Farrell en proie au sacrifice
« Mise à mort du cerf sacré » a reçu le prix du scénario à Cannes
Le jour où Colin Farrell a découvert Canine de Yorgos Lanthimos, cela lui a fait un tel choc qu’il s’est empressé de contacter le réalisateur grec. « J’étais aux anges quand il m’a engagé pour The Lobster après la défection d’un autre acteur, raconte le comédien à 20 Minutes, et encore plus excité lorsqu’il m’a parlé de l’histoire de Mise à mort du cerf sacré.» A Cannes, le jury a partagé le même enthousiasme en offrant son prix du scénario à ce conte terrible, dans lequel le comédien irlandais incarne un médecin, marié à une ophtalmologue jouée par Nicole Kidman et père de deux enfants. Il est perturbé, puis persécuté par un adolescent incarné par Barry Keoghan, jeune acteur vu récemment dans Dunkerque, sous le prétexte qu’il aurait une part de responsabilité dans la mort de son père. Leurs rapports, aimables et courtois, ne vont pas tarder à se gâter quand le gamin révèle ce qu’il attend du praticien.
« Le sang du papa que je suis s’est glacé dans mes veines en lisant le script. »
« Ce fou furieux va demander au père de famille de sacrifier l’un de ses enfants pour compenser la perte qu’il a subie, explique Colin Farrell. Le sang du papa que je suis s’est glacé dans mes veines en lisant le script. La fable parlera à tous les parents. » Yorgos Lanthimos flirte avec le fantastique pour confronter cet homme solide à un cas de conscience épouvantable. « L’adolescent s’introduit petit à petit dans la famille avant de faire vivre à mon personnage un cauchemar épouvantable, insiste Farrell. De ceux qui vous donnent des sueurs froides rien que d’y penser. » Malgré l’horreur de la situation dans laquelle son personnage se retrouve, Colin Farrell a pris un plaisir énorme à l’incarner. « Yorgos ne ressemble pas à ses oeuvres, qui deviennent de plus en plus sombres. Il aime maintenir un climat détendu sur le plateau, ce qui est indispensable quand on interprète des rôles aussi chargés psychologiquement », se souvient le comédien. L’humour noir du cinéaste grec fait des merveilles tandis qu’il détruit méticuleusement cette famille trop parfaite. « C’est ce qui me plaît dans son cinéma : la cruauté est toujours contrebalancée par une forme de dérision salutaire, déclare Colin Farrell. Son ironie me touche profondément, car sa façon de traiter les sujets est unique. » Le comédien pourra de nouveau en juger bientôt, car il va retrouver Yorgos Lanthimos à l’occasion d’une série pour Amazon où ils reviendront sur l’affaire Iran-Contra.