Avec une bonne conduite, on va forcément plus vite
Si elles ne sont pas les seules responsables des retards, les incivilités des usagers nuisent à la ponctualité des transports en commun
Ces incivilités génèrent des tensions entre passagers mais aussi à l’égard du conducteur
Retenir la fermeture des portes après un sprint de 50 m afin de monter dans son bus, son tram, son métro… Un classique des transports en commun mais un geste pas si anodin : « Sur la ligne A du tramway, un blocage de portes à Sainte-Catherine peut être ressenti jusqu’à Mérignac », alerte Philippe Magne, responsable du service temps réel de Keolis Bordeaux, l’opérateur de Transports Bordeaux métropole (TBM), qui a comptabilisé, en 2021, 94,8 millions de voyages sur ses trois lignes de tram et 54,7 millions sur ses 78 lignes de bus.
De l’attente et de l’impatience
Avec une moyenne de 22 secondes d’arrêt à chaque station et à raison de 5 à 6 secondes supplémentaires dues au passage forcé d’un ou plusieurs usagers, la machine a tôt fait de s’enrayer. « Aux heures de pointe, il y a une fréquence d’un passage toutes les trois minutes, poursuit le superviseur de la circulation. Un tram en retard creuse l’écart avec celui qui le précède. Résultat, il y a davantage d’attente aux arrêts suivants et tout le monde veut monter dedans. » Pour TBM, de la tentative d’entrer lors de la fermeture des portes, qui provoque automatiquement leur rouverture, au forcing qui cause leur blocage, en passant par la montée à bord sans avoir laissé descendre les passagers qui quittent la rame, toutes ces mauvaises pratiques nuisent à la fluidité du trafic et se répercutent sur l’ensemble des usagers. « Il faut agir rapidement pour gérer le mécontentement général, explique Philippe Magne. Dans la seconde qui suit la survenue d’un incident, le poste de commande centralisé (PCC) est en alerte. » Autre perturbation, l’oubli de paquets et bagages dans les rames, qui occasionne une interruption totale de la ligne « pendant environ 1 h 30 », fait savoir Keolis. Des cas extrêmes mais pas rares : en 2021, 143 colis ont été déclarés abandonnés.
Des incidents qui créent, outre du retard, des tensions parmi les voyageurs et, bien souvent, à l’encontre d’une seule personne : le conducteur. « Quand on dérègle les portes du tram, par exemple, toutes les ouvertures sont bloquées, détaille Philippe Magne. Le conducteur est obligé de réinitialiser lui-même la porte, passant au milieu des voyageurs. Il s’expose alors à l’impatience de certains. » La question des incivilités et de l’agressivité qu’elles génèrent envers le personnel est l’une des préoccupations de l’Union des transports publics et ferroviaires (UTP) : « Pour celui qui agresse, le conducteur représente le réseau, mais aussi les forces de l’ordre, les pouvoirs publics et l’Etat. C’est souvent le bouc émissaire », éclaire Mathieu Dufour, son directeur des affaires sociales et de la sûreté, qui note que « les incivilités ont augmenté depuis le premier confinement ». Jusqu’au 3 avril, les messages de la campagne de sensibilisation Coeur de conducteur sont visibles sur l’ensemble du réseau TBM.