Palace et ministère

Les mots d’Hemingway – « Quand j’imagine le paradis, l’action se situe toujours au bar du Ritz » –, n’auraient pas détonné dans la bouche du mentor de Charles Cotté. Il affichait un certain cousinage avec l’écrivain au niveau de la corpulence et du succès dans le verbe. Et son arrivée passait rarement inaperçue. Mais la discrète clientèle du bar Hemingway de l’hôtel de la place Vendôme en avait vu d’autres. Ce n’était pas un ministre en difficulté qui allait la déranger outre mesure. Aussi, à peine quelques têtes se tournèrent pour s’assurer de la réalité du nouveau venu sur la sellette. – Merci pour votre temps, dit Charles Cotté, je suis content de vous voir. L’ancien élève était inquiet des difficultés de son mentor. Il craignait que ses anciennes affaires au Royaume entachent ses propres grandes manoeuvres contre le Prince. Ce n’était pas parce qu’ils avaient été associés que les déboires du ministre devaient déteindre sur sa réputation.

– Les coupables d’aujourd’hui sont les innocents de demain, dit le ministre. Il se voulait rassurant avec son élève, lui rappeler qu’ils étaient des hommes ambitieux, à l’affût des opportunités, mais qu’il arrivait toujours un moment où l’on se trouvait pris la main dans le pot de confiture. Il ne fallait pas s’en formaliser. L’important était plutôt de se concentrer sur le coup d’après. La justice fonctionnait avec la précision d’une horloge. Quand vous en connaissiez les rouages, vous aviez forcément un avantage. – Vous devriez vous rapprocher des amis parisiens de Patros, dit le ministre. Ils pourraient vous aider.

(à suivre)