20 Minutes (Bordeaux)

Une enquête inédite lancée dans la police après la tuerie à la préfecture de Paris

C’est la première fois que les policiers doivent travailler sur un cas de terrorisme interne

- Caroline Politi

De mémoire de policiers, l’affaire est inédite. Jamais l’un d’eux n’avait été soupçonné d’avoir perpétré une attaque terroriste. Jusqu’à jeudi. Dans l’enceinte même de la préfecture de police de Paris, Mickaël Harpon, 45 ans, a tué quatre fonctionna­ires* et grièvement blessé un cinquième avant d’être abattu. Certes, le suspect n’appartenai­t pas précisémen­t aux forces de l’ordre, mais travaillai­t depuis quinze ans en tant qu’informatic­ien au sein de la direction du renseignem­ent parisien (DRPP). Enquête-t-on de la même manière lorsque le principal suspect est de la « maison » ?

«S’il y a eu des flottement­s, ce n’est qu’en matière de communicat­ion, assure une source proche de l’enquête. L’enquête, elle, se déroule exactement comme n’importe quelle enquête de ce type.» Ainsi, quelques heures à peine après la tuerie, la femme du suspect était placée en garde à vue et son domicile, perquisiti­onné. Ses relevés téléphoniq­ues ont été épluchés, son entourage, passé au crible. Comme dans tous les dossiers terroriste­s, en somme. « On oublie que [l’assaillant] a fait partie de la maison, on voit ses actes, pas le rôle qu’il a occupé», insiste-t-on.

Trois services mobilisés

Une centaine de témoins ont également été auditionné­es, à commencer par la hiérarchie de Mickaël Harpon, soupçonnée d’avoir minimisé les signes de radicalisa­tion. «Ceux qui nous accusent de vouloir protéger sa hiérarchie ne savent pas que des magistrats instructeu­rs supervisen­t l’enquête et qu’on ne fait donc pas ce qu’on veut», se défend une source policière. D’autant que, dans cette enquête, les investigat­ions ont été confiées à trois services spécialisé­s, l’un rattaché à la préfecture de police, les deux autres étant la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ) et la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI). Quid de l’inspection générale de la police nationale (IGPN), la police des polices? «Dans ce type d’affaires, il faut une technicité que n’ont que des enquêteurs qui ont l’habitude de travailler sur cette matière, poursuit cette source. C’est comme un chirurgien qui n’opère jamais : il oublie la technique et n’est plus bon. Ici, c’est pareil : il faut avoir travaillé sur d’autres associatio­ns de malfaiteur­s terroriste­s pour faire tenir la qualificat­ion. »

Reste l’une des principale­s difficulté­s de cette enquête : Mickaël Harpon était habilité «secret défense» et avait donc accès à des dossiers hautement confidenti­els. Or, une partie des enquêteurs n’a pas cette habilitati­on et ne peut donc pas consulter ces documents. «C’est ce qui pourrait ralentir le travail d’enquête, on doit vérifier s’il s’est ou non servi de ses accès pour ses activités terroriste­s.» La responsabi­lité de lever le secret défense revient à une commission, procédure rare et très encadrée. * La Légion d’honneur doit leur être remise ce mardi. Ce sera le cas ultérieure­ment pour le gardien de la paix qui a neutralisé l’assaillant.

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Un employé de la préfecture de police a tué quatre de ses collègues jeudi.

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