L’Etat attaché à la grenade de désencerclement
Maintien de l’ordre Un manifestant aurait eu la main arrachée par cette arme de désencerclement
Les armes utilisées dans le cadre du maintien de l’ordre sont à nouveau dans le viseur. Samedi, à Paris, lors de l’acte 13 des « gilets jaunes », un manifestant a eu la main arrachée. Selon un témoin interrogé par l’AFP, « il a reçu une grenade de désencerclement au niveau de son mollet, il a voulu mettre un coup de main dedans pour ne pas qu’elle explose vers sa jambe et elle a pété quand il l’a touchée ». Une enquête judiciaire a été ouverte. Le même jour, à Toulouse, un journaliste aurait lui aussi été blessé par une telle munition.
Utilisation encadrée
Introduite en France il y a quinze ans, la grenade à main de désencerclement (GMD) fait partie, comme le LBD (lanceur de balle de défense), des « armes de force intermédiaire ». « Pour l’utiliser, il faut une habilitation, qu’on obtient après une formation théorique et pratique », précise à 20 Minutes Grégory Joron, secrétaire national du syndicat Unité SGP Police-FO. Son usage est réglementé : le tir doit toujours s’effectuer au ras du sol, afin qu’aucun projectile ne soit susceptible d’atteindre le visage.
Des manifestants et des associations accusent la GMD de causer des blessures sérieuses. Ce qui est difficile à évaluer en l’absence de bilan officiel publié par les autorités. Le collectif Désarmons-les, qui milite contre la violence d’Etat, recense pour sa part 17 blessés par GMD en décembre 2018 et janvier 2019. Certains sont pour son abandon, comme le sociologue et chercheur au CNRS Patrick Bruneteaux, qui rappelle que « la France est le seul pays d’Europe où la police utilise de telles grenades ». « La philosophie du maintien de l’ordre, c’est d’avoir un usage de la force gradué, explique Grégory Joron. Or, si on supprime la GMD, on perd un échelon dans l’arsenal de réponses proportionnées. S’ils n’ont plus ces grenades, que restentils aux collègues ? La matraque, l’arme de service ? » Le syndicaliste, qui déplore « des blessures gravissimes », admet toutefois que « l’on peut réfléchir à faire évoluer notre système de maintien de l’ordre ».
Le 1er février, Laurent Nunez, secrétaire d’Etat à l’Intérieur, prévenait : «Les LBD, les GMD (…) seront utilisés puisque c’est ce qui nous permet de contenir les exactions, de procéder à des interpellations quand la manifestation dégénère en émeute, en guérilla urbaine. »