Après la terreur, la justice
Le procès des attentats du 13-Novembre s’ouvre ce mercredi.
Condamner des fantômes est devenu le quotidien des magistrats spécialisés dans le terrorisme. Depuis que certains djihadistes ont tenté de se faire passer pour morts afin de tromper les services de renseignement, décision a été prise de juger, en l’absence de preuves irréfutables, ceux pour qui le doute subsiste. Le procès des attentats du 13-Novembre, qui s’ouvre ce mercredi devant la cour d’assises spécialement composée, à Paris, n’échappe pas à cette règle : parmi les vingt accusés, six manquent à l’appel. L’un d’entre eux est détenu en Turquie, un second est en fuite, mais les quatre autres sont, selon les services de renseignement de plusieurs pays, décédés en Syrie. Leur ombre planera donc sur ces neuf mois d’audiences. À commencer par celle d’Oussama Atar, le seul, parmi tous les accusés, à être jugé pour direction d’une entreprise terroriste.
Ce Belgo-Marocain, a priori tué par un drone en novembre 2017 à l’âge de 33 ans, est soupçonné d’avoir organisé, depuis la Syrie, les attaques du 13-Novembre. « Il était à la tête de la cellule des opérations extérieures, précise Jean-Charles Brisard, président du Centre d’analyse du terrorisme. Il avait un rôle de planificateur en chef des attaques.» Parti combattre les troupes américaines en Irak en 2004 alors qu’il était à peine majeur, il a passé sept ans dans les geôles américaines sur place. « Ce rôle de vétéran du djihad lui a permis de monter tout en haut de l’échelle de Daesh», précise le chercheur. Fin 2014, Oussama Atar s’entoure d’hommes chargés de l’aspect logistique et opérationnel des attaques. À commencer par ses cousins, les frères El Bakraoui, ses relais en Europe. Depuis la région bruxelloise, ils recherchent des armes, louent une partie des voitures et des planques qui serviront à acheminer et héberger le commando. En Syrie, l’« émir » s’appuie également sur deux compatriotes : Najim Laachroui, qui dispose de connaissances en explosifs, et Abdelhamid Abaaoud, le chef opérationnel des attaques de Paris. Ce dernier est le seul à être en France, le soir du 13 novembre 2015, ouvrant le feu sur des terrasses, avant de trouver la mort lors de l’assaut du Raid à Saint-Denis cinq jours après. Ses trois complices, restés en Belgique, commettront cinq mois plus tard les attentats de Bruxelles.
Des « voix » bien informées
Oussama Atar a aussi mis à contribution Jean-Michel et Fabien Clain, connus comme les « voix » des attentats pour les avoir revendiqués. « Les frères Clain n’ont pas seulement un rôle de propagande, ils avaient une connaissance précise de ces attentats », précise Jean-Charles Brisard. Ces Réunionnais comparaissent pour complicité des crimes commis à Paris et Saint-Denis. Eux non plus ne seront pas dans le box : ils ont, selon les services de renseignement, été tués en février ou mars 2019 lors du siège de Baghouz, en Syrie.
« Oussama Atar avait un rôle de planificateur en chef des attaques. » Jean-Charles Brisard, expert en terrorisme