Allumer le contrefeu
Avant la grève du 5 décembre, l’exécutif mise sur la bataille de l’opinion afin de mener à bien l’une des réformes majeures du quinquennat.
«Macron trouvait que c’était mou et polyphonique. » Le président aurait recadré ses troupes au sujet de la réforme des retraites lors d’un dîner mardi. «Il leur a dit d’être plus offensifs», relate un proche du chef de l’Etat. A J-10 de la mobilisation nationale contre la réforme du gouvernement, la majorité a durci le ton contre la grève en ciblant les régimes spéciaux, tandis que les grandes lignes de la réforme restent non définies. En parallèle, une dernière série de rencontres entre syndicats et gouvernement a débuté lundi.
Pour Emmanuel Macron, la grève du 5 décembre est, «avant tout», une mobilisation «contre la fin des régimes spéciaux», qui sont «d’une autre époque». Ce mouvement est dominé par «de grandes entreprises de transport », avec «des demandes catégorielles qui pénalisent le reste de la société», a-t-il taclé vendredi, en déplacement à Amiens (Somme).
Une communication «dure»
Le chef de l’Etat adopte une «communication dure» sur cette grève, estime Bernard Vivier, directeur de l’Institut national du travail. A l’unisson, la majorité reprend l’argument d’une grève «catégorielle». La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, par exemple, a pointé «des revendications très corporatistes» au micro de France Info. «Cette tactique consistant à dénigrer les régimes spéciaux peut parler à une partie de l’opinion, mais elle est risquée, car la réforme suscite de grosses inquiétudes, avance Bernard Vivier. Ce discours peut aussi réveiller le sentiment qu’Emmanuel Macron gouverne d’en haut.» Pour l’heure, les Français sont, semble-t-il, partagés : ils seraient environ 6 sur 10 à trouver la grève du 5 décembre justifiée, selon un sondage publié jeudi par l’Ifop et selon un autre paru le 15 novembre chez BVA. «Si le gouvernement recule sur cette réforme, le quinquennat, on le fera a minima, insiste François Patriat, sénateur LREM. C’est un totem pour Emmanuel Macron, parce qu’il veut montrer sa volonté de poursuivre les réformes, le seul marqueur qui reste, c’est les retraites. »
L’Elysée et Matignon ne lésineront pas sur les efforts de communication et de coordination : ce mardi, Edouard Philippe, Agnès Buzyn et Jean-Paul Delevoye rencontreront les parlementaires de la majorité pour «faire de la pédagogie» sur cette réforme. Dimanche, tout le gouvernement est convoqué pour une réunion spéciale afin de préparer cette journée «critique» en matière de transports et de maintien de l’ordre notamment pour «limiter l’impact pour les Français».