Contrainte à l’exil après avoir osé témoigner à visage découvert
« Ce livre, ce n’est pas pour accuser un individu, mais pour remettre en question le système que j’ai dû affronter», témoigne auprès de 20 Minutes Shiori Ito. Dans La Boîte noire (éditions Picquier) qui sort traduit en français ce jeudi, la journaliste de 26 ans raconte le parcours semé de frustrations et d’humiliations qui attend les victimes de viol. Elle-même l’a été, en 2015. Surmontant son traumatisme, elle a décidé de témoigner à visage découvert, fait exceptionnel au Japon qui lui a valu de devenir la représentante de #MeToo dans l’archipel nippon. Elle a alors reçu des insultes et des menaces de mort qui l’ont poussée à s’installer à Londres. Son livre regorge d’exemples glaçants : l’association de soutien aux victimes de violences sexuelles qui refuse de lui indiquer par téléphone où elle peut aller faire des tests de sang et d’ADN; le policier qui la sermonne parce qu’elle pleure; les mises en garde parce que son agresseur est haut placé… Autant d’obstacles qui font que peu de victimes portent plainte. Dans une étude de 2014 du gouvernement japonais, 1 femme sur 15 disait avoir subi un viol au cours de sa vie, mais seulement 4,3% des victimes avaient porté plainte. La loi japonaise sur le viol, qui datait du début du siècle, a été modifiée en 2017. La définition a été élargie pour inclure les hommes et les rapports oraux et anaux. Mais la loi ne mentionne pas le consentement, et établir son absence s’avère très difficile quand l’agresseur est connu de la victime et que le viol a lieu dans un lieu fermé, la « boîte noire », qui a donné son nom au livre de Shiori Ito.