20 Minutes (Bordeaux)

Sophie Spatz, qui accuse de viol le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, témoigne

Sophie Spatz, qui a déposé plainte pour viol à l’encontre de Gérald Darmanin, se confie à « 20 Minutes »

- Vincent Vantighem

Les faits remontent au printemps 2009. Mais, encore aujourd’hui, la voix de Sophie Spatz se brise quand elle se met à raconter cette soirée passée avec Gérald Darmanin. « J’étais anéantie… Je n’avais pas le choix. » Les phrases ne sont pas pudiques sans raison. C’est le seul moyen qu’a trouvé cette femme, aujourd’hui âgée de 48 ans, pour évoquer le viol dont elle assure avoir été victime de la part de l’actuel ministre de l’Intérieur. « C’est dur d’en parler », souffle-t-elle. Pourtant, elle indique, dans un entretien qu’elle a accordé vendredi à 20 Minutes, qu’elle n’est pas près de renoncer à son combat : «Je n’ai peur de personne.» Gérald Darmanin a été entendu lundi, par les juges Mylène Huguet et Dimitri Dureux. Le ministre a été auditionné en tant que témoin assisté, un statut intermédia­ire entre celui de simple témoin et celui de mis en examen. « C’est la démonstrat­ion qu’il n’y a pas, dans l’esprit des juges, d’indice démontrant l’existence d’une quelconque infraction », veut croire Mathias Chichporti­ch, son avocat.

Selon nos informatio­ns, Sophie Spatz a été interrogée par Mylène Huguet fin octobre. Condamnée à l’époque de sa rencontre avec Gérald Darmanin pour une affaire de chantage et d’appels malveillan­ts, elle cherche à obtenir un procès en révision. Adhérente UMP, elle se rend alors au siège du parti, où elle rencontre celui qui n’est alors que chargé de mission et à qui elle demande des conseils. D’après son récit, Gérald Darmanin lui promet d’intervenir. Quelques jours plus tard, il lui propose un dîner. La soirée se poursuit dans un club libertin, puis dans un hôtel parisien, où ils ont une relation sexuelle. « Il m’a dit : “Je vais vous aider, mais moi aussi il va falloir m’aider, raconte-t-elle aujourd’hui. J’avais compris. Il avait ma vie entre ses mains. »

Entendu une première fois par la police le 12 février 2018, Gérald Darmanin assure que c’est Sophie Spatz qui a pris les devants. Agé de 26 ans à l’époque, il explique avoir été « impression­né », mais aussi « sensible » à ses charmes. Il lâche aussi que Sophie Spatz aurait pu s’enfuir à plusieurs reprises si elle s’était sentie réellement menacée. Ce soir-là, une fois à l’hôtel,elle a en effet indiqué à Gérald Darmanin qu’elle souhaitait prendre un bain, mais qu’elle avait besoin de produits de toilette. L’actuel ministre est alors ressorti pour aller lui en chercher chez sa mère, qui habitait «à dix minutes de marche » de là. A son retour, Sophie Spatz était toujours dans la baignoire. « J’ai essayé de partir, mais je n’ai pas réussi, rétorque-t-elle aujourd’hui.

Il exerçait sur moi une forme de contrainte psychologi­que. » Sophie Spatz a attendu 2017 pour porter plainte pour viol. « J’étais dans le cas de beaucoup de gens, confie celle qui assume son passé d’escortgirl. Je pensais qu’il fallait être violentée. Aujourd’hui, je peux utiliser le mot de viol. A l’époque des faits, je n’étais pas capable de poser ce mot-là. » C’est sans doute dans cette prise de conscience qu’il faut aujourd’hui chercher les raisons de sa ténacité. Frappée de deux classement­s sans suite, notamment car elle ne s’était pas présentée à sa première convocatio­n, sa plainte a ensuite fait l’objet d’un non-lieu, « les auditions n’ayant pas permis d’établir l’absence de consenteme­nt » de la plaignante. Mais, en juin, la chambre de l’instructio­n a ordonné la réouvertur­e de l’enquête, estimant que des « investigat­ions complément­aires » sont nécessaire­s.

«[Gérald Darmanin] exerçait sur moi une forme de contrainte psychologi­que. »

«J’irai devant toutes les juridictio­ns s’il le faut.»

«Pierre-Olivier Sur [l’un des avocats de Gérald Darmanin] estime que je m’acharne sur son client, poursuit Sophie Spatz. Je veux le rassurer : je ne suis pas en dessous des autres. Et oui, j’irai devant toutes les juridictio­ns s’il le faut.» A commencer par le cabinet des juges, s’ils ordonnent une confrontat­ion. «C’est très difficile de m’imaginer de nouveau en la présence de Gérald Darmanin. Mais, bien sûr, je m’y soumettrai. »

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Sophie Spatz, 48 ans, lors de son entretien dans les locaux de 20 Minutes, vendredi, à Paris.
##JEV#91-67-https://tinyurl.com/y7ymmj5c##JEV# Sophie Spatz, 48 ans, lors de son entretien dans les locaux de 20 Minutes, vendredi, à Paris.

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