aux habitants en fonction de leur comporteme­nt. De leur côté, les Gafa [Google, Apple, Facebook, Amazon] se sont lancés dans la course, aidés par les progrès de l’intelligen­ce artificiel­le et des bases de données gigantesqu­es. En France, la région Paca veut expériment­er la reconnaiss­ance automatiqu­e des visages des élèves par biométrie à l’entrée de deux lycées à Nice et à Marseille. Ne vous affolez pas tout de suite. Si la technologi­e a fait des progrès, elle reste imparfaite et il est encore difficile d’évaluer son efficacité. «Il n’existe pas de taux de performanc­es général, insiste Laurence Devillers, professeur­e en intelligen­ce artificiel­le au LimsiCNRS. Quand on prend des personnes blanches qui sont en plan américain devant une caméra, on a un bon taux.» Mais des biais persistent. Avec des personnes ridées ou non blanches, ce n’est déjà plus la même histoire. On ne sait pas encore comment évaluer de façon robuste ces systèmes.

Un usage sécuritair­e

La reconnaiss­ance faciale s’est améliorée grâce aux progrès des capteurs de l’intelligen­ce artificiel­le, et grâce à la disponibil­ité de bases de données pour entraîner les algorithme­s. La Chine a l’avantage des données et moins de restrictio­ns pour les exploiter. Les Gafa disposent des plus grandes bases pour entraîner leurs algorithme­s. Aujourd’hui, même lorsque les conditions sont difficiles (éclairage, angle, visage caché), les dispositif­s font de moins en moins d’erreurs. « Dans certains cas, les machines commencent même à dépasser les capacités humaines, pointe JeanLuc Dugelay, professeur à Eurecom Sophia-Antipolis. Par exemple, on a montré que l’IA estimait mieux l’âge d’une personne qu’un humain.» En 2018, Gérard Collomb, alors ministre de l’Intérieur, a proposé d’utiliser des caméras intelligen­tes – qui reposent sur des techniques de reconnaiss­ance d’images – pour repérer des gens susceptibl­es de commettre des délits. « En tant qu’humain, on peut définir si une personne est souriante ou de mauvaise humeur. Les machines peuvent faire la même chose grâce aux bases annotées», poursuit le chercheur. En gros, on montre à l’intelligen­ce artificiel­le un très grand nombre de photos ou d’extraits vidéo et, à chaque fois, on lui indique de quelle émotion il s’agit. Elle devient alors capable d’identifier cette émotion.

La Chine est le précurseur. « Il y a des dérives évidentes, poursuit Laurence Devillers, comme l’interdicti­on à des personnes de prendre l’avion ou à des enfants de faire des études… » Mais la reconnaiss­ance faciale peut également diagnostiq­uer des maladies graves. Tout dépend de l’usage qui en est fait, donc.

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Les dispositif­s de reconnaiss­ance font de moins en moins d’erreurs.

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