L’Arabie saoudite carbure
Le pays du Moyen-Orient accueille de plus en plus de compétitions sportives
Après le foot, le golf ou encore la boxe... L’Arabie saoudite s’est récemment offert deux nouveaux événements sportifs : l’épreuve cycliste du Saudi Tour et le Dakar, dont la deuxième édition saoudienne a démarré ce week-end (lire ci-dessous). Le pays du Moyen-Orient ne compte pas s’arrêter là et rêve désormais d’organiser un Grand Prix de Formule 1. Pourtant peu réputé pour son amour du sport, le régime saoudien s’est subitement pris de passion pour tout ce qui court, qui tape ou qui roule. Réveil soudain d’une flamme sportive ? Pas vraiment. «Ces achats à coups de pétrodollars de grands événements sportifs ne sont rien d’autre qu’une opération de camouflage pour masquer que l’Arabie saoudite est une théocratie barbare qui recourt à la peine de mort, où les opposants politiques, les femmes, les homosexuels et les minorités étrangères sont discriminées, agressées ou emprisonnées », dénonce Malik Salemkour, le président de la Ligue des droits de l’homme. Sur France Info, Antoine Madelin, directeur du plaidoyer à la Fédération internationale pour les droits humains, dénonçait, lui, «une entreprise médiatique pour redorer l’image d’un régime sanguinaire».
A l’image de son voisin et ennemi qatari, en pointe en matière de diplomatie sportive après le rachat du Paris SaintGermain à l’été 2011 et l’organisation du Mondial de foot en 2022, l’Arabie saoudite a choisi le sport comme instrument de puissance sur le plan international. Mais, à la différence du petit émirat gazier, qui utilise le football pour étendre son ère d’influence à travers le globe et grossir son carnet d’alliés en Occident face à des voisins aussi hostiles qu’envahissants, le coup de force sportif de l’Arabie saoudite est davantage perçu par le régime en place comme un levier économique.
«Cette politique fait partie du plan “Vision 2030”, mis en place par le prince héritier Mohamed Ben Salman, qui tend à diversifier l’économie du pays, car la manne pétrolière seule ne suffit plus à satisfaire une population de plus en plus nombreuse», explique Clarence Rodriguez, correspondante pour les médias français à Riyad pendant près de douze ans. L’idée est simple : développer l’économie du tourisme via les retombées médiatiques des différents événements. La réalisation, en revanche, est un chouïa plus coton, parce que l’Arabie saoudite n’arrive pas en premier dans la liste des pays que l’on souhaite découvrir. « La guerre au Yémen, les assassinats politiques, les purges à tour de bras [des gens de la famille de Ben Salman ont été embastillés au nom d’une campagne de lutte contre la corruption], décrit Clarence Rodriguez. Sans parler de l’affaire Khashoggi, ce journaliste assassiné au consulat d’Arabie saoudite à Istanbul le 2 octobre 2018 et dont la CIA soupçonne le régime saoudien d’être le commanditaire. » Ce qui lui fait dire, en comparaison avec la relative réussite politique de soft power du Qatar, que «le passif est plus lourd pour l’Arabie saoudite et que, de ce fait, la réussite de cette politique de soft power n’est pas garantie ».
« Le prince héritier veut diversifier l’économie du pays. » Clarence Rodriguez, ancienne correspondante à Riyad