20 Minutes (Lyon)

De « contestati­on » à « insurrecti­on », le mouvement des « gilets jaunes » est à un tournant

« Gilets jaunes » Le mouvement durera si le gouverneme­nt ne recule pas, estiment deux experts

- Anissa Boumediene

Samedi, les « gilets jaunes » se sont une nouvelle fois mobilisés un peu partout en France. Et, une nouvelle fois, certains rassemblem­ents ont complèteme­nt dégénéré, principale­ment à Paris, où « les violences ont été d’une gravité sans précédent », a souligné le préfet de police Michel Delpuech (lire l’encadré).

Un geste fort attendu

Pour Alliance Police nationale, le doute n’est pas permis, le mouvement est «insurrecti­onnel», a dénoncé le syndicat dans un communiqué. Le leader de LFI, Jean-Luc Mélenchon, lui, s’est félicité du fait que, «en France, l’insurrecti­on citoyenne [fasse] trembler la macronie et le monde du fric». Quant à Benjamin Cauchy, fondateur des « gilets jaunes libres », il a estimé sur FranceInfo que «l’on [était] à deux doigts de l’insurrecti­on », espérant toutefois «un dialogue avec le gouverneme­nt ».

«On est dans une forme de jacquerie moderne, de tournant insurrecti­onnel», conforte Romain Pasquier, directeur de recherche au CNRS et titulaire de la chaire «territoire­s et mutations de l’action publique» de Sciences po Rennes. Pour Stéphane Sirot, historien spécialist­e des mouvements sociaux et du syndicalis­me, «il faut se méfier de ceux qui emploient le terme d’insurrecti­on pour décrédibil­iser le mouvement ou servir leur cause politique. Ce qu’il y a d’insurrecti­onnel, en revanche, c’est l’idée du peuple qui se soulève en masse contre ceux qui le dirigent.» A ses yeux, «on se croirait au temps des Etats généraux qui ont précédé la Révolution française. Emmanuel Macron se transforme en Louis XVI : il reçoit les cahiers de doléances du peuple, mais n’y comprend rien, y reste hermétique, il est incapable de faire preuve d’empathie. »

Mais alors, quel avenir pour le mouvement ? «Plus il dure, plus la sortie de crise sera compliquée, que les “gilets jaunes” se structuren­t ou pas, estime Stéphane Sirot. Ils ne lâcheront pas tant que le gouverneme­nt ne reculera pas et ne fera pas un geste très significat­if.» Romain Pasquier conseille au président d’annoncer, par exemple, «un moratoire sur la hausse des prix de l’énergie d’au moins six mois », ainsi que le réclament l’opposition et certains « gilets jaunes ». « Le président ne s’exprimera pas aujourd’hui», a comme répondu dimanche l’Elysée à l’issue d’une réunion de crise.

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Paris, samedi, 3e journée nationale de la mobilisati­on des « gilets jaunes ».

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