Objectif 2024 : avec Analog Sport, l’insertion sociale passe par la photo argentique
Avec la photo sportive argentique, Analog Sport favorise l’insertion sociale et rêve des JO
Pour les jeunes membres d’Analog Sport, l’argentique fait le bonheur. La première association d’éducation et d’insertion à travers la photographie sportive a en effet remporté en février le prix Talents 2024, organisé par la Ville de Paris et Paris 2024. A la clé, une aide financière de 20 000 € et une sacrée reconnaissance en vue des Jeux olympiques et paralympiques en France, dans trois ans.
Après avoir créé en 2018 sur Instagram le compte Analog Football, premier média international consacré à la photographie argentique et au football, Quentin Eveno (26 ans) a cofondé Analog Sport en février 2020 avec Léo Cochin, dans des quartiers prioritaires de région parisienne, surtout en SeineSaint-Denis. Avec une particularité : former gratuitement les jeunes élèves (6 en 2020, 11 cette année) à l’argentique, tout en les envoyant couvrir des événements sportifs.
Ce recours à l’argentique, pour toute la génération Insta, est primordial, selon Quentin Eveno : « Bien plus que le numérique, il apprend aux jeunes des valeurs comme la rigueur, avec la gestion qu’implique cette pellicule de 36 poses, mais aussi la patience et la gestion de l’échec, lorsqu’ils apprennent dans la difficulté à développer eux-mêmes leurs pellicules. De même, devoir attendre une semaine pour découvrir leurs photos entraîne des émotions qu’ils ne connaissaient pas. Ça nous permet de démystifier auprès d’eux le monde de l’art. »
« Ces jeunes du 93 auront un regard très particulier sur le changement de leur territoire. » Léo Cochin, créateur Analog Sport
Pas plus intimidées que cela, Biré, Karthoum, Sokhna, Inès et Melvina, âgées de 16 à 19 ans, ont répondu à un shooting photo original du groupe SNCF avec trois athlètes lyonnaises de haut niveau à la gare de Perrache, à Lyon (Rhône). « C’est en mode détente pour nous, même si c’est assez fou de se retrouver dans des conditions professionnelles alors qu’on débute juste, souligne Melvina. Bon, on ne va quand même pas donner d’ordre à des athlètes olympiques ! » Pourtant, les idées fusent, comme celle d’installer la championne du monde 2018 d’aviron, Laura Tarantola, dans la cabine du conducteur, ou de mettre en scène une course entre un TGV et la championne d’Europe 2018 du 200 m handisport, Angelina Lanza.
Quentin Eveno tient à souligner la démarche « plus artistique que journalistique » d’Analog Sport, qui met en place un encadrement entièrement gratuit de quatre ateliers par mois, avec des interventions de photographes professionnels. Parmi leurs terrains de jeu habituels, les jeunes de l’association arpentent les pelouses de quatre clubs de D1 féminine de foot et aussi le stade Bauer du Red Star (National), où ils effectuent des ateliers.
« On a trois ans pour convaincre les organisateurs d’accréditer nos jeunes, pour qui ça serait vraiment un rêve d’être au plus près des athlètes », résume Quentin Eveno. Et ce en impliquant au maximum un public féminin, à l’image des profils choisis sur le projet photo de la SNCF. « C’est une belle initiative, salue Angelina Lanza. Dans les stades, je remarque toujours une énorme majorité de photographes masculins, je trouve qu’il est important de diversifier cette profession. »
En parallèle de l’ouverture d’une antenne d’Analog Sport en juin dans des favelas de Rio de Janeiro, et sans doute en septembre à Marseille, Léo Cochin se projette volontiers sur 2024 :
« On compte proposer un contenu alternatif, en nous intéressant aux ouvriers travaillant sur les chantiers des Jeux, ou aux conducteurs de trains de banlieue qui, tout à coup, vont transporter des milliers de supporteurs. Tous ces jeunes du 93 auront forcément un regard très particulier sur le changement de leur territoire. Je me dis que ça serait quand même quelque chose si ces JO pouvaient lancer le début d’une carrière de photographe pour ces jeunes. »