Les Aubiers tentent de «rester soudés» après la fusillade
Après la fusillade mortelle de samedi, le quartier des Aubiers reste sous le choc, malgré l’interpellation de cinq personnes
Le précédent drame d’ampleur qui avait secoué les Aubiers, quartier du nord de Bordeaux, remonte à 2001. Un petit garçon de 10 ans avait été tué par celui qu’on a appelé « le fou de Bègles ». Vingt ans plus tard, la cité réputée calme est à nouveau endeuillée après une fusillade à l’arme automatique samedi soir, dans laquelle un collégien de 16 ans, sans histoires, a perdu la vie. Quatre autres personnes, dont trois adolescents, ont été blessées mais leurs jours ne sont pas en danger. Si cinq interpellations ont eu lieu dès lundi, les habitants vivent encore dans la peur. « Ils craignent des représailles aveugles après cette descente punitive aveugle elle aussi, estime Amine Smihi, adjoint au maire de Bordeaux chargé de la tranquillité publique, de la sécurité et de la médiation. On ne doit pas associer cet acte ignoble au quartier, dans lequel 98 % des jeunes ne tuent pas et ne commettent pas d’actes criminels. » Si les faits sont confirmés, l’attaque de samedi soir aurait à voir avec une blessure par balle infligée à un habitant de Chantecrit, il y a deux semaines.
Depuis la fusillade, l’absentéisme au collège dans lequel était scolarisé Lionel, la victime, est fort, et les rues peu fréquentées. « Les gens n’osent pas trop sortir et les professeurs et employés du centre d’animation sont meurtris, commente Vincent Maurin, maire adjoint du quartier Bordeaux-Maritime. Une cellule psychologique a été ouverte au centre d’animation. » «On essaie d’aller de l’avant mais il y aura une profonde cicatrice, commente Nouhra, coordinatrice de l’association Urban vibration school, qui propose des animations et de la médiation. Les familles essaient d’être là, les unes pour les autres, et de rester soudées. » Avant ce drame, elle décrit une bonne ambiance dans la cité, prenant l’exemple des matchs interquartiers qui se passent tellement bien qu’ils se finissent invariablement par des barbecues. Elle ne comprend pas « ce qui est passé par la tête » des assaillants, pour s’en prendre à des jeunes désarmés qui vendaient des chocolats et des canettes pour se faire un peu d’argent de poche. La rivalité entre les Aubiers et Chantecrit est connue et donne lieu à des « gamineries » voire de « petites bagarres» au collège ou en dehors, selon Nouhra, mais là, un cap a été franchi. « Les nôtres n’auraient jamais pu faire ça », souffle-t-elle.
Lionel tenait le premier rôle dans un petit film sur la solidarité dans le quartier qui était en cours de réalisation et devait être projeté en 2021, pour fêter les 50 ans de la cité des Aubiers.
« On essaie d’aller de l’avant mais il y aura une profonde cicatrice. »
Nourah, Urban vibration school