D’Utoya à Christchurch, les terroristes d’extrême droite ont un profil assez similaire
Un expert compare pour « 20 Minutes » les profils des terroristes de Christchurch et d’Utoya
Vendredi, à l’heure de la prière, cinquante personnes ont trouvé la mort dans des fusillades contre deux mosquées de Christchurch, en NouvelleZélande. Quelques heures avant, l’auteur présumé des attentats, Brenton Tarrant, avait publié, sur son compte Twitter, un manifeste raciste dans lequel il explique, notamment, s’être « véritablement inspiré du Chevalier Justicier Breivik ». Une référence au Norvégien Anders Behring Breivik, qui a tué 77 personnes en juillet 2011 à Oslo, puis sur l’île d’Utoya. Les points communs entre les deux hommes sont nombreux, indique Nicolas Lebourg, chercheur à l’université de Montpellier et membre de l’Observatoire des radicalités politiques de la Fondation Jean-Jaurès.
˃ Etre déclaré sain d’esprit. C’était l’un des chevaux de bataille des avocats d’Anders Breivik durant son procès : que l’homme soit déclaré sain d’esprit et responsable de ses actes. Richard Peters, l’avocat de Brenton Tarrant, a estimé que la question de la responsabilité pénale de l’Australien ne se posait pas : « Il est apparu comme quelqu’un de rationnel et qui ne souffre pas d’un handicap mental », a-t-il déclaré. Selon Nicolas Lebourg, les terroristes d’extrême droite « estiment qu’ils sont face à un problème rationnel et qu’ils doivent donc utiliser une solution rationnelle ». « La plupart du temps, ils sont même relativement équilibrés, leur pensée est construite », poursuit le chercheur, avant d’ajouter : « Ce sont des gens qui sont très politisés, qui ont une très bonne connaissance de l’actualité, ils voyagent, ils lisent. »
˃ Publier un manifeste. Brenton Tarrant a publié un manifeste intitulé « Le Grand Remplacement » pour justifier son geste. Une thèse défendue par l’écrivain français Renaud Camus sur la disparition des « peuples européens », « remplacés » par des populations non européennes immigrées. Anders Breivik avait lui aussi publié un texte où il reprochait à ses victimes de promouvoir le multiculturalisme, appelant ses compatriotes à suivre son exemple. « Publier un manifeste, c’est donner une grille de lecture à leurs successeurs, à ceux qui vont poursuivre la lutte », explique le chercheur de l’université de Montpellier, qui indique que « c’est aussi un moyen d’informer les citoyens et les médias, et donc de faire parler d’eux au plus grand nombre possible ».
˃ Se défendre seul. Si Brenton Tarrant a limogé son avocat lundi, Anders Breivik avait déjà en tête, avant même de passer à l’acte, le nom de l’avocat qu’il voulait solliciter, en l’occurrence Geir Lippestad, qui s’était occupé de la défense d’un militant néonazi par le passé. Qu’importe la défense, le but reste le même, « faire de leur procès une tribune mondiale » pour défendre leurs thèses, avance Nicolas Lebourg.
˃ Servir d’exemple. Pour le chercheur, «l’acte individuel doit permettre d’éveiller la conscience collective. D’ailleurs, ils s’appellent les “éveilleurs du peuple” (…). Quand Brenton Tarrant inscrit les noms de terroristes d’extrême droite sur ses armes, le message, c’est : “La prochaine fois, ce sera mon nom qui servira d’exemple.” » Manon Aublanc