Les salariés de Tati fixés sur l’avenir de leur enseigne
L’avenir de l’entreprise est examiné ce lundi à Bobigny
Abientôt 70 ans, Tati va mal. Ce lundi, le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) va étudier des offres de reprise de la marque au vichy rose et blanc (lire l’encadré). Elle pourrait y perdre son identité, une histoire construite sur une saga familiale. En 1948, à 33 ans, Jules Ouaki, ancien officier radio, tente sa chance à Paris. Son idée ? Révolutionner le commerce en proposant des produits en vrac aux clientes habituées aux tickets de rationnement. Sa première boutique de 20 m2 à Barbès s’appellera « Tati », en hommage à sa mère, Esther, dont le surnom est « Tita ».
Fidèle à ses salariés
Le succès est fulgurant. « Les produits étaient en libre accès dans des bacs de fouille, rappelle Yves Marin, consultant pour le cabinet Wavestone, alors que dans les boutiques classiques, il fallait s’adresser au vendeur. » Résultat : au début des années 1980, Tati s’étend sur plus de 100 m de trottoir. Mais en 1982, Jules Ouaki meurt sans avoir formé un successeur. Les héritiers tentent de diversifier l’offre et de toucher une clientèle premium. Un échec. Placé en redressement judiciaire en 2004, l’empire Ouaki est repris par le groupe Eram (Agora Distribution), qui parvient à relancer la machine. Jusqu’à aujourd’hui.
Malgré les difficultés, Tati a toujours été fidèle à ses salariés, et vice versa. Ainsi, la direction avait refusé de licencier lors de la crise de 2004, ou investi en 2015 pour permettre à tous ses salariés d’obtenir un diplôme équivalent au bac. « Les gens qui sont avec moi sont ici depuis trente ans. On est encore proches les uns des autres », explique Tahar Benslimani, employé depuis douze ans, et délégué syndical CFDT. Mais cette gestion patriarcale a un revers. « Elle a empêché l’enseigne de passer à un stade industriel, assure Yves Marin. Les compétiteurs étaient structurés, un peu brutaux, mais ils avaient le mérite de l’efficacité. »